“Les bombardements israéliens sur Gaza, qui ont fait déjà plus de 270 morts parmi les Palestiniens, étaient planifiés avant même la trêve de six mois avec le Hamas“, écrit dimanche le quotidien israélien Haaretz. Pour sa part, le Père Manuel Musallam, seul prêtre catholique de rite latin dans la bande de Gaza, a déclaré dimanche qu’on assistait à Gaza à un “véritable massacre” et pas à un simple bombardement : “Ce qui est en cours à Gaza est un massacre, pas un bombardement, c’est un crime de guerre et encore une fois, personne ne le dit“, a-t-il déclaré dimanche à l’agence de presse catholique Misna à Rome. Le Père Musallam, curé de la paroisse de la Sainte Famille à Gaza, rapporte que les nouvelles d’une opération visant seulement les structures liées au Hamas et aux groupes terroristes responsables du lancement de fusées Qassam contre Israël sont fausses.
“Dans les bombardements, témoigne-t-il, est mort aussi l’un de mes meilleurs amis, le chef de la police de Gaza, Tawfiq Jabben. Qu’a à voir la police avec le Hamas ? Il est vrai que c’est le Hamas qui est au pouvoir à Gaza et que la police doit répondre à ses ordres, mais les policiers n’ont rien à voir avec la politique“. Aux yeux du Père Manuel Musallam, ces policiers ne peuvent pas être qualifiés de “terroristes”.
L’agence missionnaire Misna souligne d’autre part que de nombreux civils innocents, dont des femmes et des enfants, ont été touchés par ces bombardements aériens. Les hôpitaux de Gaza, qui subissent déjà depuis des mois le blocus imposé par Israël, sont remplis de blessés et sont au bord de l’effondrement, d’autant plus qu’ils n’ont plus d’électricité depuis une semaine et que les médicaments se font de plus en plus rares.
Dans une interview accordée avant Noël à l’agence de presse catholique italienne SIR, le Père Manuel Musallam déclarait déjà que durant les six derniers mois, “Israël n’a pas respecté le cessez-le-feu et a continué à entrer dans la Bande de Gaza. De nombreuses personnes ont été tuées ou blessées, de nombreuses maisons ont été détruites, Hamas a fait de son mieux pour ne pas riposter“. Et le prêtre de souligner qu’il connaît bien la situation, étant donné que les enfants des membres du Hamas fréquentent les écoles catholiques de Gaza. Il souhaitait alors que le pape Benoît XVI, lors de sa prochaine visite en Terre Sainte, puisse visiter Gaza. “S’il pouvait le faire, ce serait une pierre milliaire sur le chemin de la paix et du dialogue“.
Le Père Federico Lombardi, “porte-parole” du Saint-Siège, cité dimanche par l’agence italienne Ansa, a relevé que l’attaque israélienne étonne par ses proportions et par le nombre de victimes, ajoutant qu’il y aura toujours plus de victimes innocentes. “La haine va grandir encore et les espoirs de paix s’éloigneront à nouveau“. Sur les ondes de Radio Vatican, il a dénoncé la logique perverse de l’affrontement et de la violence, soulignant que “le Hamas est prisonnier d’une logique de la haine, Israël de la logique du recours à la force comme meilleure réponse à la haine. Il faut continuer à chercher une autre issue, même si cela semble impossible“.
Opérations de diversion depuis des mois
Selon Barak Ravid, correspondant du quotidien Haaretz, les attaques qui ont commencé samedi matin étaient préparées de longue date, comprenant une soigneuse collecte de renseignements, des discussions secrètes, des opérations de diversion notamment pour tromper et induire en erreur le public. Cette désinformation, selon des responsables de la défense israélienne, a pris le Hamas par surprise, permettant de lui infliger de sévères pertes lors des frappes aériennes.
Barak Ravid, s’appuyant sur des sources militaires, écrit que le ministre israélien de la défense Ehud Barak a donné des instructions pour que l’armée israélienne se prépare pour cette opération – baptisée “Oferet yétsouka” (plomb durci) – il y a plus de six mois, même quand Israël commençait de négocier l’accord de cessez-le-feu avec le Hamas. Selon le journal israélien, le Premier ministre Ehud Olmert et le ministre de la défense Ehud Barak se sont rencontrés le 18 décembre dans le quartier général de l’armée israélienne dans le centre de Tel Aviv pour approuver l’opération.
Toujours selon ces informations, le cabinet israélien a été convoqué mercredi dernier pour traiter de l’attaque contre Gaza et les discussions détaillées ont duré cinq heures, pour aboutir finalement à un vote unanime en faveur des frappes contre le Hamas. La décision finale a été prise vendredi matin, lors d’une rencontre entre Ehud Barak, le chef d’Etat major général Gabi Ashkenazi, le chef du Shin Bet, Yuval Diskin, et le chef du directoire des renseignements militaires, Amos Yadlin. Barak s’est ensuite entretenu avec Olmert et la ministre des Affaires étrangères Tzipi Livni, et le trio a alors donné l’ordre d’attaquer Gaza.
Barak Ravid écrit également qu’Israël va mettre en place une opération urgente de relations publiques internationale pour expliquer au reste du monde la position israélienne, dont l’ampleur est largement critiquée. Tzipi Livni a donné des ordres pour lancer une opération d’explications “agressive” dans le but d’obtenir un soutien international pour cette opération de guerre. Le ministère israélien des Affaires étrangères cherche des locuteurs parlant des langues étrangères, en particulier l’arabe, l’italien, l’espagnol et l’allemand, pour mener cette opération de relations publiques notamment en direction des médias étrangers présents en Israël. (apic/haar/rvat/misna/be)
Auteur : Jacques Berset
Source : APIC
Tel Aviv, 28 décembre 2008