Par Claude Simon
Les enjeux français et mondiaux sont actuellement majeurs (climat, migrations de peuples en déshérence, montée des inégalités, montée de la xénophobie…) et notre campagne électorale est calamiteuse : aucun débat de fond, des partis de gauche comme de droite qui se divisent…
Pour prendre un peu de recul je relis des classiques, cela réconforte et permet de voir les choses d’un peu plus haut. En l’occurrence je relis du J.J. Rousseau qui au siècle des Lumières après le rationalisme de Kant a apporté un peu de cœur à l’avancée des idées. Je vais vous en livrer deux pensées avec quelques commentaires de ma part.
« Il faut de la poudre à nos perruques ; voilà pourquoi tant de pauvres n’ont point de pain. » (Note de bas de page de J.J. Rousseau à sa dernière réponse au sujet de son « discours sur les sciences et les arts », ceux qui souhaitent des références encore plus précises me le disent, citation difficile à trouver). Cette pensée a l’air toute bête, mais elle traduit chez J.J. Rousseau une compréhension du monde et de l’économie malheureusement peu courante. On pourrait l’exprimer également ainsi : la richesse des uns fait la pauvreté des autres. En fait beaucoup estiment que par exemple l’industrie du luxe, voire le gaspillage, crée de l’activité économique, donc des emplois et est donc profitable à tous. En théorie économique on appelle cela : la théorie du ruissellement. A ma connaissance aucun économiste sérieux ne s’en revendique, mais pourtant elle circule que ce soit chez les citoyens « lambda », dans de la presse « économique » néolibérale (Les échos, Valeurs actuelles…) ou encore chez des hommes de bonne volonté ayant mal compris à la fois l’économie et la société. En fait cela revient à considérer que l’homme doit être au service de l’économie, laquelle prime de fait sur tout, et devient la finalité de la société humaine et non l’inverse : c’est à l’économie d’être au service de l’homme. Pour revenir à la métaphore de J.J. Rousseau les bonnes questions sont : la poudre pour les perruques est-elle plus utile que le pain pour les pauvres ? ou même, est-elle vraiment utile ? Si elle n’est pas utile n’est-il pas préférable de s’en passer et que le travail ainsi économisé soit consacré au bien-être, au qualitatif (aller à la pêche, jouer à la pétanque…) plus qu’au quantitatif qui va nous mener dans le mur climatique. Mais bien sûr uniquement si les besoins essentiels de l’humanité sont préalablement assurés. Bien entendu cela va contre le consumérisme que notre système politique et économique tend à nous imposer notamment par la publicité et tout le marketing. On le voit, cette pensée de J.J. Rousseau nous ramène à de vrais problèmes essentiels tels que nous aimerions bien les voir abordés dans le cadre de cette campagne.
« Sitôt que le service public cesse d’être la principale affaire des Citoyens et qu’ils aiment mieux (se) servir de leur bourse que de leur personne, l’État est déjà, près de sa ruine (…) ils nomment des députés et restent chez eux. (…) Sitôt que quelqu’un dit des affaires de l’État, que m’importe ? On doit compter l’État perdu. » (Du contrat social, Livre III, chap. XV). Avec le vocabulaire moderne on peut traduire cette phrase de J.J.Rousseau de la façon suivante : la démocratie représentative ne suffit pas, il faut intéresser les citoyens à la politique et pratiquer la démocratie participative.
Les anciens nous aideront-ils à faire le bon choix lors des élections ? En tout cas ils nous donnent matière à réflexion bien plus que tous nos politiques.