Scientologie : la secte ne sera pas dissoute
La mesure était passée inaperçue : le 12 mai 2009, deux semaines avant le procès de l’Eglise de scientologie, l’Assemblée a voté une loi fourre-tout de « simplification du droit » qui met aujourd’hui la secte à l’abri du pire.
D’après ce texte, présenté en première lecture fin 2008 par le député UMP Jean-Luc Warsmann, un magistrat ne peut plus dissoudre une personne morale pour escroquerie. Or c’est précisément ce qu’avait requis le Parquet de Paris mi-juin à l’encontre des deux principales structures françaises de la scientologie.
La Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) qui a révélé lundi cette modification législative « intervenue sans débat » craint que celle-ci rende « inopérantes les réquisitions du Parquet ». « Face à des organisations à caractère sectaire présentant un réel danger pour l’ordre public et la santé publique, la justice doit toujours pouvoir disposer d’une telle mesure », affirme le président de la Miviludes, Georges Fenech.
« Nous n’avons trouvé, à ce jour, aucune motivation légitime à la suppression de ce texte intervenu en catimini et d’application immédiate », dénonce Me Olivier Morice, l’avocat des parties civiles au procès de la Scientologie, qui, « scandalisé », a écrit à la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie.
Souvent brûlante, la question se pose à nouveau de savoir si la scientologie a infiltré le pouvoir. La Chancellerie, hier, et cette fois la Commission des lois, présidée par Jean-Luc Warsmann. Mardi, sur Europe 1, la Garde des Sceaux a expliqué que la mesure incriminée résultait d’une « erreur matérielle » et s’est engagée à faire rétablir la possibilité de dissoudre en justice une personne morale coupable d’escroquerie.
Bernard Accoyer, le Président de l’Assemblée nationale, a de son côté envisagé d’inclure des dispositions nouvelles, pour mieux lutter contre les sectes et donc la scientologie, dans le projet de loi pénitentiaire débattu à l’Assemblée à partir du 15 septembre.
Bref, c’est panique à bord du côté du gouvernement et de l’UMP. En revanche, la scientologie n’a pas vraiment de quoi s’inquiéter : le délibéré du procès la concernant est attendu le 27 octobre, trop tôt pour qu’elle puisse faire les frais de ce retour en arrière.
Si le Parquet a également requis quatre millions d’euros d’amende, des peines de prison avec sursis, des amendes et la privation de droits civiques contre quatre de ses responsables français, elle échappe ainsi à la peine qui permettait d’atteindre la structure elle-même et non plus seulement ses responsables ou l’une des ses activités.
Auteurs : Constance de Buor et Corine Chabaud
Source : Lavie.fr, 15 septembre 2009