La célébration eucharistique
« La célébration eucharistique est aussi vieille que l’Église. “L’Église fait l’Eucharistie, l’Eucharistie fait l’Église” dit le père de Lubac. Sans eucharistie, il n’y a pas d’Église, sans l’Église il n’y a pas d’eucharistie. La vie de l’Église ne se conçoit pas sans l’eucharistie. Pourquoi est-elle si importante ? »
C’est la question dont était partie Laure Caumont dans une série d’interventions qu’elle fit au sein du collectif Paris-Ile de France et qui viennent d’être rassemblées dans un fascicule que publie NSAE.
Dans une première partie, elle y montre la spécificité, le caractère propre de la célébration chrétienne par rapport aux autres célébrations, en cherchant ce qui l’enracine profondément dans l’humain : la notion de sacré, les rites, les symboles utilisés, et en quoi elle est différente parce qu’elle nous entraîne dans une autre manière de croire en Dieu.
Dans la seconde, elle suit l’évolution de la célébration eucharistique dans l’histoire et repère, à travers les siècles, les continuités et les déviations apparues en raison des liens entre l’Église et le monde, que les études de l’histoire et de l’exégèse permettent désormais de déceler et de comprendre.
Nous en présentons ci-dessous quelques courts extraits.
La liturgie, une autre façon de faire de la théologie.
Comme telle elle revêt une importance décisive pour la vie de l’Église. On se souvient que lors du Concile Vatican II, les premiers textes soumis à l’Assemblée furent renvoyés en commission pour insuffisance. Afin d’occuper les Pères, on décida de discuter de la liturgie qui ne devait pas poser de problème. Or dès les premières discussions, on assista à l’affrontement entre les tenants de la liturgie en usage et les partisans d’une liturgie tenant compte des recherches de l’exégèse et de l’Histoire qui permettaient de retrouver la véritable Tradition, celle qui nous vient de Jésus et des premières communautés chrétiennes. Autrement dit, on retrouvait à propos de la liturgie, l’opposition entre ceux qui voulaient réformer l’Église en profondeur et les « conservateurs ». Ce n’était pas une question de latin ou de génuflexions, mais une remise en cause de la conception des rapports des chrétiens avec le monde et avec Dieu. C’est pourquoi il est essentiel de se pencher sur les origines et les évolutions de la liturgie et en particulier celles de la célébration eucharistique pour comprendre les véritables enjeux du conflit avec les lefebvristes et avec le Vatican qui leur prête aujourd’hui une oreille trop complaisante.
Christianisme et sacré primordial
Les circonstances historiques ont amené l’Église à revenir à une forme de sacré, s’apparentant aux conceptions du « sacré Primordial » qui viennent du plus lointain de l’humanité ; et finalement à une pensée archaïque que la prédication de Jésus, dans la ligne des prophètes d’Israël, avait dépassée et contestée.
Prendre conscience de la différence entre « prier » et « célébrer ».
« On ne vient pas à la messe pour prier mais pour célébrer ». Cette affirmation d’un liturgiste est une manière un peu brutale de dire la différence entre la prière privée et la prière publique. Ce n’est pas une question de qualité de la foi mais de statut de la prière. Quand on est en dehors de la communauté, on prie comme on veut, où on veut, dans l’attitude qu’on veut, le temps qu’on veut. Même la méditation de l’Évangile en équipe est privée. Par contre, la célébration eucharistique, la messe, est publique. On peut dire que la liturgie est la « fonction publique » de l’Église, peuple de Dieu, et comme telle elle obéit à des règles.
La liturgie est la fonction publique de l’Église
On ne veut pas dire par là que les membres du clergé soient des « fonctionnaires de Dieu ». Cette image doit être corrigée par le fait que ce n’est pas le clergé qui célèbre – même si cette idée demeure dans beaucoup d’esprits – mais le peuple de Dieu tout entier qui exerce la fonction sacerdotale. Il est « prêtre, prophète et roi » par le baptême qui nous a incorporés au Christ. C’est le peuple chrétien tout entier qui offre le nouveau « sacrifice », entendu non comme la mort sanglante du Christ censée satisfaire un Dieu irrité comme le chantait « Minuit chrétien » mais une vie entière donnée à Dieu et aux autres, jusqu’à la mort, celle du Christ comme la nôtre. C’est l’Église toute entière qui prend en charge cet acte.
L’eucharistie n’est pas quelque chose dont on parle mais quelque chose que l’on fait
« Faites ceci en mémoire de moi. » Quand Vatican II utilise l’expression « action liturgique », c’est un pléonasme mais un pléonasme volontaire pour bien faire comprendre que la liturgie mobilise toute l’activité de ceux qui sont présents. On n’assiste pas, on ne participe même pas on « célèbre ». Il a fallu changer des mentalités qui ont duré plusieurs siècles pour retrouver le sens profond de la célébration. Ce n’est pas pour revenir en arrière aujourd’hui !
Pour plus d’informations sur le fascicule et la façon de se le procurer, s’adresser à NSAE, 68 rue de Babylone, 75007 Paris ; tel : 01 45 51 57 13