Immigration et sécurité : le point de vue de Mgr Brunin
Le 30 Juillet 2010, Nicolas Sarkozy, venu installer le nouveau préfet de l’Isère, après les graves violences survenues mi-juillet à Grenoble avait tenu un discours très ferme proposant notamment que la nationalité française puisse “être retirée à toute personne d’origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte” à la vie d’un policier, d’un gendarme, ou de tout autre “dépositaire de l’autorité publique”
Lundi 2 Août 2010, dans une interview accordée à Radio Vatican [1], Mgr Brunin, évêque d’Ajaccio et membre du Conseil Pontifical pour la pastorale des migrants et itinérants a exprimé son désaccord avec le discours sécuritaire de Nicolas Sarkozy comme il l’a fait dans le quotidien La Croix [2] et dans l’hebdomadaire La Vie [3].
Mgr Brunin dénonce l’amalgame entre insécurité et immigration qui conduit à stigmatiser les populations d’origine immigrée et à créer des clivages et des catégories à l’intérieur de la population française.
Il réaffirme que le message de l’Eglise inspiré de l’Evangile est une invitation à développer des relations entres les hommes et les peuples sur la base de la solidarité et de la fraternité, à l’exemple de ce qui se vit dans les communautés d’Eglise.
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[1]
Déchéance de nationalité : la politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy contraire à l’Évangile ?
Depuis vendredi, en France, la polémique autour du discours sécuritaire de Nicolas Sarkozy ne cesse d’enfler. À l’occasion de l’installation du nouveau préfet de l’Isère, vendredi, à Grenoble, Nicolas Sarkozy avait proposé une législation permettant la déchéance de nationalité pour toute personne d’origine étrangère «ayant volontairement porté atteinte à la vie d’un policier, d’un gendarme ou de tout autre représentant de l’autorité publique». Deux jours plus tard, son Ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, élargissait la menace aux cas d’excision, de traites d’êtres humains et d’actes de délinquance grave. Ces déclarations ont provoqué un tollé. L’opposition, mais aussi des voix à droite, accusent Nicolas Sarkozy de mettre en danger l’unité de la Nation à des fins d’électoralisme et de diversion. Cette proposition qui est, de facto, inconstitutionnelle, ne peut qu’être «politique» – estime-t-on. Les partis de gauche l’accusent de s’attaquer au principe d’égalité devant la loi pour essayer de reconquérir l’électorat du Front national qui l’avait rejoint en 2007 et qui semble aujourd’hui se tourner vers Marine Le Pen, probable candidate du FN à la présidentielle de 2012. Pour Mgr Jean-Luc Brunin, évêque d’Ajaccio, cette proposition est inacceptable et contraire à l’Évangile. Il a répondu aux questions de Julie Duclos.
Ecouter l’interview de Mgr Brunin sur Radio Vatican :
http://www.radiovaticana.org/fr1/articolo.asp?c=412708
[2] Entretien (par Claire Lesegretain) paru dans La Croix du 4 août 2010 : « La difficulté d’insertion n’est pas inscrite dans les gènes ! »
[3] Entretien (par Joséphine Bataille) paru dans La Vie du 5 août 2010 : « Stigmatiser génère l’insécurité » :
« L’amalgame opéré par Nicolas Sarkozy entre insécurité et immigration est extrêmement dommageable, car il conduit à stigmatiser une fois de plus des populations d’origine immigrée. Les événements de Grenoble, qui relèvent du grand banditisme, sont bien-entendu inadmissibles, et l’État a le devoir de punir les coupables et d’assurer la sécurité de tous les citoyens. Mais le droit à la sécurité se décline : ce n’est pas seulement celui de circuler sans se faire agresser ; c’est aussi celui d’avoir un logement, un travail qui assure un salaire décent, et la possibilité de ne pas vivre dans une précarité constante. Une politique qui assure la sécurité de tous, c’est-à-dire l’harmonie sociale, ne peut pas se réduire à une politique sécuritaire.
Je regrette que les propos du président de la République puissent casser le travail de terrain fourni au quotidien dans les quartiers pluriethniques pour permettre aux gens d’acquérir la conscience d’une communauté de destin. Le bien, lui, ne fait pas de bruit. Stigmatiser les gens du voyage, les immigrés, faire des clivages et des catégories, précariser la citoyenneté, c’est cela qui génère de l’insécurité. »