Deux ou trois choses que je sais du nucléaire…
Ainsi donc à en croire certains de nos ministres, il serait « indécent » (sic) d’évoquer, par égard pour le Japon, la situation du nucléaire en France. Comme si les citoyens du monde que nous sommes devenus, par la force de l’information mondialisée et d’Internet, ne seraient pas capables à la fois de ressentir de la compassion pour le peuple japonais et en même temps de nous poser des questions sur une énergie qui fournit en France 82 % de nos besoins en électricité.
Je me souviens à cet égard de deux dates : 1980 et 2007. En 1980, jeune journaliste au Télégramme de Brest, je découvrais le conflit de Plogoff où toute une population empêcha la construction d’une centrale nucléaire à proximité de la pointe du raz (Finistère), un des sites sauvages les plus beaux de France. Pour EDF et un certain nombre d’élus, cette mobilisation était visiblement l’oeuvre « d’obscurantistes bretons » qui, selon l’expression imbécile de l’époque, préféraient, selon eux, «la bougie au nucléaire ». Finalement, la construction d’une centrale à Plogoff fut abandonnée en 1981, suite à une promesse de campagne de François Mitterrand.
En 2007, le Grenelle de l’environnement fut convoqué par Nicolas Sarkozy. Une initiative plutôt audacieuse de notre nouveau président de la République et qui eut le mérite de réunir ensemble, pour la première fois autour d’une table, pouvoirs publics, organisations professionnelles et ONG environnementalistes.. Une grande première qui déboucha – dans un premier temps avant les reculs d’aujourd’hui – sur un ambitieux programme d’action. Sauf que … un sujet fut délibérément écarté des discussions : le nucléaire. « Non négociable » dit à l’époque le président.
Pourquoi ? Comme si nos sociétés très consommatrices d’énergie – des forage des plates formes pétrolières à l’exploitation des gaz de schiste en passant par la construction de centrales nucléaires – étaient incapables de débattre démocratiquement de nos choix énergétiques. Sans doute parce que ces débats risquent de remettre en question nos modes de vie et de nous aider à nous engager résolument dans des sociétés de sobriété énergétique. Avons-nous d’autre choix ? Alors qu’on le voit cette fois encore au Japon, les accidents nucléaires, après ceux de Three Miles Island et de Tchernobyl, posent, eux, à chaque fois la question de la survie de l’humanité. Ne pas le faire serait, selon l’expression très pertinente de Nicolas Hulot, « jouer notre avenir à la roulette russe »
Olivier Nouaillas
Publié le 14/03/2011