En Hongrie, des camps de travail obligatoire qui visent les Roms
Le gouvernement hongrois veut remettre les allocataires de prestations sociales au travail. Des policiers pourraient surveiller ces salariés regroupés dans des camps et affectés à de gros projets d’infrastructure. Principale cible de ce programme : les Roms, dont le taux de chômage avoisine les 50%.
En lançant en mai dernier sa proposition d’obliger les bénéficiaires du RSA (Revenu de solidarité active) à travailler, Laurent Wauquiez, alors ministre des Affaires européennes, avait suscité une violente polémique dans l’Hexagone. L’assimilation des allocataires sociaux à un « cancer de la société » était mal passée.
« En contrepartie du RSA, il faut que chacun assume, chaque semaine, cinq heures de service social », avait-il alors lancé, évoquant la possibilité que les allocataires assument des tâches comme la surveillance des sorties d’école, le nettoyage ou l’accueil des services publics.
Construction d’un stade, nettoyage des rues
Si le projet est pour le moment resté dans les cartons, ces idées semblent avoir trouvé un certain écho en Hongrie où une nouvelle loi devrait entrer en vigueur à partir du 1er septembre prochain. Les bénéficiaires d’aides sociales se verront alors proposer des tâches d’intérêt général sur de gros chantiers de travaux publics, tels la construction d’un stade de football à Debrecen (à l’est du pays), le nettoyage des rues mais aussi l’entretien des parcs et des forêts.
Et ceux qui refuseront seront privés de leurs allocations…
Le quotidien allemand Die Tageszeitung explique :
« Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour comprendre que cette mesure vise principalement les Roms. Alors que le taux de chômage est en moyenne de 8% dans l’Union européenne, l’employabilité de la plus grande minorité du continent est un problème endémique. »
Selon les statistiques, près de 50% des Roms – faiblement qualifiés et victimes de discrimination à l’embauche – seraient ainsi sans emploi. Du coup, nombre de familles vivent de l’aide sociale.
Des centres de logements collectifs
Ce projet de travail obligatoire qui figurait dans le programme du parti Jobbik (extrême droite) a été repris par la droite nationaliste. Pire encore : le plan présenté par le gouvernement prévoit la construction de centres de logements collectifs, pouvant être dans certains cas des containers aménagés pour les personnes dont le lieu de résidence serait trop éloigné des chantiers. Le quotidien allemand ajoute :
« Et pour surveiller ces camps, Viktor Orban, le premier ministre hongrois a eu une très bonne idée : des policiers fraîchement partis à la retraite pourraient assurer la sécurité… »
Ce à quoi le ministre de l’Intérieur Sándor Pintér répond, pragmatique :
« Ils ont les compétences nécessaires pour remettre au travail quelque 300 000 personnes. »
Main-d’œuvre bon marché pour investisseurs chinois
Si certains sites d’extrême gauche ne se privent pas de comparer ce plan avec les méthodes fascistes – les camps de travail obligatoire gardés par des policiers renvoient aux pires heures de l’histoire européenne –, le Tageszeitung souligne, quant à lui :
« [que] ce n’est pas un hasard si l’annonce de ces mesures intervient après la visite du premier ministre chinois, Web Jiabao, à Budapest. La grande puissance asiatique veut racheter la dette hongroise mais aussi investir dans l’industrie et les projets d’infrastructures du pays. »
Et la possibilité de bénéficier d’une main-d’œuvre bon marché ne serait pas pour lui déplaire.
Le spectre du « camp de travail obligatoire » justifie les propos lancés par Daniel Cohn-Bendit qui, début juillet, aux termes d’une présidence hongroise ponctuée de polémiques, s’en est pris directement à Viktor Orban, l’accusant de « dégrader l’Europe ».
Le dirigeant hongrois a alors répliqué :
« Je défendrai toujours la Hongrie contre les remarques et critiques, de Bruxelles ou d’ailleurs. La Hongrie n’est pas subordonnée à Bruxelles, Bruxelles n’est pas le centre de commandement de la Hongrie. »
Sauf qu’il est parfois de sinistres références qui devraient obliger Bruxelles à hausser le ton.
Laurence Estival
13/07/2011
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