Des chrétiens s’engagent contre les paradis fiscaux
Alors que l’Europe s’enfonce dans une crise économique et financière sans précédent, quatre organisations chrétiennes (CCFD-Terre Solidaire, le Secours catholique, Justice et paix et le Ceras) publient un document intitulé : “Au service du bien commun”, dans lequel elles dénoncent une nouvelle fois avec vigueur la fraude fiscale et l’évasion des capitaux.
Que des catholiques s’occupent de paradis, soit, mais de fiscalité, c’est plus étonnant. Pourquoi un texte de mouvements et services d’Eglise sur les paradis fiscaux ? Pourquoi ces organisations s’engagent-elles dans des campagnes de sensibilisation du grand public et de plaidoyer auprès des pouvoirs publics et privés, alors que la question de l’évasion fiscale paraît bien lointaine de la charité ? Cette brochure de 12 pages, rédigée dans un style clair et pédagogique, répond à ces questions et permet de comprendre comment chaque chrétien peut agir pour plus de justice fiscale. Et montre que cet engagement s’ancre pleinement dans la doctrine sociale de l’Eglise.
En France, la fraude fiscale coûte à elle seule 40 à 50 milliards d’euros au budget de l’Etat : l’équivalent de deux fois le déficit de la sécurité sociale. “Sans impôt, l’Etat est réduit à l’impuissance et la solidarité laissée à la seule responsabilité individuelle, affirment les auteurs de ce document. Le manque à gagner pour les Etats réduit considérablement leurs marges de manœuvre et lèse les populations les plus fragiles. Ce sont toutes les politiques de redistribution qui sont mises à mal, les services publics – santé, éducation notamment – qui ne peuvent être assurés, les investissements d’avenir qui sont obérés, le désendettement de l’Etat qui est rendu problématique.”
Selon les organisations catholiques, “les modalités de financement des institutions publiques pèsent lourdement sur leurs capacités d’action. D’elles dépendent la possibilité de contribuer à une vie meilleure pour tous par la redistribution des revenus. L’existence de lieux opaques et non contrôlés (les paradis fiscaux, ndlr) permet à des personnes et à des entreprises de dissimuler leurs revenus, privant ainsi les pays et tout spécialement les plus pauvres d’au moins 125 milliards d’euros de revenus fiscaux par an”. Un scandale dénoncé depuis longtemps par les ONG, notamment par le CCFD-Terre solidaire qui, il y a un an, lançait une vigoureuse campagne sur ce thème, avec une pétition en ligne d’un nouveau genre : « Aidons l’argent à quitter les paradis fiscaux ». Signe d’une large mobilisation, 430 000 cartes postales, dénonçant les paradis fiscaux, ont aussi été récoltées. Elles seront transmises au Président de la République le 27 octobre, à la veille du G 20 qui doit se tenir à Cannes, du 3 au 5 novembre.
Dès maintenant, au nom de leur foi et des exigences éthiques qui en découlent, les signataires de ce texte invitent les chrétiens à s’engager collectivement en rejoignant la campagne “Stop Paradis Fiscaux”, menée par un réseau d’associations et de syndicats, dont le CCFD-Terre solidaire et le Secours catholique : www.stopparadisfiscaux.fr ou en incitant les collectivités locales à travailler avec des acteurs économiques qui n’ont rien à cacher dans les paradis fiscaux, comme s’y sont déjà engagés plusieurs Conseils régionaux. A titre individuel, les chrétiens sont aussi invités à interroger leurs pratiques quotidiennes dans le choix de leur banque, de leurs produits d’épargne, ou dans la manière d’employer une personne à domicile. Une manière de rappeler que la justice fiscale, c’est l’affaire de tous.
Laurent Grzybowski
publié le 20/09/2011
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