Dans le souffle de la libération… En compagnie du père Gustavo Gutiérrez
Intervention prononcée par Guy Aurenche lors des « Journées CEFAL » 2012 pour les 50 ans du CEFAL (Comité Episcopal France-Amérique Latine) qui se sont tenues les 2-3 mars 2012 au Séminaire des Missions à Chevilly-Larue (Val-de-Marne) et à l’institut catholique de Paris, avec pour invité d’honneur le P. Gustavo Guttérriez, dominicain péruvien, initiateur de la théologie de la libération.
Avec joie… !
Au nom du CCFD-Terre Solidaire, de nos 450 partenaires dans 65 pays du monde, du réseau français composé de près de 15.000 personnes, de l’ensemble de 29 mouvements et services d’Église qui constituent la collégialité du CCFD-Terre Solidaire, de tous nos alliés français et étrangers dans les démarches de réflexion, d’action et de plaidoyer, j’adresse un immense merci à Gustavo Gutiérrez pour ce qu’il nous a partagé à travers l’itinéraire des Églises d’Amérique Latine et tout particulièrement de la théologie de la libération.
Merci à Gustavo Gutiérrez d’ouvrir nos horizons français qui sont, me semble-t-il, un peu bouchés en cette période de pré campagne électorale. Merci de donner des horizons.
Merci aussi d’ouvrir nos horizons au coeur de l’Église de France. En effet, là encore, la tentation est de limiter nos horizons à un sauve qui peut général ou à un repli identitaire et institutionnel qui bouche l’horizon.
Merci à Gustavo Gutiérrez de nous dire qu’un théologien de terrain : «c’est possible». Cela nous rassure. Et dans ce lieu de l’Institut catholique de Paris il est important que ces paroles résonnent. Nous savons bien que théologiennes et théologiens de terrain existent tant en France qu’à l’étranger. C’est bon de le redire et de nous inviter tous à tourner notre réflexion sur la dimension théologique de nos actions et de nos projets. Vous nous encouragez tous dans cette direction.
Merci enfin à Gustavo Gutiérrez de nous dire qu’une Église qui a fait, et qui fait encore aujourd’hui, une option préférentielle pour les pauvres et avec les pauvres, c’est possible, c’est vivable, c’est visible. C’est tout un message d’espérance que vous nous transmettez.
Qu’il soit permis de compléter le témoignage de notre ami dominicain par celui d’un jésuite. Dans une lettre du 9 novembre 1936, le père Teilhard de Chardin écrit « Si le chrétien (j’ajoute tout homme) n’est pas en pleine sympathie avec le monde naissant, s’il n’éprouve pas en lui-même les aspirations, les anxiétés du monde moderne, s’il ne laisse pas grandir en son être le sens humain, jamais il ne réalisera la synthèse libératrice… Il continuera à s’effrayer et à condamner presque indistinctement toute nouveauté, sans discerner, parmi les souillures et les maux, les efforts sacrés d’une naissance ». Il me semble en effet que toute la démarche de la théologie de la libération a quelque chose à voir avec les efforts sacrés d’une naissance. Vous nous invitez à voir, non pas ce qu’il faudrait faire mais ce qui se fait d’ores et déjà, a écouter tous les cris de naissance, à scruter et analyser tous les processus des efforts sacrés d’une naissance qui jalonnent le monde. Le CCFD-Terre Solidaire en est bien conscient lorsque avec ses 450 partenaires il est le premier observateur et accompagnateur de ces artisans, femmes et hommes, des efforts sacrés d’une naissance.
Qu’il me soit permis de dire toute ma joie de me retrouver en présence de nombreux membres des congrégations religieuses françaises qui ont su et qui savent encore aujourd’hui s’ouvrir sur la solidarité mondiale, soit en envoyant certains de leurs membres en Amérique latine, soit en rejoignant la collégialité du CCFD-Terre Solidaire à travers l’Institut religieux pour la solidarité internationale (IRSI).
Je ne soulignerai que quelques aspects comme écho d’un témoin, d’un partenaire du pôle Amérique Latine de la Conférence des évêques de France et bien sûr un compagnon de Gustavo Gutiérrez qui marche avec nous depuis de nombreuses années sur ces chemins d’espérance.
Les réalités de la pauvreté
Il est très important de nous redire, à travers l’histoire, que l’irruption des pauvres dans les sociétés (pendant les années 1960) est un phénomène incontournable et qu’il a influencé l’ensemble des conduites de solidarité internationale, des pastorales des différentes églises et bien sûr de la réflexion théologique.
C’est bien à la présence visible et audible des pauvres sur les scènes sociales que nous devons ces renouveaux des années 1960-1970. C’est vrai encore aujourd’hui.
Redire la réalité de la pauvreté, ce n’est pas faire du misérabilisme, c’est permettre à des communautés, les plus pauvres, de faire entendre leur voix aujourd’hui, comme cela s’est fait depuis 50 ans. Puis-je vous faire entendre une voix et vous laisser deviner son auteur : « Vous êtes tous en état de péché mortel, vous y vivez et vous y mourrez, en raison de la cruauté et de la tyrannie dont vous usez à l’égard de ces gens innocents. Dites-moi, de quel droit, au nom de quelle justice, maintenez-vous en si cruelle et horrible servitude ces Indiens ? Au nom de quelle autorité avez-vous fait des guerres si détestables à ces gens qui vivaient doux et pacifiques sur leurs terres, où vous avez commis tant de meurtres et de ravages inouïs qu’un nombre incalculable d’entre eux a disparu. Comment pouvez-vous les maintenir dans une oppression et un épuisement pareils, sans leur donner à manger ni soigner leurs maladies qui dérivent des travaux excessifs que vous leur imposez, et dont ils meurent ? Pour parler plus clairement, vous les tuez, pour extraire et acquérir chaque jour de l’or. En outre, quel souci avez-vous de leur faire donner l’enseignement de la bonne doctrine, afin qu’ils connaissent leur Dieu et créateur, qu’ils soient baptisés, entendent la messe, et observent les fêtes et dimanches ? Eux aussi, ne sont-ils pas des hommes ? Ne possèdent-ils pas âme et raison ? N’êtes-vous pas tenus de les aimer comme vous-mêmes ? Ne comprenez-vous pas cela ? Comment restez-vous endormis dans un sommeil si profond et si léthargique ? ». Vous avez deviné qu’il s’agissait du sermon qui a été prononcé le 21 décembre 1511 par le frère dominicain Antonio de Montesinos. Nous en avons la connaissance grâce aux écrits du frère
Bartolomeo de las Casas.
Il me semble que ces paroles nous pourrions les prononcer, tant pour la société latino-américaine que pour la société française. C’est bien cette voix qui nous interroge : « Comment restez-vous endormi dans un sommeil si profond et si léthargique ? ». Cette interpellation résonne aujourd’hui. Nous pouvons mettre derrière ces réalités de pauvreté de nombreux visages et aussi, mais surtout, de nombreux efforts pour réagir contre, de nombreux noms et actions d’associations, d’ONG diverses, chrétiennes ou non qui n’acceptent pas l’inacceptable.
Cette pauvreté prend place dans un phénomène radicalement nouveau qui est celui de la mondialisation
Il y a 500 ans la perspective de la mondialisation était déjà très forte puisque des continents se découvraient les uns aux autres. Mais aujourd’hui nous avons franchi un cap totalement nouveau. Celui-ci entraîne parmi de nombreuses conséquences positives ou négatives un phénomène de totale interdépendance. Oui nous sommes dépendants les uns des autres. C’est pourquoi les notions de libération, solidarité, fraternité, ont toute leur place dans les pastorales et les politiques d’aujourd’hui.
Face à la mondialisation nous pouvons nous contenter de dire que nous allons développer à outrance la concurrence pour faire disparaître l’acteur qui nous concurrence et donc qui nous gêne. C’est ainsi que nous avons créé à travers le monde des lieux de violence extrême. Nous pouvons également prétendre axer notre réaction sur le principe : « Que le meilleur gagne ». Nous savons bien et nos amis latino-américains (en particulier les plus pauvres) nous ont expliqué que cette orientation avait comme conséquence de faire que les plus faibles étaient écrasés. Merci aux plus pauvres de nous rappeler cette réalité. Merci d’interpeller nos théories économiques, nos stratégies sociales qui, sous prétexte de faire gagner le meilleur, oubliaient que le plus petit était écrasé.
La troisième attitude que nous pouvons choisir, que nous devons choisir, est celle du partenariat. C’est bien le sens de l’action du CEFAL Pôle Amérique latine, comme le sens des propositions de la théologie de la libération. C’est depuis 50 ans le sens de l’action du CCFD-Terre Solidaire. C’est en partenariat que nous entendons le cri des plus pauvres. C’est en partenariat que nous relevons le défi de la pauvreté.
Relever le défi de la pauvreté c’est donner la parole à ceux qui la subissent et qui veulent réagir contre
C’est aussi et peut-être d’abord analyser ensemble les causes de cette pauvreté et ensemble travailler à la construction d’un monde politique, économique, financier, complètement différent qui fera peu à peu disparaître les causes de ces pauvretés. Celles-ci ne tombent pas du ciel, elles sont le fruit de processus, d’idéologie, de choix que nous faisons, ou que certains font.
La notion de « personnes insignifiantes » que Gustavo Gutiérrez détaillait tout à l’heure est bien présente dans nos analyses sociales, aussi bien du terrain latino-américain que du terrain européen. Oui, les phénomènes de marginalisation, discrimination et exclusion entraînent « l’insignifiance » de millions d’hommes et de femmes à travers le monde.
Face à ces réalités de pauvreté, nous entendons à travers la théologie de la libération et les mouvements de nos partenaires latino-américains (mais ils ne sont pas les seuls) que c’est sur la base de la proclamation de la dignité et du respect des droits que nous avons à agir. C’est d’ailleurs ce qui est fait pour la plupart, aujourd’hui des mouvements. La déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 affirme : « Les peuples du monde entier ont proclamé leur foi en la valeur et la dignité de la personne humaine ». Ayant fait ce choix, et nul ne le contesterait, dans cette noble assemblée, nous avons à en tirer des conséquences qui sont parfois plus discutées. La dignité impose de multiplier les processus qui permettront aux hommes et aux femmes d’avoir accès à l’exercice réel de ces droits. Lorsque nous nous battons pour le droit à la santé, à l’eau potable, à la souveraineté alimentaire, etc.
nous ne développons pas un discours idéologique ou politique particulier. Nous relevons le défi de la mise en oeuvre, de l’incarnation de la dignité de la personne. C’était toute l’inspiration de la théologie de la libération. Il est important de nous le rappeler à un moment où les discours sur la dignité sont nombreux, mais où les craintes de faire de la politique pour incarner cette dignité reviennent à la mode.
Oui, avec vous amis latino-américains, nous nous battrons pour permettre à chacune et à chacun d’avoir accès à l’exercice des droits, et bien sûr à l’exercice de ses devoirs.
L’alliance
Gustavo Gutiérrez nous a montré combien l’appel à l’alliance avait été important lorsque les communautés de base ont découvert, en relisant la Bible, d’une part que Dieu faisait alliance d’une manière préférentielle avec les plus pauvres et que, d’autre part, les plus pauvres étaient invités à faire alliance entre eux.
C’est pourquoi je voudrais dire quelques mots de nos partenariats.
Le partenariat n’est pas simplement un principe intéressant ou un voeu pieux.
C’est une réalité.
En Amérique latine, le CCFD-Terre Solidaire a développé (comme bien d’autres associations) des partenariats dans des directions diverses. Partenariat avec des organismes directement liés à l’Église catholique. Partenariat avec des groupes qui n’ont pas de liens institutionnels avec ladite Église. Mais tous ces partenaires sont inspirés aujourd’hui très fortement, qu’ils se disent ou non chrétiens, par les grands principes de la théologie de la libération qui nous ont été rappelé tout à l’heure et en particulier par l’option préférentielle pour les pauvres.
Les partenaires sont des groupes engagés sur des terrains spécifiques, parce qu’il y a là des réalités inacceptables qu’il faut combattre spécifiquement. En même temps ils sont des acteurs de transformation sociale. D’une part en recherchant les causes de ces situations inacceptables. D’autre part en s’attaquant à ces causes y compris sur le terrain de l’action politique et économique. Enfin en faisant ces démarches (en particulier le plaidoyer) en partenariat avec le CCFD-Terre Solidaire et bien d’autres associations.
Ces partenariats nous les retrouvons dans les différents domaines du développement économique de tout l’homme et de tous les hommes. Par exemple des groupes de paysans en Haïti qui cherchaient il y a 2 ans des semences. Il a fallu mettre en contact nos partenaires haïtiens avec d’autres partenaires en particulier d’Amérique latine pour trouver des solutions.
Les partenaires, transformateurs des situations sociales, interviennent bien sûr dans les diverses pastorales de l’Église catholique. Je pense à la commission pastorale de la terre au Brésil, il y en a bien d’autres, à la CEAS au Pérou avec Monseigneur Barreto. N’oublions pas que celui-ci nous disait son effarement lorsqu’il constatait à 3000 mètres d’altitude, sur l’Altiplano péruvien, que le sang des enfants de la région était plombé, empoisonné par les produits utilisés pour extraire les minerais dans cette région.
Nos partenariats se développement également avec les groupes « indigènes ». J’ai rencontré certains de ces groupes en Équateur récemment. Je peux vous dire qu’il y a là une révolution. Les indigènes ne sont pas des groupes minoritaires et marginaux que nous pourrions reléguer dans l’exotisme sympathique. Ils sont des groupes, des communautés, des partis organisés, formés, décidés à utiliser les moyens de communication et d’action les plus modernes. J’en ai fait l’expérience avec la communauté des Sarayakus en Équateur et ce fut pour moi une immense leçon.
Les partenariats du CCFD-Terre Solidaire se multiplient également en Amérique latine sur le terrain de la formation. Par exemple les centres Bartolomeo de las Casas au Pérou ou ailleurs.
La CESEEP au Brésil qui permet de proposer aux évêques et aux clercs d’Amérique latine des formations, tout spécialement aux principes et aux axes de la théologie de la libération.
Sans oublier les très nombreux lieux d’éducation populaire que le CCFD-Terre Solidaire accompagne avec de nombreux partenaires latino-américains.
Je pourrais ainsi multiplier les lieux d’incarnation de ces partenariats. Vous les connaissez mieux que moi
Je voudrais insister également sur le fait que, sur le terrain d’action français et en particulier dans les réseaux avec lesquels le CCFD-Terre Solidaire travaille, la théologie de la libération a eu une influence énorme. Et ceci est vrai y compris pour des groupes totalement laïcs.
Ainsi en est-il des méthodes de réflexion, d’analyse, de conscientisation et de propositions que nombre de groupes français ont développé sur la base de la théologie de la libération. Oui, amis de la théologie de la libération en Amérique latine, vous avez formé de nombreux militants français. Un grand merci.
Le CCFD-Terre Solidaire est heureux et reconnaissant au CEFAL Pôle Amérique latine de la CEF d’avoir transmis le message et de nous permettre de nous en nourrir.
Éléments de conclusion
Oui, j’ai reçu les paroles de Gustavo Gutiérrez comme une bonne, une très bonne nouvelle. J’ai bien aimé, Gustavo, lorsque vous avez dit que dans la période des dictatures latino-américaines (années 1970 et suivantes) certains dirigeants politiques latinos ou nord-américains ont voulu enfermer l’Église et ses communautés de base dans les sacristies. Vous nous avez dit alors « Nous avons su sortir par les fenêtres ». Ce témoignage d’il y a 50 ans doit être toujours valable aujourd’hui. Lorsque le risque est de nous enfermer ou de nous laisser enfermer dans les sacristies il nous faut réapprendre à sortir par les fenêtres.
Vous nous avez dit également qu’il y a 30 ans la théologie de la libération utilisait déjà le mot de nouvelle évangélisation ou d’évangélisation nouvelle. Il est bon de savoir que nous n’avons rien inventé. Mais en même temps, il est temps de mettre un contenu dans ces mots de Nouvelle évangélisation. L’éclairage qu’en donne la théologie de la libération est tout à fait précieux pour éviter le repliement ou le seul souci d’identité statistique. Dans la nouveauté de l’évangélisation (quelle évangélisation ne serait-elle pas toujours nouvelle ?) dans la nouveauté que mettons-nous ? Votre réponse d’il y a 50 ans était riche. La réponse des partenaires et des communautés latino-américaines d’aujourd’hui l’est toujours.
Vous nous avez expliqué ce que pouvait signifier la phrase : « L’option préférentielle pour les pauvres ». Cette explication est précieuse car nous pouvons tenter de l’incarner dans les réalisés du monde d’aujourd’hui, du monde latino-américain comme de celui qui nous entoure en Europe ou ailleurs. Le service de la Justice fait partie intégrante de l’évangélisation. Plusieurs textes épiscopaux latino-américains l’ont rappelé, influençant en cela certaines déclarations de l’ensemble de l’Église catholique. Vous nous avez dit aussi que, dans ce cadre de travail de justice, nombre d’hommes et de femmes ont su donner leur vie. Parmi eux un certain nombre de « missionnaires » français. Il ne faut jamais oublier que la construction de la libération a un prix.
Vous nous avez dit la capacité d’invention des communautés d’hier, nous mettant ainsi au défi de développer une même inventivité dans les communautés chrétiennes et solidaires d’aujourd’hui.
Et puis, pour terminer, vous nous avez réexpliqué combien le débat entre ceux qui prient et ceux qui agissent, entre les spirituels et le social était un faux débat. En nous expliquant la démarche des deux Mémoires, vous nourrissez ce débat d’une manière positive. Vous nous avez d’abord rappelé la première mémoire qui se trouve dans les évangiles qui est celle de l’appel que le Christ fait à ses disciples au moment de l’instauration de la cène eucharistique. Au moment où il partage le pain, où il donne sa vie, où il rend présent sa vie, Jésus invite ses disciples : « Faites ceci en mémoire de moi ». Vous insistez sur cette mémoire de Moi. Il ne s’agit pas du souvenir d’un homme qui fut important. Il ne s’agit pas de se rappeler la venue de Dieu au coeur de l’humanité. Il s’agit de rendre présent, de faire mémoire de tout ce que Jésus-Christ a déployé dans sa vie, en termes de gestes de partage, d’accueil des pauvres, d’écoute des insignifiants, de contestation des institutions établies, de contemplations et de prières au coeur des actions… Cette première mémoire est tout sauf désincarnée. C’est la mémoire « des présences » de Jésus tel qu’il a voulu les montrer.
La seconde mémoire, vous la tirez de l’Évangile de Jean qui ne rapporte pas l’instauration de la cène eucharistique mais la remplace par la scène du lavement des pieds. Là encore vous rappelez que Jésus demande à ses disciples de faire mémoire : « ce que je vous ai fait, vous devez vous le faire les uns aux autres ». Là encore il ne s’agit pas d’un souvenir mais bien d’un positionnement, une posture de service des frères extrêmement précise et engagée Merci de nous rappeler cette double mémoire.
Pour terminer j’illustrerai ce souci à faire communier la spiritualité et l’action à travers une petite anecdote. Lors d’un rassemblement de l’ACAT, notre fils aîné (8 ans environ) fut pris en charge par l’un des frères d’une communauté qui nous recevait. C’était le frère qui s’occupait du troupeau de vaches. Une vache trouva bon de mettre bas de jour-là et notre fiston assista aux efforts du frère vacher pour faire que l’opération se déroule le mieux possible. Au moment des vêpres, dans l’après-midi, notre fils fut stupéfait de constater que son frère vacher qu’il avait vu laborieusement engagé dans cet accouchement, était là encore dans sa grande aube, et que c’était le même. L’actif et le spirituel étaient bien rassemblés. Alors il écouta les prières de ces moines et se penchant vers Blandine, en regardant fixement les moines qui chantaient et priaient, il dit « ils (en parlant des moines) font cela tellement sérieusement, j’ai l’impression qu’ils veulent réussir ». Ce petit bout de chou de 8 ans, à travers ce moine bien vivant et bien actif, et en même temps ce même moine capable d’exprimer sa prière à travers la beauté et la tradition liturgique de l’Église, avait compris le lien entre l’action et la prière.
Merci infiniment à vous Gustavo Gutiérrez de ce témoignage vivant que vous nous avez partagé.
Guy Aurenche, président du CCFD-Terre Solidaire
3 mars 2012
Source : CCFD-Terre solidaire. Site : http://www.ccfd-terresolidaire.org
Télécharger l’intervention au format pdf : 10-Interv.G.Aurenche
Pour en savoir plus sur le CEFAL :
• http://www.paris.catholique.fr/Missionnaire-en-Amerique-latine-le.html