Finance Watch, l’ONG qui fait vaciller les lobbys financiers
La mission de Finance Watch : “Faire que la finance soit au service de la société.” Sa méthode : éclairer les décisions des dirigeants européens en démontant les arguments des intérêts financiers. L’ONG Finance Watch est parvenue à installer un contre-pouvoir face aux lobbys financiers.
Enquête par Olivier Milot
Imaginez le débat sur le nucléaire sans Greenpeace, il serait d’une opacité absolue. Le combat en faveur des droits de l’homme sans Amnesty International, il serait émasculé. La démocratie a besoin de contre-pouvoir, c’est son oxygène. Au cœur de l’Europe, à Bruxelles, le secteur de la finance a pourtant longtemps pu imposer ses intérêts aux politiques en l’absence de toute contradiction.
Pour mettre fin à cette dangereuse anomalie, il a fallu qu’une poignée de députés européens se rebiffent et favorisent l’émergence d’une ONG défendant les seuls intérêts de la société civile. C’était il y a tout juste deux ans. Récit de la création d’un contre-pouvoir au lobby de la finance.
22 juin 2010
Ils sont vingt-deux à avoir signé l’appel The Call for a Finance Watch. Tous députés européens, tous spécialistes des questions financières, mais pas tous du même bord politique. Parmi eux, cinq Français. Les Verts Pascal Canfin (l’initiateur du texte) et Eva Joly ; la socialiste Pervenche Bérès ; la Nouveau Centre Sophie Auconie, et l’UMP Jean-Paul Gauzès. Tous partagent le même constat : il n’existe à Bruxelles aucun contre-pouvoir au puissant lobbying exercé par les banques et les fonds spéculatifs sur les décideurs politiques, dans l’élaboration des règles européennes encadrant la finance. Personne pour défendre l’intérêt général de la société face aux intérêts privés.
« Quand j’étais rapporteur de la directive AIFM, visant à mieux réglementer les gestionnaires de fonds alternatifs en Europe, témoigne Jean-Paul Gauzès, j’ai reçu 198 interlocuteurs. Tous des acteurs de la finance tenant le même discours. » Cette asymétrie entre la puissance de l’industrie financière et l’absence de contre-pouvoir de la société civile a quelque chose de choquant, d’anti-démocratique même, dans un monde qui, depuis la crise des subprimes, a pris conscience des excès et dérives de la finance. Dans leur appel, les vingt-deux dénoncent ce monopole de fait et plaident en faveur de la création d’une ONG capable de faire entendre une autre musique que celle des lobbys financiers. Le ton est donné. Reste à inventer une organisation qui sera au secteur de la finance ce que Greenpeace ou le WWF sont à celui de l’environnement.
Automne 2010
L’appel de Finance Watch a fait des vagues. Quelques uns y voient un aveu d’échec du politique. « C’est au contraire le prix de sa liberté », affirme Jean-Paul Gauzès. Il n’est pas le seul à le penser, près de deux cents élus européens ont désormais signé l’appel. Joli succès d’estime, mais on ne bâtit pas une ONG avec des mots ; il faut maintenant un homme capable de jeter les bases de l’organisation. Des députés européens se chargent du recrutement et, comme on ne construit rien sans argent, onze d’entre eux mettent chacun 3 600 euros de leur poche pour financer les premiers pas de la nouvelle structure. Démarche inédite guidée par le seul sens de l’intérêt général, car, sitôt l’organisation créée, ces élus devront s’effacer. C’est la règle. Pas question que la future ONG ait un lien quelconque avec le pouvoir politique.
Il ne faut que quelques semaines aux députés pour mettre la main sur la perle rare : Thierry Philipponnat. Visage anguleux, lunettes fines, costume gris, chemise blanche, l’homme ressemble à s’y méprendre à un banquier. Rien d’étonnant : avant de pourfendre les dérives du monde de la finance, il en était un des soldats méritants, comme ceux que l’on croise dans Margin Call, le très réaliste film de l’Américain J.C.Chandor sur l’affairisme des traders de Wall Street. Il se souvient de débuts grisants. « Ça bougeait vite. » D’une ascension prometteuse de Londres à Paris : UBS, BNP Paribas, Euronext-Liffe. Au fil du temps, la magie finit pourtant par s’estomper. Question d’envie, de convictions personnelles aussi. « La finance devrait être au service de l’économie et de la société, elle l’est de moins en moins. Les marchés financiers sont devenus des “terminators” qui tirent sur tout ce qui bouge. »
Thierry Philipponnat plaque tout, rejoint Amnesty International et bascule. Il mène pour le compte de l’organisation une action de lobbying auprès de grandes banques françaises. Objectif : les contraindre à ne plus financer d’entreprises productrices de bombes à sous-munitions (1). L’hommepossède une grande force de conviction ; une à une, BNP Paribas, la Société générale, Natixis et le Crédit agricole se désengagent. Seule Axa fait de la résistance, plus pour longtemps. Amnesty International lance une campagne de « naming and shaming » (« nommer et faire honte ») contre la compagnie d’assurances. En quelques semaines, ses adhérents inondent le président d’Axa, Henri de Castries, de dizaines de milliers de cartes postales représentant un enfant amputé des jambes, sur lesquelles on peut lire : « Axa, assureur responsable, mais responsable de quoi ? » Effet garanti. Elle cède à son tour. Thierry Philipponnat n’en tire aucune gloire, mais fait observer dans un sourire que « les ONG peuvent combiner des moyens d’action variés et efficaces. » A bon entendeur…
30 juin 2011
Dans une des salles des Ateliers des Tanneurs, à Bruxelles, ils sont une centaine à assister à la création officielle de Finance Watch. En sept mois, Thierry Philipponnat s’est démultiplié. L’écho rencontré par l’appel des députés européens dans la société civile a été important. Nombre d’ONG, d’associations, de particuliers veulent être de cette histoire. Thierry Philipponnat sillonne l’Europe à leur rencontre, enchaîne les réunions dans les cafés, les gares, parfois même les quais de métro. La tâche est énorme, les discussions sans fin mais, le 30 juin, tout est prêt. Finance Watch n’est plus une idée de papier mais une réalité. Sur scène, ses promoteurs en posent les principes fondateurs : « L’objet de la finance est de servir l’économie réelle. La situation où l’économie devient subordonnée à la fonction financière doit être rejetée car destructrice des structures économiques et sociales. »
Une profession de foi résumée par un slogan : « Making finance serve society » (« Faire que la finance soit au service de la société ») et une conviction : Finance Watch n’est pas là pour combattre la finance, mais ses dérives. Dans ce combat, elle peut s’appuyer sur ses adhérents. Du lourd : cinquante-quatre membres de douze nationalités différentes (un an plus tard, ils sont soixante-dix), des ONG (Transparency International, le CCFD, le Secours catholique, Attac, Oxfam…), des syndicats, des associations, des personnalités spécialistes des questions financières, qui représentent ensemble près de cent millions d’Européens. Touche finale au tableau, elle s’est même offert un parrain prestigieux en la personne du philosophe et sociologue allemand, Jürgen Habermas.
Au soir du 30 juin, les sentiments de Thierry Philipponnat sont partagés. Si Finance Watch est passée d’une idée de papier à la réalité, les lendemains s’annoncent sportifs tant le rapport de force avec les lobbys paraît déséquilibré. Il est à ce jour l’unique salarié d’une organisation dotée d’un budget de 2 millions d’euros. Face à lui, l’industrie financière dépense chaque année, à Bruxelles, plus de 300 millions d’euros pour rémunérer quelque 700 lobbyistes…
11 juillet 2011
La note fait huit pages. Elle est précise, détaillée, argumentée et démonte un énorme bobard véhiculé par les banques et les fonds spéculatifs. Sous la menace d’une directive réglementant sévèrement les CDS (Credit défault swap) (3), l’industrie financière a mis tous ses lobbyistes dans la bataille pour montrer que ces produits financiers hautement spéculatifs améliorent la liquidité de la dette et permettent de réduire les taux d’emprunt auxquels les Etats lèvent leur argent. Une argumentation difficilement réfutable par des profanes. Pas par un bon connaisseur des marchés.
Dans sa note, Thierry Philipponnat démontre non seulement que les CDS ne contribuent en rien à alléger les taux d’intérêt auxquels les Etats empruntent mais qu’ils peuvent être un facteur d’amplification de la crise. Trois mois plus tard, l’Union européenne interdit une des catégories de CDS (les CDS à nu), et rend ainsi la spéculation sur la faillite d’un pays impossible par ce moyen. Trop tard pour les Grecs qui en ont fait les frais, pas pour les autres Etats de l’Union. « Le combat contre l’utilisation des CDS était déjà bien engagé par le Parlement européen, tempère Thierry Philipponnat, mais la note de Finance Watch a contribué à accélérer leur interdiction. » L’épisode est en tout cas révélateur. « Il montre que tout ne se résume pas à une question de moyens. Notre voix était attendue, cela lui confère une portée beaucoup plus grande. »
Novembre 2011
Finance Watch compte sept salariés. Les derniers arrivés – le Belge Benoît Lallemand et le Français Frédéric Hache – l’ont rejointe pour, disent-ils, « donner du sens » à leur métier. Une quête de sens qui a son prix : un salaire divisé par deux ou trois. Sitôt arrivés, les deux analystes financiers se sont vu confier la tâche de passer au crible deux des textes qui régulent la finance internationale : la réforme des marchés d’instruments financiers et les nouvelles règles prudentielles bancaires. Des monstres juridiques de plusieurs centaines de pages qui répondent aux acronymes typiquement bruxellois de MIF2 et CRD IV. Ils ont quelques semaines pour sortir un rapport d’analyse de ces réglementations, en démontrer les faiblesses, les impasses, les pistes d’amélioration. Une contre-expertise ultra professionnelle mise à disposition des politiques. Libres à eux ensuite de s’en servir. Ils ne s’en privent pas : plusieurs dizaines d’amendements déposés les mois suivants par des députés européens sur ces deux sujets portent la marque de fabrique de Finance Watch.
5 décembre 2011
Accompagné de sa garde rapprochée, Thierry Philipponnat s’engouffre dans l’enceinte du Parlement européen pour être auditionné par la commission des affaires économiques et monétaires (Econ). En mots choisis, il martèle son credo : l’objet de la finance est de servir l’économie réelle, pas de la détruire. Comme un écho lointain d’Occupy Wall Street au cœur de l’Union européenne. Dans l’hémicycle, seuls douze députés écoutent en silence. Le public est dix fois plus nombreux. « Tous des lobbyistes ! Si vous voulez décapiter les lobbys financiers à Bruxelles, vous n’avez qu’à balancer une bombe dans l’hémicycle », ironise Joost Mulder. Ce Néerlandais quadrilingue sait de quoi il parle. Avant d’être responsable des relations institutionnelles de Finance Watch, il a un temps fait partie de cette armada de lobbyistes. « Le jour où ils sont allés jusqu’à faire pression sur des gouvernements en menaçant de retirer des capitaux et de supprimer des emplois, j’en ai eu assez. » (2) Lui aussi a franchi le Rubicon sans pour autant changer de métier. « Je fais à Finance Watch le même travail qu’avant, sauf qu’aujourd’hui je dors mieux. »
Sept heures plus tard, changement de décor. Thierry Philipponnat attend patiemment d’entrer sur le plateau de Place publique, la nouvelle émission de débat de France 3. Thème de la soirée : les Français face à la crise. Dans les couloirs de France Télévisions, PPDA qui anime l’émission, l’informe qu’il a contacté depuis trois semaines les responsables des six plus grandes banques françaises pour qu’elles viennent s’expliquer en direct à la télévision sur leur comportement face à la crise. En vain. Quelques minutes plus tard, sur le plateau, une chaise vide symbolise cette absence. PPDA s’en explique avant d’évoquer la dernière publicité de BNP Paribas : « Vous avez de vraies questions aujourd’hui, une banque vous donne de vraies réponses. » A Bruxelles dans les coulisses, pas à Paris en pleine lumière.
1er avril 2012
Finance Watch a déjà publié de nombreux documents et notes, été auditionnée par le Parlement européen et la BCE (Banque centrale européenne), donné des dizaines d’interviews. Elle s’essaye aujourd’hui à un exercice au moins aussi nécessaire : rendre compréhensible l’incompréhensible. Faire du volumineux et indigeste document du G20 sur les banques, connu sous le nom de Bâle III, une bande dessinée au ton gentiment provocateur. Pari réussi. Les dessins purement illustratifs ne révolutionneront pas l’univers de la BD, mais ils mettent à portée de tous la compréhension de mécanismes financiers rébarbatifs et dévoilent les grosses ficelles des banquiers pour échapper à toute régulation un tant soit peu contraignante. Un travail de pédagogie indispensable.
La complexité du monde de la finance la met à distance des citoyens. Elle lui permet de dénier à quiconque ne fait pas partie de son sérail le droit de la juger et plus encore de la réguler. Cette arrogance a engendré depuis quelques années un violent sentiment anti-banque nourri par l’impression justifiée que la société paye au prix fort les dérives de la finance sans pour autant pouvoir exiger des comptes. Mais pour éviter que ce sentiment ne s’exprime politiquement que dans les extrêmes ou la violence, la société a un besoin impérieux de comprendre les vrais enjeux de la régulation financière pour peser dans le débat politique. Finance Watch l’a bien compris et n’entend pas s’arrêter à ce coup d’essai. Début juillet, elle sort un dessin animé pour tout comprendre des effets pervers de la spéculation sur le marché des produits agricoles.
Mai 2012
La banque américaine J.P. Morgan annonce une perte de trading de plus de deux milliards de dollars (1,5 milliards d’euros) suite à des paris risqués sur des CDS (3). Ces paris ont été pris par un trader français, Bruno Michel Iksil, surnommé « la baleine de Londres », au vu des positions élevées qu’il n’hésitait pas à prendre sur les marchés financiers. Après avoir nié tout en bloc, le patron de J.P. Morgan, Jamie Dimon, fait acte de contrition dans l’émission Meet the Press sur NBC, en admettant qu’il avait été « dead wrong » (il a eu tout faux) et que sa banque avait « commis des erreurs énormes de façon inexcusable ». C’est pourtant le même Jamie Dimon qui, depuis des mois, emploie une armada de lobbyistes pour contrer toute régulation contraignante sur les produits financiers à risque.
Cette perte colossale, réévaluée depuis à… 9 milliards de dollars, relance la question de l’attrait des banquiers d’affaire pour la prise de risque inconsidérée et intervient au cœur d’un débat chaud bouillant aux Etats-Unis : celui de l’application de la règle Volcker. Cette règle, qui porte le nom de l’ancien président de la Réserve fédérale Paul Volcker, vise à interdire aux banques qui collectent les dépôts des ménages de réaliser des opérations spéculatives. Question : si elle était entrée en vigueur, le dévissage financier de J.P. Morgan aurait-il été possible ? « J’ai demandé à Paul Volcker, raconte Thierry Philipponnat, il m’a répondu avec beaucoup d’humour : “With a lawyer, everything is possible.” Autrement dit, il ne se fait aucune illusion sur la capacité des juristes à trouver des failles dans le système. C’est pourquoi, je pense que la règle Volcker est insuffisante. Si on veut définitivement résoudre cette question des banques commerciales qui spéculent avec les dépôts de leurs clients, il faut aller plus loin et imposer une stricte séparation entre les banques de dépôts et les banques d’affaire. »
Jeudi 14 juin 2012
A une semaine de la date limite de déclaration de l’impôt sur le revenu en France, les collectifs Sauvons les Riches et Roosevelt 2012 organisent un flashmob de bon matin devant le siège de BNP Paribas à Paris. Sensibles à la cause des fortunés, ils proposent une séance gratuite d’optimisation fiscale sous une banderole hâtivement déployée devant la porte d’entrée sur laquelle on peut lire : « BNP Paribas vous offre l’évasion (fiscale) ». Les organisateurs rappellent que BNP Paribas est particulièrement bien placée en la matière puisque « de toutes les entreprises françaises, c’est celle qui a le plus de filiales dans les paradis fiscaux : 347 au total. »
Quelques grincheux, comme Jean Merckaert, rédacteur en chef de l’excellente revue Projet, animée par les laïcs et les jésuites du Centre de recherche et d’action sociales font valoir que « la fraude fiscale coûte chaque année 40 à 50 milliards d’euros à la France, dont la moitié est imputable aux transferts d’argent vers les paradis fiscaux ». Rien ne vient briser la bonne humeur des participants à cette sympathique manifestation.
Et maintenant, une page de publicité, pour ceux que l’évasion fiscale intéresse. Un très bon livre sur le sujet vient de paraître. Il est signé Antoine Peillon et s’intitule : Ces 600 milliards qui manquent à la France, enquête au cœur de l’évasion fiscale. (Seuil). A signaler aussi, la toute récente sortie en poche de La Grande Evasion, le vrai scandale des paradis fiscaux, de Xavier Harel (Babel), enquête accablante et décapante sur les paradis fiscaux.
18 juin 2012
L’Econ adopte à une très large majorité un texte sur les agences de notation (Moody’s, Standard & Poor’s…), sur les marchés financiers. Un des amendements proposés par Finance Watch et porté politiquement par Les Verts propose de supprimer le système de notation (AAA, AA+, BBB…) pour le remplacer par un chiffre de probabilité de défaut de paiement des emprunteurs. Autrement dit, au lieu d’être dans une logique de dégradation de notation, on serait dans une logique objective de passage d’un risque à un autre pour l’emprunteur, qui aurait l’avantage de mettre en évidence le très faible degré de différence entre deux notations. Le texte finalement adopté conserve la notation mais oblige aussi à donner le chiffre de probabilité de défaut.
Thierry Philipponnat ne boude pas son plaisir : « On va enfin comprendre que le passage de AAA à AA+ n’a guère de signification et s’éviter bien des tempêtes dans un verre d’eau. » Le combat de Finance Watch est parfois plus incertain. L’ONG se bat depuis des mois contre le trading haute fréquence (HTF, « High frequency trading »), dont elle conteste l’utilité sociale. En mars, un rapport du Parlement européen semblait lui donner raison en souhaitant encadrer strictement ces transactions financières à grande vitesse réalisées grâce à des algorithmes informatiques. Depuis, raconte Thierry Philipponnat, « le lobbying s’est déchaîné et le Parlement paraît vouloir reculer ». Pas abattu pour autant, il est remonté au front avec de nouveaux arguments. « Nous avons jusqu’à l’automne pour convaincre. » Le contre-lobbying est une course de fond.
Lundi 25 juin 2012
Le bureau du nouveau ministre délégué au Développement, Pascal Canfin, doit être trois fois plus grand que celui qu’il occupait au Parlement européen, mais il en goûte peu la décoration. Si les grands méchants loups de la Françafrique ne le mangent pas trop rapidement comme son lointain prédécesseur, Jean-Pierre Cot, il aura le loisir d’en changer. Dans l’immédiat, Pascal Canfin s’empare des dossiers qu’il maîtrise : l’environnement et la régulation financière, et compte, pour les faire avancer, s’appuyer sur les travaux des ONG spécialisées dans ces secteurs. Juste retournement de l’histoire, Finance Watch, qu’il a contribué à lancer, fera partie du lot.
« Ses premiers pas sont un vrai succès », juge le ministre. « Finance Watch fournit une contre-expertise indépendante de qualité. Elle est de plus en plus écoutée au Parlement européen et à la Commission, où elle est en train de s’imposer grâce à la crédibilité de ses argumentaires. C’était important, car, face à l’industrie financière, il faut être dans l’expertise technique, pas dans la morale ou les bons sentiments, ou alors on est sûr de perdre. » Et demain ? « Ce n’est pas à moi d’en décider, explique le ministre, mais s’il est essentiel de gagner des batailles au Parlement européen, il serait logique de vouloir les gagner aussi au Conseil européen, puisque sur ces sujets la codécision est obligatoire. Finance Watch devra donc aller dans les capitales, à Paris, Londres ou Berlin, pour peser sur les décisions du Conseil. » Ambitieuse perspective pour une ONG vieille d’à peine un an.
Notes :
(1) Selon un rapport de Handicap International, ces bombes tuent à 98 % des civils.
(2) Der Tagesspiegel du 23 février 2012.
(3) Les CDS sont des contrats de couverture contre le risque de défaut de paiement d’une entreprise ou d’un pays.
Source :
Publié dans Télérama n° 3260 du 04/07/2012 actuellement en kiosque.
En savoir plus : http://www.finance-watch.org/?lang=fr