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La reprise des combats dans l’est du Congo met en lumière le besoin urgent de mettre fin au commerce des minerais de conflit
La reprise des violences dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) montre que les entreprises et les gouvernements doivent de toute urgence remettre de l’ordre dans le commerce des minerais provenant du Congo, a déclaré Global Witness dans un nouveau rapport publié aujourd’hui.*
Le rapport, intitulé Pour un commerce plus propre – Comment le contrôle des chaînes d’approvisionnement peut empêcher le commerce des minerais du Congo d’alimenter les conflits, est basé sur des recherches menées sur le terrain dans les provinces congolaises des Kivus, en proie depuis plus de dix ans à un conflit alimenté par les minerais.
Les recherches révèlent que certaines entreprises ont commencé à mettre en place des contrôles de leurs chaînes d’approvisionnement – c’est-à-dire à exercer un devoir de diligence – tandis que d’autres refusent de le faire. Au début de ce mois, le gouvernement congolais a suspendu deux comptoirs d’exportation de minerais soupçonnés de ne pas appliquer comme il convient le principe de diligence raisonnable.
« Le Conseil de sécurité de l’ONU et l’OCDE ont établi des normes claires relatives au devoir de diligence appliqué aux chaînes d’approvisionnement à l’intention des firmes qui utilisent des minerais provenant du Congo. Il incombe maintenant aux entreprises de s’y conformer », a expliqué Sophia Pickles, chargée de campagne à Global Witness. « En procédant à des contrôles approfondis de leurs chaînes d’approvisionnement, les firmes ont la possibilité de priver de fonds les groupes armés qui commettent des exactions et de contribuer à instaurer la stabilité dans l’une des régions les plus pauvres et les plus incertaines du monde. »
Les progrès amorcés dans les Kivus risquent toutefois d’être mis en péril par une nouvelle rébellion menée à l’instigation du général de l’armée congolaise Bosco Ntaganda. Le rapport explique comment Ntaganda, un seigneur de guerre professionnel recherché par la Cour pénale internationale, s’est emparé du contrôle de quelques-unes des zones minières les plus riches de la région, mettant sur pied un trafic extrêmement lucratif de minerais du conflit avant de se mutiner en avril dernier. Global Witness estime qu’il est fort probable que les revenus du trafic auquel s’est livré le général sont utilisés pour financer les combats actuels.
« Depuis longtemps, Global Witness, le Groupe d’experts de l’ONU et d’autres attirent l’attention sur les risques encourus lorsque les réseaux mafieux existant au sein de l’armée congolaise sont autorisés à détourner à leur profit le commerce des minerais. Il est crucial que le gouvernement congolais mette un terme à l’impunité qui prévaut en engageant des poursuites à l’encontre des officiers supérieurs responsables », a fait remarquer Sophia Pickles.
Les gouvernements de la région et d’ailleurs doivent rendre obligatoire le respect des normes internationales conçues pour rendre plus propre le commerce des minerais provenant du Congo. Ce besoin est particulièrement urgent aux États-Unis. En juillet 2010, le Congrès a voté une disposition – la section 1502 de la loi Dodd Frank – qui exige que les entreprises utilisant de l’étain, du tantale, du tungstène et de l’or provenant du Congo et des pays voisins exercent un devoir de diligence et rendent compte publiquement de leurs conclusions. Néanmoins, l’organisme fédéral américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers, la SEC (Securities and Exchange Commission), n’a pas émis la réglementation nécessaire pour compléter la loi, avec pour effet que les entreprises ne la mettent pas en œuvre.
« La crise dans l’est du Congo requiert une réaction de la part de la SEC et de l’administration Obama », a souligné Sophia Pickles. « La SEC a plus de 18 mois de retard pour la publication de sa réglementation relative aux minerais des conflits. Cela entrave les efforts visant à mettre fin au commerce des minerais des conflits. L’est du Congo a besoin que des mesures soient prises et il est grand temps que la Maison-Blanche intervienne et oblige le régulateur à faire son travail. »
Global Witness – 31 mai 2012
Source :
* Lire le rapport (40 pages) téléchargeable (en pdf) ci-après :
POUR EN SAVOIR PLUS ET AGIR :
# Voir les témoignages et reportages VIDEOS ci-après : « Quand on compte un enfant toutes les six minutes assassiné par notre système économique on dénonce généralement la “volatilité” des prix agricoles (bien joli substantif pour camoufler les spéculateurs!). Il y a aussi ceux du coltan…Nous ne pourrons pas dire nous ne savions pas »
• DIAPORAMA réalisé par le Comité de la Fédération de Solidarité avec l’Afrique Noire, cliquer ci-après : Coltan : le minerai qui tue
• VIDEO « Du sang dans nos portables » en quatre parties réalisées par Jeudi Investigation (Canal+), disponibles en cliquant ci-après :
Du sang dans nos portables – Partie 1
Du sang dans nos portables – Partie 2
Du sang dans nos portables – Partie 3
Du sang dans nos portables – Partie 4
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Ce réseau compte douze organisations françaises de solidarité internationale ayant des activités en Afrique Centrale sur des domaines divers : développement, action humanitaire, droits de l’homme, plaidoyer. En 2012, le RéFAC est composé de : Amnesty International / Section France, CCFD, Cosi, Comité d’Echanges Isère-Kivu, Comité de jumelage de Villefontaine, Consultants du Monde, CRID, Frère des Hommes / France, Karibu, Médecins du Monde, Secours Catholique / Caritas France et WIMA/Isère soit cinq structures rhônalpines.