Accord sur la réforme du marché du travail
Au terme de 3 mois de négociations, 3 organisations syndicales (CFDT,CFTC et CGC) et le patronat ont abouti à un accord national interprofessionnel (ANI) intitulé « Pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels de salariés », que François Hollande et le gouvernement ont dit vouloir transcrire “fidèlement” dans la loi. Qu’en est-il réellement ?
Le communiqué ci-après de l’association Attac replace cet accord dans le contexte de régression sociale généralisée au niveau de l’Union européenne :
Accord sur la réforme du marché du travail : en attendant la Troïka
En signant avec le Medef un accord « au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi », trois syndicats minoritaires ont donné en France un aval anticipé aux réformes structurelles du marché du travail imposées par la Banque centrale européenne, la Commission européenne et le FMI dans le Sud de l’Europe. Tout y est : baisse des salaires en cas de menace sur l’emploi, prédominance de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche et sur la loi, facilitation des mobilités forcées et des licenciements. Le Wall Street Journal félicite les patrons français d’avoir « gagné une nouvelle flexibilité ».
L’accord signé le 11 janvier par le Medef, la CFDT, la CFTC et la CFE-CGC confirme la possibilité, déjà adoptée par la majorité précédente, d’accords d’entreprise dits de « maintien dans l’emploi », avec une baisse des salaires, en cas de « graves difficultés conjoncturelles ». Les salariés qui refuseraient la baisse de salaire seraient licenciés pour « motif personnel », exonérant l’entreprise de toute obligation de reclassement. De même, tout salarié qui refuserait un changement de poste ou une mutation géographique pourra être licencié pour « motif personnel », dès lors que l’entreprise a signé un accord sur la mobilité.
La « sécurisation des licenciements » tant souhaitée par le Medef se traduit aussi dans l’accord du 11 janvier par une réduction des délais de contestation des plans sociaux et des licenciements, ainsi que par une priorité donnée à la conciliation prudhommale, avec des indemnités minimes dont l’acceptation par le salarié interdit ensuite toute poursuite judiciaire.
Plus profondément encore, l’accord du 11 janvier dynamite toute la législation sur les plans sociaux : un accord d’entreprise peut prévoir une procédure totalement différente de celle prévue par la loi ; et s’il ne parvient pas à obtenir la signature des syndicats, l’employeur peut déposer son plan social à l’Inspection du travail, qui doit motiver un éventuel refus dans un délai de 2 à 4 mois.
En guise de contreparties, l’accord prévoit essentiellement un renchérissement limité des CDD de très courte durée (moins d’un mois), la généralisation de la complémentaire santé pour les salariés des PME et une majoration de 10% pour les heures complémentaires des salariés à temps partiel. Des avancées qui seraient appréciables si elles n’étaient pas payées aussi cher.
Car la France et l’Europe s’enfoncent dans une grave récession, provoquée par les politiques d’austérité et par la frilosité des banques qui réduisent leurs crédits pour préserver leur bilan. Les brèches ouvertes par l’accord du 11 janvier ne vont certainement pas « accélérer la création d’emploi » comme l’annonce le gouvernement ; elles vont plutôt faciliter le passage du tsunami de licenciements qui s’annonce et accélérer la montée du chômage.
Attac appelle les parlementaires français à corriger les graves dangers que présente ce texte et invite tous les acteurs sociaux à organiser ensemble la résistance et la construction d’alternatives à ces politiques suicidaires pour les salariés et pour les peuples européens. Dans cette perspective, les nombreuses forces syndicales et associatives européennes engagées dans le processus d’Altersommet se réuniront début juin à Athènes en vue d’affirmer haut et fort qu’une autre Europe est possible.
Attac France – Le 14 janvier 2013
Source :
POUR EN SAVOIR PLUS lire :
• l’analyse – détaillée en 13 points – du contenu réel de ce document, publiée par Gérard Filoche à : http://www.filoche.net/2013/01/12/rien-contre-le-chomage-le-medef-a-bloque-tout-avancee-pour-les-salaries-dans-cet-accord-axa-signe-par-une-minorite-syndicale/
Texte téléchargeable (en pdf) en cliquant ci-après : AnalyseANI-Filoch14.01.13
• le communiqué du Syndicat de la Magistrature « L’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 : un nouveau modèle au service de la sécurisation du licenciement. » à :