QUITTE LA CURIE, PIERRE
POUR PRIER
Par PEDRO CASALDALIGA
Quitte la curie, Pierre
démantèle le Sanhédrin et la muraille,
ordonne que soient changés tous les phylactères impeccables
par de tremblantes paroles de vie.
Allons au jardin des bananiers,
revêtus de nuit, à nos risques et périls,
car là-bas le Maître sue le sang des pauvres.
La tunique sans couture est cette humble chair disloquée
le sanglot des enfants sans réponse,
la mémoire brodée de morts anonymes.
Des légions de mercenaires font le siège à la frontière de l’aurore naissante
et le César les bénit du haut de son omnipotence.
Dans la vasque pure Pilate s’ablutionne, légaliste et lâche.
Le peuple est seulement un « reste »,
un reste d’Espérance.
Ne le laissons pas seul parmi les gardes et les princes.
C’est l’heure de transpirer avec Son agonie,
c’est l’heure de boire le calice des Pauvres
et de dresser la Croix, dénuée de certitudes,
et de briser la pierre – loi et sceau – du sépulcre romain,
et de se lever au matin de Pâques.
Dis leur, dis-nous à tous,
Qu’ils suivent dans la stricte observance
La grotte de Bethléem,
Les Béatitudes
et le jugement de l’amour donné en nourriture.
Ne nous trouble plus !
Comme tu L’aimes
aime-nous,
simplement,
d’égal à égal, frère.
Donne-nous, avec ton sourire, avec tes larmes nouvelles,
le poisson de la joie,
le pain de la Parole,
les roses de la braise sous la cendre…
les clartés de l’horizon libre,
la Mer de Galilée oecuméniquement ouverte au Monde.
Pedro Casaldáliga
Traduction en français par Rose-Marie Barandiaran
Source : origine en espagnol (Blog de José Arregi) à :
http://blogs.periodistadigital.com/jose-arregi.php/2013/02/20/p329762 – more329762
Source photo : http://www.revistapueblos.org/old/spip.php?article1735
En savoir plus :
• Pedro Casaldáliga est d’origine catalane (Espagne) de la Congrégation des « Fils du Cœur Immaculé de Marie ». Installé depuis 1968 en Amazonie brésilienne où il a été évêque de Sao Felix de 1971 à sa retraite en 2005, naturalisé brésilien, il a fondé la Commission pastorale de la terre (CTP) et le Conseil indigéniste missionnaire (CIMI). Il est l’un des principaux représentants de la théologie de la libération latino-américaine. Prenant la défense des paysans sans terre et des Amérindiens, il a affronté les grands propriétaires terriens, le gouvernement militaire brésilien et même le Saint-Siège (ainsi en 2000, il fut « convoqué » à Rome par les cardinaux B. Gantin et J. Ratzinger…). Il a été menacé de mort à plusieurs reprises ; en décembre 2012, suite à l’intensification de ces menaces venant des colons occupant illégalement les terres des indiens Xavantes – liée à un arrêt de la justice brésilienne statuant que les terres devaient être rendues aux Xavantes – pour sa sécurité, il a dû quitter son domicile et partir à plus de 1000 km de chez lui, à la demande de la police fédérale. LB
• Lire l’article Soutien à Mgr Pedro Casaldáliga, publié le 16 décembre 2012 sur ce site) à :
http://www.nsae.fr/2012/12/16/soutien-a-mgr-pedro-casaldaliga/
• Lire l’entretien (publié en sept.2009 dans Pueblos n° 39) publié en français sur ce site (le 17 janvier 2013) à :
http://www.nsae.fr/2013/01/17/pedro-casaldaliga-eveque-de-la-theologie-de-la-liberation/