Quatre évènements qui bouleversent l’Europe
Par Jean-Jacques Chavigné
Quatre évènements qui se sont déroulés du 20 février au 2 mars mettent en évidence la crise que traversent l’euro et plus largement l’Union européenne. Ils viennent chambouler la façade aseptisée que cherche à nous en présenter la Commission européenne et manifestent l’accélération de mouvements de fond de plus en plus ouvertement opposés à l’Europe de Merkel et de la Finance.
Tous ces évènements ne sont pas positifs. Le score obtenu par l’UKIP au Royaume-Uni est au contraire, très inquiétant. Il fait malheureusement partie des mouvements de fond qui bouleversent l’Union européenne. Les 29 % de voix obtenus par Silvio Berlusconi lors des dernières élections italiennes sont, eux aussi, des plus préoccupants.
En Bulgarie : la rue chasse le Premier ministre
Le 20 février dernier, le Premier ministre Bulgare, Boïko Borissov était obligé d’annoncer sa démission après une semaine de manifestations, de plus en plus violentes, qui avaient fait descendre dans la rue des centaines de milliers de Bulgares. C’étaient les manifestations les plus importantes depuis la chute du stalinisme au début des années 1990.
Les Bulgares se sont soulevés contre la mainmise des multinationales européennes sur le secteur de l’énergie de leur pays. Cette mainmise avait permis à trois multinationales européennes de réaliser des profits mirifiques sur le dos des salariés bulgares, avec la complicité de la droite au Pouvoir. Les manifestations n’ont cessé de dénoncer cette « alliance mafieuse ».
Alors que le salaire moyen s’élève à moins de 400 euros par mois, les prix de l’énergie venait de doubler pour atteindre, en moyenne, 100 euros par ménage et par mois.
En Italie : la raclée électorale de Mario Monti
Le deuxième évènement est la raclée infligée, le 24 février, par les électeurs italiens à Mario Monti, le « sauveur de l’Italie » selon la Finance. Il a conduit, entre fin 2011 et fin 2012, une politique d’austérité particulièrement brutale qui a plongé l’Italie dans la récession et le chômage, tout en augmentant le poids de sa dette publique.
La coalition qu’il dirige obtient tout juste 10 % des voix, soit trois fois moins de voix que la coalition de centre-gauche de Pier Luigi Bersani, arrivée en tête ; trois fois moins de voix, également, que celle de la coalition menée par Berlusconi ; deux fois et demi moins de voix, enfin, que le Mouvement cinq étoiles de Beppe Grillo.
Ce n’est pas seulement Mario Monti qui se prend une claque aussi magistrale mais Angela Merkel et la Commission européenne qui l’ont toujours assuré de leur soutien sans faille et qui ont porté sa politique au pinacle.
Au Royaume-Uni : les 28 % de l’UKIP
Le troisième évènement est le score obtenu par l’UKIP (United Kingdom Independence Party) lors de l’élection législative partielle d’Eastleigh, au nord de Southampton, au Royaume-Uni, le 1er mars.
Certes, les Libéraux démocrates qui gouvernent aujourd’hui le Royaume-Uni avec les Conservateurs de David Cameron gardent leur siège mais l’UKIP arrive en 2e position avec 28 % des suffrages, bien avant le candidat conservateur et celui du Labour. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne charpente le programme de ce parti de la droite de la droite. Son candidat n’avait recueilli que 3,6 % des voix aux législatives de 2010.
Alors que David Cameron vient d’annoncer qu’il organiserait, s’il était réélu en 2015, un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne et que les Conservateurs sont partagés sur ce maintien, le risque de sortie du Royaume-Uni de l’Union se précise. L’Union n’en sortirait pas renforcée. Cette sortie risquerait fort, au contraire, de n’être que la première étape de son éclatement.
Au Portugal : 1,5 millions de manifestants contre la Troïka
Le quatrième évènement est la gigantesque mobilisation des Portugais lors de la venue des émissaires de la Troïka (Commission européenne, BCE et FMI) à Lisbonne le 2 mars 2013. Un million et demi de personnes se sont mobilisées dans la capitale et dans 40 villes du Pays, à l’appel du mouvement « Que la Troïka dégage ! » et des syndicats portugais.
« Grândola vila morena », le chant qui avait donné le signal de la révolution des œillets, le 25 avril 1974, contre la dictature de l’ « Estado novo » et de Caetano, était massivement repris contre la dictature de la Finance et de son bras armé, la Troïka.
Un million et demi de Portugais dans la rue, il n’est sans doute pas inutile de le rappeler, c’est l’équivalent de 9 millions de manifestants en France.
Jean-Jacques Chavigné
13 mars 2013
Source : http://www.democratie-socialisme.org/spip.php?article2806