Par Hervé Kempf
Il fait chaud, une agréable torpeur gagne les neurones, les plaçant l’un après l’autre en position allongée, tendance chaise longue. Le chroniqueur devient indifférent aux gesticulations de Pierre Gattaz, patron du Medef, qui veut se montrer encore plus anti-écologiste que Laurence Parisot. Le plumitif ne parvient même plus à déplorer l’abdication continue de François Hollande devant la banque, que décrit un vigoureux communiqué d’Attac : toutes les promesses du candidat pour réguler la finance sont trahies par le président *. Et sous le soleil qui darde, on peine à s’indigner encore des dégâts sur l’environnement qui continuent au rythme précipité d’une toupie désarticulée.
Mais relatons de bonnes nouvelles plutôt que les expectorations poussives de ce vieux monde cacochyme.
Sur le Larzac, les agriculteurs réunis en coopérative – ils avaient ainsi empêché l’extension du camp militaire – voient leur bail prolongé jusqu’en 2083 : ils pourront préparer l’installation de jeunes paysans. En Guadeloupe, les épandages aériens de pesticides viennent d’être suspendus par le tribunal : une réussite due à la ténacité de trois associations d’environnement (EnVie-Santé, ASFA, Amazona) et de quelques élus.
En Chine, huit des plus grandes villes devraient annoncer des mesures restreignant l’achat d’automobiles, afin de limiter la pollution atmosphérique.
Au Japon, la plus grande centrale solaire flottante du monde entre en service – elle a été conçue par une PME française, Ciel et Terre.
Au Bangladesh, l’ONG Grameen Shakti installe 500 toits solaires par jour dans les villages du pays.
En France, on recense 70 ateliers coopératifs de réparation de vélo.
Dans les Deux-Sèvres, la coopérative La Frênaie fabrique 40 yourtes par an.
A Wattwiller (Haut-Rhin), la commune coupe l’éclairage nocturne : elle fait des économies, réduit la consommation d’énergie et les habitants n’ont pas peur la nuit.
Dans le Pays basque nord (Pyrénées-Atlantiques), on se réjouit : le rapport Mobilité 21 a renvoyé la LGV Bordeaux-Bayonne aux calendes grecques.
De ce bouquet de nouvelles que l’on n’a pas fini de voir grandir, trois idées émergent.
• D’abord, partout dans le monde, des actions font bouger les choses dans le bon sens. La société oligarchique rechigne à les montrer, parce qu’elles s’appuient sur la coopération et le souci du bien commun, qui menacent les valeurs d’individualisme et de recherche du profit fondant le dogme dominant. Elles n’en fleurissent pas moins.
• Ensuite, ces victoires et réussites bien réelles ne tombent pas du ciel, mais résultent de luttes tenaces, réfléchies et solidaires.
• Trois : plus l’on pourra montrer de réussites, plus la crédibilité d’une autre politique grandira et plus de gens se laisseront gagner par l’optimisme, qui seul fait agir.
Ah, Jean-Marc Ayrault me téléphone : « Hervé, j’ai réfléchi, j’abandonne le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, j’ai été stupide sur ce coup-là. »Waoooo !
Eh non, c’est une blague. Allez, bon été.
Hervé Kempf
Source : chronique hebdomadaire Ecologie, publiée dans Le Monde daté du 21-22 juillet 2013
* en savoir plus à :
http://nsae.fr/2013/07/12/la-france-et-le-projet-europeen-de-taxe-sur-les-transactions-financieres/
http://www.france.attac.org/articles/banques-lelysee-avec-francois-hollande-regalons-la-finance