Sur la double canonisation du dimanche 27 avril 2014
Nos amis de Noi siamo Chiesa (Nous sommes Eglise, Italie) expriment leur position critique sur la canonisation de Jean-Paul II et sur la « sanctification » de la papauté du dimanche 27 avril 2014. Vous trouverez ci-après la traduction de leur communiqué de presse.
Communiqué de presse – 25 avril 2014
« Noi Siamo Chiesa » n’est pas en accord avec la canonisation de Jean-Paul II et le genre de sanctification de la papauté à quoi contribuera la cérémonie de dimanche.
Face au déferlement médiatique et aux émotions de masse de ces jours-ci il n’est pas facile de communiquer sur l’opinion discordante qui s’est manifestée dans l’Eglise dès le premier jour où les mouvements fondamentalistes ont exigé le « subito Santo » pour le pape Wojtyla . Mais pour nous, c’est un devoir de conscience de parler encore une fois d’une voix forte, c’est un devoir avant tout envers notre Eglise, dans laquelle nous voulons être mieux entendus.
Avec plus de conviction nous réitérons notre désapprobation, nous ressentant encore plus qu’avant partie prenante d’une opinion répandue partout dans le Peuple de Dieu, depuis que nous avons appris (le « Corriere della Sera » du 9 Avril, article de Luigi Accattoli) que le cardinal Martini dans son témoignage dans le processus canonique, jusqu’à présent secret, avait exprimé une position critique sur la canonisation du pape Wojtyla avec diverses argumentations, dont la dernière était relative au fait qu’il n’avait pas démissionné pour cause de maladie. Nous avons rassemblé, dans un épais dossier (actuellement sur la page d’accueil du site de NSC [1]) huit documents, avec des signatures italiennes et internationales, qui, de 2005 à aujourd’hui, expriment une position critique motivée dont les principaux points sont les suivants :
1- Jean-Paul II a eu des mérites évidents évangéliques et historiques (la rencontre d’Assise en 1986 avec les religions du monde entier, la repentance en mars 2000 pour les péchés de l’Église dans l’histoire, l’hostilité à la guerre). Mais, en général nous avons constaté de grandes limites et des erreurs. A titre d’exemple : la répression des théologiens non alignés, les prises de position dans le domaine de la morale sexuelle, le rejet d’un véritable débat sur le statut des femmes dans l’Église et sur le célibat ecclésiastique, la conspiration du silence au sujet des abus sexuels du clergé sur des mineurs, l’acceptation de fait des structures financières (IOR) souvent complices de pouvoirs obscurs et criminels, l’abandon de toute mesure allant dans le sens de la collégialité épiscopale, la nomination d’évêques en quasi-totalité d’orientation conservatrice, la condamnation de la théologie de la libération, la défiance vis-à-vis de Mgr Romero et des mouvements populaires en Amérique latine.
2- Le système de canonisation de tous, ou presque tous, les papes du dernier siècle et demi, en cherchant à équilibrer personnalités et lignes pastorales très différentes et même opposées les unes aux autres, favorise fortement une véritable « papolatrie » contraire à l’Évangile (et au Concile). Lorsqu’un chrétien devient pape la sainteté deviendrait-elle un corollaire de son rôle ? Ou peut-être seuls les Saints sont-ils élus à la papauté ? Ce sont les questions que nous nous posons.
Dans ce contexte, parmi les réformes urgentes de l’Église que nous proposons au pape François il y a aussi celle qui concerne le système par lequel se « font » les saints. Peut-être que faire une pause pendant 50 ans pour une sérieuse réflexion théologique et pastorale sur ce problème conduirait à une foi plus adulte. Quoi qu’il en soit, nous croyons que la contradiction entre les dévotions de la piété populaire, tout d’abord celles envers les saints, et le message radical de l’Evangile qui combat toute forme d’idolâtrie ou de superstition, doit être examinée avec une nouvelle détermination.
Mais dimanche, on célébre aussi notre bien-aimé Pape Jean, le grand pontife qui a contribué à changer le cours de l’histoire de l’Eglise et à proposer l’Évangile au monde d’aujourd’hui de façon plus crédible. Le jumelage avec Jean-Paul II ne nous plait pas, non seulement à cause de la sanctification de la papauté comme institution qu‘il implique, mais aussi parce que Jean XXIII était trop différent, évangéliquement différent, du pape Jean-Paul II. Il faut reconnaître cependant, que le pape François a décidé, avec ses pouvoirs sans appel, de passer outre à l’absence d’un deuxième miracle (qui « promeut » le Bienheureux en Saint) requis par la procédure pro-gratia pour le canoniser. Il a décidé de manière positive dans le cadre d’une décision qui avait déjà été prise par le pape Benoît XVI . Maintenant, nous espérons que François pensera à Romero.
Rome 25 Avril 2014, Noi siamo Chiesa
Traduction française de Lucette Bottinelli
[1] http://www.noisiamochiesa.org/?p=3257Source : publié (en italien) le 25 avril 2014 à : http://www.noisiamochiesa.org/?p=3259
En savoir plus :
• Communiqué du 23 avril 2014 du Mouvement international Nous Sommes Eglise : « The International Movement We Are Church (IMWAC) critically reflects on the canonization of John Paul II » à
http://www.imwac.net/413/index.php/news/we-are-church-news-and-comment/287-the-
• Communiqué du 30 sept. 2013 à :
• Texte de J. Haab (25 janvier 2011 à :
http://nsae.fr/2011/01/25/a-propos-de-la-beatification-de-jean-paul-ii/
• Communiqué du 16 janvier 2011 d’IMWAC :
http://www.imwac.net/int/pdfs/11BeatifJPII/PR_20110116_Beatification_JP2_en.pdf