« Punition collective » en Palestine : lettre ouverte à l’UE
Suite à l’opération israélienne « Gardiens de nos Frères » déclenchée depuis le 12 juin dans les territoires palestiniens occupés, le Conseil des Organisations Palestiniennes pour les Droits Humains (PHROC), a adressé à la Baronne Catherine Ashton, Haut Représentant de l’Union Européenne, une lettre ouverte recensant précisément toutes les atteintes aux droits humains opérées par Israël en tant que puissance occupante, en déni de la législation internationale et appelle l’Union européenne à réagir vigoureusement. Ci-après l’essentiel de cette lettre (traduite de l’anglais).
Cher Haut Représentant de l’UE aux Affaires Etrangères et à la Politique de Sécurité,
Le 12 juin 2014, trois colons israéliens ont disparu des Territoires Palestiniens Occupés (PTO). Depuis leur disparition, Israël s’est lancé dans des recherches de grande envergure, des bouclages et des incursions dans tous les PTO, ayant pour conséquence le meurtre de deux Palestiniens, Ahmad Sama’da, âgé de 20 ans, et Mahmoud Dudeen, âgé de 15 ans. De plus, un Palestinien a reçu une balle dans la tête et se trouve, dit-on, dans un état de mort clinique.
Le 21 juin, Al-Haq a consigné la détention de 454 Palestiniens à travers la Cisjordanie. En outre, 51 des Palestiniens arrêtés avaient été libérés en 2011 dans l’accord d’échange de prisonniers avec Shalit. Au total, 12 membres du Conseil Législatif Palestinien (CLP) ont été arrêtés depuis le 12 juin, y compris le président du CLP. L’immense vague d’arrestations se passerait avec la permission donnée aux interrogateurs d’avoir recours à des « pressions physiques modérées » contre les détenus palestiniens. Pendant les rafles dans les maisons tard dans la nuit, Israël saccage aussi ces maisons et détruit les biens privés, tout en intimidant et en harcelant les Palestiniens, en représailles à la disparition des colons.
Le bouclage des postes de contrôle, en particulier le poste de contrôle « Container » à l’est de la ville de Bethléem, a pour conséquence des restrictions supplémentaires sur la liberté de circulation d’environ 100.000 Palestiniens de Cisjordanie, dont beaucoup sont étudiants universitaires. De plus, beaucoup de Cisjordaniens sont obligés de limiter leurs mouvements à la suite de l’escalade dramatique de la violence des colons.
[…]
La réaction de l’UE aux mesures israéliennes entreprises dans le contexte de la disparition des colons, n’a tenu aucun compte des violations israéliennes et n’a pas distingué entre les mesures légales utilisées par Israël pour localiser les colons et celles qui lèsent les droits des Palestiniens. C’est grave. Les recherches pour retrouver les colons ne peuvent pas être un prétexte pour tuer, arrêter, torturer et porter atteinte à la vie privée des Palestiniens. La déclaration de l’UE du 17 juin 2014, et la déclaration qui a suivi, au point 4, au cours de la 26ème session du Conseil des Droit de l’Homme, illustrent une indifférence complète et inquiétante aux actions illégales d’Israël, qui ont suivi la disparition des trois colons. Une étude précise de la réaction d’Israël, exige que l’UE, incluant des décisions d’ordre international, tel le point 7 de la 26ème session du Conseil des Droits de l’Homme :
• condamne fortement les actions d’Israël – qui équivalent aux violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire – perpétrées pendant la soi-disant Opération Gardiens de nos Frères ;
• exige qu’Israël s’acquitte rigoureusement de ses responsabilités en tant que Puissance Occupante et cesse l’investigation sous sa forme actuelle ;
• exige qu’Israël libère les Palestiniens détenus de façon arbitraire, y compris les détenus administratifs ;
• exige qu’Israël enquête rapidement, selon les normes du droit international, et demande des comptes aux criminels qui sont impliqués dans le meurtre de Palestiniens, y compris Ahmad Sama’da et Mahmoud Jihad Muhammad Dudeen ;
• exige qu’Israël demande au ministre de la justice d’expliquer clairement aux services de sécurité que la torture est absolument interdite et de demander des comptes à tout fonctionnaire israélien qui y recourt.
Il faut réfléchir sur le fait qu’Israël est dans l’obligation de protéger la population palestinienne qui est sous l’occupation – y compris pendant les investigations concernant les Israéliens. L’UE ne doit pas donner carte blanche aux Israéliens pour prendre les mesures – quelles que soient ses conséquences sur les Palestiniens – qu’ils disent nécessaires, dans leur recherche aveugle pour retrouver les trois colons.
On se souvient qu’en 2011, les israéliens se sont lancés dans une punition collective quand ils ont mené une investigation de grande envergure dans le village d’Awarta (gouvernorat de Naplouse), et si l’UE omet d’aborder le problème de la soi-disant investigation menée par Israël, cela peut seulement être interprété comme un encouragement donné à Israël pour violer les droits des Palestiniens. À cet effet, nous demandons à l’UE d’agir fermement pour s’assurer que les violations du droit international par Israël ne soient pas encouragées, mais au contraire, entravées. Finalement, il faut se rappeler que tous les états membres, en tant que Hautes Parties contractantes à la quatrième Convention de Genève, sont dans l’obligation d’assurer le respect de ses dispositions.
Bien à vous,
Signature : The Palestinian Human Rights Organizations Council (PHROC) pour :
Addameer Prisoners’ Support and Human Rights Association
Aldameer Association for Human Rights
Al-Haq
Al Mezan Center for Human Rights
Badil Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights
Defence for Children International
Ensan Center for Human Rights and Democracy
Hurryyat – Centre for Defense of Liberties and Civil Rights
Jerusalem Center for Legal Aid and Human Rights
Ramallah Center for Human Rights Studies
Women’s Centre for Legal Aid and Counselling
Palestinian Center for Human Rights
Source : version originale publiée (en anglais) le 21 juin 2014 à :
http://www.addameer.org/etemplate.php?id=702
Traduit en français par Chantal C. pour CAPJPO-EuroPalestine et publié le 24 juin 2014 à :
http://www.europalestine.com/spip.php?article9452
Version complète de la lettre ouverte (en français), téléchargeable en cliquant ci-après :