Biens communs – Le retour des solidarités
C’est le titre du Hors-Série de Novembre-Décembre 2014 publié par l’hebdomadaire Politis. On trouvera ci-après l’éditorial et le sommaire du numéro.
Editorial
Entrer dans l’ère des solutions
Par Thierry Brun
L’habitude de voir dans la propriété un droit à exclure les autres nous fait trop souvent oublier ce qu’est un bien mis en commun. Pourtant, qui ne se retrouverait, au moins en paroles, dans l’aspiration à jeter les bases d’un nouveau vivre-ensemble ? Les crises écologiques et sociales révèlent trop souvent un intérêt général bafoué et des dirigeants ayant oublié que le but de l’État devrait être d’améliorer le bien-être d’une population et non de lui imposer la loi de la mondialisation. N’aurions-nous d’autre choix que celui d’une société où triomphent les égoïsmes ? Serait-il interdit d’avoir foi en des systèmes publics ?
Le retour de la notion de biens communs répond en partie à ces questions si importantes aujourd’hui en Europe, en particulier dans les pays durement touchés par des plans d’austérité. On peut le voir en Grèce (1), où des réalisations citoyennes, telles que des dispensaires pour soigner les exclus de la santé, sont gérées collectivement comme un bien – la santé publique – partagé et accessible à tous. Ailleurs, c’est l’eau qui connaît une réappropriation collective. Ces voies nous indiquent qu’on n’a pas « tout essayé ».
Le réchauffement climatique aggrave les inégalités globales entre conditions de vie et de survie, affirme Harald Welzer (2). Selon lui, le XXIe siècle verra « non seulement des tensions dont l’enjeu sera le droit à l’eau et à l’exploitation, mais de véritables guerres pour les ressources (3) ». Les divers conflits citoyens autour de la dégradation de la terre, des semences agricoles, de l’utilisation de l’eau, de l’écologie urbaine suscitent également la volonté citoyenne de s’organiser pour défendre une gestion collective de ces ressources afin d’en garantir la pérennité et l’accès à tous. La reconnaissance de la nécessité du partage constitue un point fort de convergence entre ces luttes.
Le mouvement des communs s’appuie sur des actions locales, notamment d’économie sociale et solidaire, sur des analyses ponctuelles et des collectifs de taille maîtrisable. Mais ce n’est que récemment, grâce au développement mondial d’Internet, que nous considérons des ressources globales comme des communs « universels ». Un rôle important est alors dévolu au politique : celui de reconnaître et de soutenir ceux qui veillent sur ces biens communs.
Car les richesses dont ils sont générateurs ont pour noms : soutenabilité, lien social, qualité de vie, action collective, etc.
L’étude des communs, au travers de tous les exemples présentés dans ce hors-série, nous dit qu’il y a des comportements collectifs et des normes sociales qui dépassent la seule addition des comportements individuels sur laquelle se fonde l’économie néolibérale. Si l’intérêt personnel est bien – et ce serait absurde de le nier – un des moteurs de l’action, il est loin d’en constituer l’alpha et l’oméga. À côté, contre, en dehors et en face, les humains savent montrer des appétences pour la sociabilité, le partage, l’altruisme, la coopération.
Notes :
(1) Voir p. 24 à 28.
(2) Voir les « Guerres du climat », Gallimard, 2009.
(3) Citation puisée dans « Commun. Essai sur la révolution du XXIè siècle », de Pierre Dardot et Christian Laval (voir p. 48).
Sommaire du numéro
4- LE DÉBAT
Quelle action collective pour les biens communs ?
par Christian Laval et Jean-Louis Laville
10- RETROUVER LE COLLECTIF
L’essor des énergies citoyennes par Patrick Piro – Reportage : Au Larzac, la terre est un bien public par Claude-Marie Vadrot – Reportage : Rêve de commune agricole à Notre-Dame-des-Landes par Patrick Piro – Un archipel sauvé des chasseurs par Claude-Marie Vadrot – Paris, ville nature par C.M.V – L’agroécologie et les communs, par Geoffroy Raout
24- PLANÈTE COMMUNE
Petits miracles à l’athénienne par Marie Chambrial et Erwan Manac’h – Entretien avec Alberto Lucarelli : « Les biens communs ne peuvent être mis sur le marché » par Olivier Doubre – La vie locale est aussi un bien commun, par Jordi Estivill – Des îles condamnées à l’exil par Claude-Marie Vadrot – Quel droit pour les ressources écologiques ? par Danièle Favari
36- ALTERNATIVES EN STOCK
Les communs, un savoureux millefeuille de droits et d’usages, par Frédéric Sultan – Pour une contre-économie du commun, par Michel Bauwens – Quelle place pour les arts et la culture ? par Sébastien Cornu et Laura Aufrère – La culture, des ressources nécessaires à notre état d’humanité, par
Marie-Catherine Henry et Shirley Harvey – La retraite partagée des femmes – Une approche plus solidaire du care, par Madeleine Hersent et François Lille
48- POUR ALLER PLUS LOIN
Livres et revues – En pratique – Sites et blogs
Source : Politis Hors-Série n° 61 Novembre- Décembre 2014 (52 pages), en kiosques (5,00 €) et en ligne à : http://boutique.politis.fr/d/biens-communs-le-retour-des-solidarites/p/HS+61
Sur le même sujet :
« La Renaissance des communs », entretien avec David Bollier, auteur de l’ouvrage éponyme, à :
http://nsae.fr/2014/04/17/la-renaissance-des-communs/