Les toits pourraient être le garde-manger de Paris
par Reporterre
La production de légumes sur toits s’amorce en France. Un projet de recherche innovant veut stimuler ce mouvement en concevant des substrats de culture utilisables sur les toits, à partir de matériaux issus du recyclage de déchets urbains. Et ça se passe à Paris.
La production de légumes sur toits, qui s’initie en France, interroge la recherche agronomique. En collaboration avec l’association Toits potagers, AgroParisTech et des unités INRA associées ont produit des références sur la conception de substrats de cultures issus de matériaux locaux.
Ce projet pilote vise à constituer et à tester des substrats de culture utilisables sur les toits, à partir de matériaux organiques locaux, issus du recyclage de déchets urbains. Afin de privilégier une économie circulaire, les chercheurs ont opté pour une utilisation de produits résiduaires organiques issus de l’activité urbaine. Parmi les critères de choix des matériaux, l’accent a porté sur leur proximité, leur disponibilité, leur accessibilité.
Objectif : comparer le comportement de trois matériaux dans le temps. Les comportements du compost de déchets verts, de marc de café inoculé de mycélium de pleurotes, du bois d’élagage et raméal fragmenté ont été analysés au cours d’une expérimentation de deux ans, lancée sur le site d’AgroParistech.
Les substrats innovants ont été constitués en « lasagnes » (lasagna-bed), consistant à superposer plusieurs couches de matériaux organiques, ceux riches en cellulose et en lignine (matériaux « bruns ») avec ceux riches en azote (matériaux « verts »). Ces substrats fertiles ont été comparés à un terreau horticole classique (témoin). Chaque bac de culture a été exposé à des conditions climatiques similaires, avec suivi des variables météorologiques locales.
Légume-feuille et légume-fruit
Les bacs ont été plantés en deux successions culturales de légume-feuilles (laitue, variété Batavia Florine) et de légume-fruits (tomate, variété SuperSweet 100 hybride F1) aux cycles de culture différents, valorisant différemment les substrats (exploration racinaire, besoin en éléments minéraux…) et susceptibles de recueillir à la surface de leur feuillage des éléments polluants.
L’objectif est de comparer les productions obtenues à partir des différents substrats, les évolutions physico-chimiques de ceux-ci et de mesurer les éventuels polluants (métaux lourds) issus des substrats ou de la pollution atmosphérique et qui pourraient se retrouver dans les produits récoltés.
Pour chaque substrat, des analyses physico-chimiques ont été faites avant la mise en culture, après la première culture et après le 2e cycle de la succession. Un engrais vert a été apporté dans tous les bacs après la 1re saison de culture.
Les indicateurs relevés sur les substrats sont les suivants : la hauteur pour mesurer l’affaissement (dû au tassement physique mais aussi à la perte de matière par absorption), la capacité de rétention en eau, le pH, la teneur en azote minéral, la minéralisation du carbone (estimation de l’activité microbiologique).
Le ver de terre dynamise l’azote
Il ressort de cette première expérimentation que les apports d’organismes exogènes (vers de terre, mycélium de pleurotes) favoriseraient une meilleure dynamique de minéralisation de l’azote. Les substrats composés de déchets de bois, de compost et de marc assemblés en couches permettent d’obtenir un meilleur rendement et sont plus durables dans le temps que les mélanges ou le terreau témoin.
Cette expérimentation lancée en 2012 demande à présent à être poursuivie pour recueillir des données agronomiques plus approfondies ainsi que des données pertinentes sur les risques de pollution atmosphérique pour des cultures conduites à proximité de trafic routier.
SOURCES : Garin Marie, Production et Innovation dans les systèmes de Production végétaux,Mémoire, INRA UMR SADAPT et Potagers sur les Toits, décembre 2012, 61 pages
Sur le thème de l’agriculture urbaine voir aussi : http://nsae.fr/2014/10/31/marie-monique-robin-sacree-croissance/