Les « chiffres de la dette 2015 » du CADTM
Par Jean Gadrey
Indispensable ! C’est bien plus qu’un recueil de données essentielles sur les dettes au Nord et au Sud et sur les effets et méfaits du « système dette ». C’est une analyse ultra accessible bien que pointue, fondée sur les meilleures données, c’est un petit livre d’une centaine de pages que l’on peut soit télécharger gratuitement soit acheter pour 6 € (plus 3 € de port) pour le garder sous la main.
« Tant au Nord qu’au Sud de la planète, la dette constitue un mécanisme de transfert des richesses créées par les travailleurs-euses et les petit(e)s producteurs-trices en faveur des capitalistes. L’endettement est utilisé par les prêteurs comme un instrument de domination politique et économique » (Charte politique du CADTM international, Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers Monde)
Voici les principaux thèmes traités, suivis de quelques commentaires, tableaux et graphiques du dernier chapitre que j’ai « capturés », mais qui ne rendent pas compte de la richesse de l’ensemble et de l’exploit pédagogique réalisé par les auteurs.
SOMMAIRE
Introduction. Du Sud au Nord de la planète : brève histoire de la crise de la dette et des programmes d’ajustement
- Les inégalités dans le monde (une remarquable analyse de l’évolution des inégalités, de la pauvreté, de la faim dans le monde, des facteurs explicatifs et des impacts sur l’envol des dettes)
- Panorama global de la dette au Sud : distribution de la dette externe dans les PED
- La dette au Sud
- La Banque mondiale et le FMI
- La dette au Nord
- Panorama global de la dette au Nord et au Sud
Conclusion. L’impact du « système dette »
COURT EXTRAIT DU CHAPITRE 6
Entre 2007 et 2012, la dette publique des pays étudiés a augmenté de 67 %. Les principales augmentations ont eu lieu dans les pays dits développés. Comme nous l’avons vu, ces augmentations soudaines sont associées à la récession économique et aux coûts des sauvetages bancaires.
Tableau 6.1 : La dette publique dans les pays développés et les pays en développement, en 2007 et en 2012 (en milliards de dollars US). Les chiffres pour les États-Unis et le Japon se rapportent à la dette du gouvernement central et excluent la dette d’autres niveaux de l’administration, ainsi que celle de la sécurité sociale.
Une simple comparaison entre les montants de la dette publique des pays développés et des pays en développement révèle que la dette des pays de ce second groupe est largement inférieure à celle des pays du premier groupe. Ceci montre que l’annulation de la dette des pays du tiers-monde est facilement réalisable sur le plan économique et financier. C’est une question politique, en tant que condition nécessaire (bien que non suffisante) pour garantir le respect des droits humains dans ces pays.
Contrairement à l’affirmation courante selon laquelle la dette publique serait à l’origine de la crise, du fait d’un excès supposé des dépenses publiques, l’augmentation la plus forte est bien celle de la dette privée. Ainsi, à titre d’exemple, entre les années 2000 à 2008, la dette privée totale (des sociétés non financières, des sociétés financières et des ménages) a augmenté de 175 à 235 % du PIB aux États-Unis et de 268 à 434 % du PIB au Royaume-Uni. Depuis la crise, la dette du secteur privé non financier s’est encore accrue : la Banque des règlements internationaux (BRI) a calculé qu’au niveau mondial, cette dette a augmenté d’environ 30 %. Selon la BRI, dans les pays « avancés », la dette privée du secteur non financier s’élevait en moyenne à 275 % du PIB, et à 175 % dans les pays dits « émergents ».
Le tableau ci-dessous montre quelques exemples de budgets selon différents postes au niveau mondial – dépenses effectives et manques à gagner -, alors que les besoins fondamentaux d’une partie de la population ne sont pas satisfaits. ON DEPENSE 159 FOIS PLUS, PAR EXEMPLE, POUR DIRE A LA POPULATION CE QU’ELLE DOIT ACHETER (DEPENSES DE PUBLICITE) QUE LA SOMME ALLOUEE AU PROGRAMME ALIMENTAIRE MONDIAL DES NATIONS UNIES POUR LUTTER CONTRE LA FAIM DANS LE MONDE.
Tableau 6.2 : Quelques chiffres édifiants (en milliards de dollars US, 2010-2012).