La France doit renoncer à construire l’aéroport de Notre Dame des Landes
Naomi Klein, Jean Jouzel, Virginie Despentes, Pierre Rabhi, Erri de Luca, Isabelle Stengers, Cyril Dion, Giorgio Agamben, Catherine Larrère : une quarantaine de personnalités appellent le gouvernement à ne pas construire l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes au nom de la protection du climat et du respect des engagements de la COP21.
Qui a déclaré : « A Paris, il y a eu bien des révolutions depuis des siècles, mais aujourd’hui c’est la plus belle et la plus pacifique des révolutions qui vient d’être accomplie : la révolution sur le changement climatique »?
Réponse : François Hollande, en clôture de la COP21, la conférence internationale sur le climat, le 12 décembre 2015.
Mais comment parler d’une révolution sans les actes courageux pour la faire advenir ? L’accord de Paris, adopté à l’unanimité en décembre 2015 à l’issue de la COP21, fixe au monde l’objectif de contenir l’élévation de la température de la planète « nettement en-dessous de 2° C » et de « poursuivre l’action » pour la limiter à 1,5° C. Y parvenir réduirait sensiblement les risques liés au dérèglement climatique, qui modifierait de manière irréversible les conditions d’existence sur Terre.
Dès aujourd’hui, les émissions excessives de gaz à effet de serre et les dérèglements qu’elles provoquent accentuent les inégalités sociales et font courir de nouveaux risques sur l’ensemble du globe. Six cent mille morts de désastres climatiques depuis 1995 ; 250 millions de réfugiés climatiques à l’horizon 2050 : derrière ces chiffres, c’est la responsabilité de notre génération qui est en jeu. Tous les chefs d’Etat et de gouvernement ont reconnu cette responsabilité dans l’accord de Paris.
Mais pour véritablement prendre sens, cet engagement doit maintenant dépasser les simples promesses diplomatiques et être mis en œuvre concrètement. Cela passe par la réduction d’activités émettrices de gaz à effet de serre, en particulier la combustion d’énergies fossiles.
L’engagement pris dans l’accord de Paris n’est pas compatible avec la construction d’un aéroport à Notre Dame des Landes sur près de 1225 hectares de terres agricoles et de milieux naturels (qu’habitent de nombreuses espèces protégées), qui générerait un surcroît d’émissions par l’aviation, le bétonnage d’une des plus grandes zones humides du pays, et la destruction de fermes paysannes.
A l’inverse, préserver le bocage fertile et riche en biodiversité de Notre Dame des Landes serait le signe de la maturité d’un pays prêt à s’engager dans la voie nouvelle de la transition énergétique et écologique, dont les générations actuelles comme les générations futures ont tant besoin. Abandonner ce projet ne préserverait par ailleurs pas que l’écosystème local : renoncer à un projet émetteur de gaz à effet de serre contribue également à préserver notre avenir à tou.te.s.
Depuis plus de 40 ans, le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes suscite l’opposition résolue et concertée d’agricultrices et d’agriculteurs, d’associations de protection de l’environnement, d’élu.e.s, d’habitant.e.s de la région, de riverain.e.s, de syndicalistes, ainsi que de nombreuses personnes à travers la France. Sur place, les opposant.e.s au projet d’aéroport mènent des expériences riches en enseignements, dans le domaine de l’agroécologie, de la permaculture, de l’habitat léger, etc. La qualité des études qui ont conduit à l’autorisation de l’aéroport est quant à elle contestable, son utilité même est remise en cause, de même que les dépenses que sa construction implique. L’abandon de ce projet, lancé il y a cinquante ans et désormais dépassé, est la seule position cohérente et pragmatique pour l’avenir de notre climat – c’est en effet à l’aune de l’accord de Paris que doit être jugée la pertinence de ce projet.
Nous demandons le respect des engagements pris lors de la COP 21 – autrement dit l’abandon du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes.
Premier.e.s signataires :
Giorgio Agamben, philosophe
Geneviève Azam, économiste, porte-parole d’Attac
Ludivine Bantigny, historienne
Jérôme Baschet, historien
Philippe Bihouix, ingénieur et écrivain
Christophe Bonneuil, historien, CNRS
Dominique Bourg, Philosophe
Yves Citton, professeur à l’université de Grenoble-Alpes et co-directeur de la revue Multitudes
Florent Compain, président des Amis de la Terre
François Cusset, historien
Denis Couvet, écologue, professeur au Museum national d’histoire naturelle
Amy Dahan, historienne et sociologue des sciences
Deborah Danowski, philosophe
Virginie Despentes, écrivaine
Vincent Devictor, Ecologue, CNRS
Cyril Dion, auteur et réalisateur
Pierre-Henri Gouyon, professeur d’écologie au Museum national d’histoire naturelle
Émilie Hache, philosophe
John Holloway, sociologue et philosophe
Jean Jouzel, climatoloque, ancien vice-président du groupe scientifique du GIEC
Naomi Klein, journaliste
Catherine Larrère, philosophe
Jérôme Leroy, écrivain
Erri de Luca, écrivain
Virginie Maris, philosophe, membre du Conseil Scientifique du Patrimoine Naturel et de la Biodiversité auprès de la Ministre de l’écologie
Bill McKibben, co-fondateur de 350.org
La Parisienne Libérée, chanteuse
Pierre Perbos, président du RAC
Karen Pinkus, professeure de littérature comparée et d’italien
Serge Quadruppani, écrivain, traducteur
Pierre Rabhi, paysan, écrivain et philosophe
Marc Robert, professeur de chimie, Univversité Paris Diderot
Marie-Monique Robin, journaliste, réalisatrice et auteure
Kristin Ross, professeure de littérature comparée
Isabelle Stengers, philosophe
Eduardo Viveiros de Castro, anthropologue
Patrick Viveret, philosophe
Cliquer ici pour signer l’appel.
Source de l’illustration : Michel Briand