Non, la France n’est pas un « pays chrétien » !
Et pourquoi, en tant que chrétiens, nous nous sentons insultés par ce qualificatif.
Par Antoine Rolland, Stéphane Lavignotte, Laurent Gagnebin, Philippe Kabongo, Mathieu Gervais, Marina Touillez, Philippe Guttinger, Philippe Wender et Bertrand Marchand se réclamant du Christianisme social.
Nous entendons beaucoup en ce moment des responsables politiques, et en particulier un ancien président de la République en précampagne pour 2017, qualifier la France de « pays chrétien ». À chaque fois, en tant que chrétiens, nous ne pouvons nous empêcher d’y voir une insulte à notre foi : comment un pays, dans son essence, pourrait-il être chrétien ?
Il ne s’agit pas ici de nier le nombre d’églises présentes en France, le nombre de personnes se disant chrétiennes – en diminution constante ces dernières années -, mais bien d’affirmer qu’un pays, une nation ne peut pas se revendiquer de ce qui est un choix personnel.
Pour nous, être chrétien, c’est s’engager personnellement à suivre le Christ et son enseignement, à faire un choix radical pour vivre pleinement l’évangile. Dire que la France est chrétienne m’ôte à moi cette possibilité d’affirmer ma foi et de proclamer « j’ai choisi de suivre Christ ». Cela rabaisse le message révolutionnaire de l’évangile à un simple style architectural – le fameux manteau d’églises -, à un corpus culturel ou artistique plus ou moins connu et partagé, à une vision d’un passé fantasmé.
Mais pire encore est de se servir de cette excuse pour rejeter l’étranger ; car un christianisme qui rejette l’étranger, c’est un christianisme qui rejette l’exode et le deutéronome : « Souviens-toi que tu es toi-même étranger et esclave » (Ex. 22/20, 23/9 – Deut. 5/15, 10/19, 26/5…). C’est un christianisme qui rejette l’évangile de Matthieu : « Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; » (Mt 25/35). C’est un christianisme qui oublie que Pierre nous dit « vous êtes étrangers et voyageurs sur la Terre » (1Pi 2:11). C’est un christianisme qui rejette finalement le fondement même du message évangélique « aime ton prochain comme toi-même ». C’est un christianisme qui rejette le récit biblique tout entier fondé sur la figure de l’étranger, messager de Dieu à accueillir.
Ce texte est initialement paru dans Réforme du 23 juin 2016.
Source : http://www.christianismesocial.org/spip.php?article512
Texte magnifique dans sa simplicité.
Je pense qu’il faut être attentif aux opportunités pour le faire connaître .
Annie Grazon