Difficultés et tensions dans le diocèse d’Osorno
par Danilo Andrade Barrientos, laïc ignacien
La division ecclésiale, l’absence de dialogue et la crise du leadership persistent dans le diocèse chilien d’Osorno.
C’est sa complicité dans l’affaire Karadima qui est reprochée à Juan Barros. Les laïcs d’Osorno mettent leur espoir dans la prochaine visite ad limina des évêques chiliens.
Au cours de cette année, se sont succédées dans notre ville de nombreuses prises de position, déclarations, activités diverses et manifestations non violentes, suite à la nomination inopportune de Juan Barros comme évêque titulaire du diocèse d’Osorno. Nous devons mettre notre espérance chrétienne dans ce qui se produira lors de la prochaine visite ad limina des évêques à Rome.
Tout le monde – et heureusement également à Rome – connaît la situation ecclésiale et administrative sur cette terre de mission et d’évangélisation du sud du Chili, autrefois exemplaire, mais qui malheureusement aujourd’hui souffre de divers problèmes qui peuvent se résumer par “division ecclésiale et absence de dialogue” pour résoudre la crise de leadership et de praxis qui dure depuis bientôt deux ans.
Division, car il est évident que le clergé aussi bien que les laïcs du diocèse manquent d’unité et de confiance entre eux, et qu’en plus, parfois, ils se trouvent en opposition frontale du fait que certains paroissiens acceptent sans plus le fait que l’évêque ait été imposé, et que d’autres, dont nous sommes, souhaitent que soit corrigé le mal causé par l’arrivée sans consultation du Père Juan Barros Madrid au siège épiscopal d’Osorno.
Je dis, absence de dialogue, car depuis longtemps, et par divers moyens, nous avons demandé en tant qu’Organisation /Communauté de Laïcs et de Laïques d’Osorno, qu’un dialogue fraternel et sincère soit établi avec le Père Juan (Barros), ce qui n’a jusqu’à maintenant pas été possible. De plus, récemment à Punta de Tralca [1], nous avons voulu lui parler et nous l’avions prévenu que nous irions au lieu de la conférence, mais il ne nous a pas reçus, s’éclipsant la veille de la clôture de l’assemblée plénière des évêques.
C’est donc l’Évêque Alejandro Goic qui nous a reçus, qui en plus d’être titulaire du diocèse de Rancagua est chargé de la Commission Nationale pour la prévention d’abus sur les mineurs et de l’accompagnement des victimes de la Conférence épiscopale chilienne.
Devant ces faits et ces situations qui ne sont pas voulues par une partie importante des fidèles d’Osorno, il me semble important de réaffirmer que l’opposition à cette fâcheuse nomination épiscopale obéit fondamentalement à une démarche de conscience. Toutes les personnes, membres des communautés que nous sommes, engagés pour que le Père Juan Barros soit éloigné de notre diocèse, ne le faisons pas pour des causes fantaisistes ou revanchardes. Nous le faisons simplement parce qu’en conscience nous considérons que l’évêque, du fait de ses complicités et silences sur le sujet des abus sexuels dans la ténébreuse affaire Karadima, encourt des reproches tels qu’ils ne lui permettent pas d’assurer la si haute charge de pasteur de notre chère cité.
Convaincu, en cette fin d’année, que nous, les chrétiens, devons être responsables face à des situations d’injustices et que nous ne pouvons pas demeurer en silence ni passifs devant la grave crise qui traine en longueur dans notre diocèse, il me semble que le temps est venu que l’Église assume une vielle tradition : la franchise.
Franchise chrétienne qui doit rendre transparentes nos positions ou coexistent diverses lectures de cette situation qui ne laissent pas en paix les membres des communautés paroissiales, et franchise pour corriger certains ecclésiastiques qui d’en haut favorisent la mise à distance (de la question, NDT), et l’absence du dialogue qui serait nécessaire pour chercher une issue à la crise actuelle afin que tout retourne à la normale.
Bientôt les évêques de notre pays seront à Rome en visite ad limina, avec le Pape François. Ils échangeront sur l’état des différents diocèses du pays. Ce sera sans doute une occasion unique pour que l’évêque Juan Barros puisse exprimer sur place au Pape ce qui se passe vraiment dans sa juridiction ecclésiastique depuis qu’il est arrivé à Osorno.
Cette attitude, sincère et saine pour tous, serait un bon pas en avant pour résoudre le “cas Osorno”. Au contraire, il ne faudra en aucune manière utiliser cette visite pour approfondir la division par un langage et une vision unilatérale qui, sans aucun doute, creuseraient encore plus les différences et les douleurs que nous avons supportées ces dernières années.
En ce qui me concerne, j’utilise toujours un langage qui ne blesse pas les sentiments religieux de l’autre qui ne pense pas comme moi. Mais cette attitude de parole sereine ne m’empêche pas de dire, en toute conscience, ce que beaucoup de personnes pensent de la présence du Père Juan Barros dans le diocèse, lui qui ne jouit pas d’une bonne renommée et dont le passé récent est répréhensible.
Je ne le dis pas pour imposer une vérité ou une façon de voir, mais simplement parce que les actes injustes ne peuvent pas être imposés, c’est un abus de pouvoir, et c’est cela qui justement limite et limitera la possibilité de réconciliation des esprits dans notre cher diocèse d’Osorno .
Toute conscience, qu’elle soit bien ou mal informée, qui se réfère à des choses qui intrinsèquement sont mauvaises ou indifférentes, oblige la personne; c’est pécher que d’agir contre sa conscience. (Source Saint Thomas : Quaestiones quodibertales III, a.27).
Note :
[1] À l’occasion de la réunion de la Conférence des Évêques du Chili (NDT)Source : Reflexion et Liberation (Chili) http://www.reflexionyliberacion.cl/ryl/2016/12/29/dificultades-y-tensiones-en-la-diocesis-de-osorno/
Traduction : Régine et Guy Ringwald
Lire aussi : http://nsae.fr/2016/11/22/les-laics-dosorno-rencontrent-les-eveques/