Vivre dans la dignité
Du 2 au 4 décembre 2014 s’est déroulée une conférence internationale à Bethléem pour marquer le 5ème anniversaire de la déclaration de Kairos Palestine : « Un moment de vérité : une parole de foi, d’espérance et d’amour du cœur de la souffrance palestinienne ». Cette rencontre s’est référée en particulier au passage suivant de la Bible : « Nous sommes pressés de toute manière, mais non pas écrasés, désemparés mais non pas désespérés » (2 Cor. 4,8).
Vous trouverez ci-après la traduction du compte rendu et de la Déclaration finale de la Conférence, réalisée et diffusée par nos amis de Sabeel France.
Cinq années de la voix prophétique de Kairos Palestine
Pour la célébration du cinquième anniversaire de l’émission du document « Un moment de vérité » [1], Kairos Palestine, en partenariat avec le PIEF (Forum Oecuménique Palestine Israël) et ATG (Groupe de tourisme alternatif) a organisé une conférence internationale et une série d’évènements du 2 au 6 décembre 2014 à Bethléem.
Plus de 250 participants de Palestine et de nombreux autres pays du monde se sont réunis à Bethléem. Ils ont rappelé le « grand nombre de souffrances en Palestine, en Israël et partout au Moyen Orient » et ils ont déclaré que « la politique d’oppression d’Israël et l’occupation qui se poursuit de terres palestiniennes contribuent de façon directe à ces souffrances. » Ils ont observé que « les cinq dernières années ont vu l’occupation d’Israël se renforcer. » Dans un esprit de sumud (ténacité, constance) la conférence s’est reférée à un passage motivant de la Bible « Nous sommes pressés de toute manière, mais non pas écrasés, désemparés mais non pas désespérés. » (2 Cor. 4, 8)
Dans une intervention visant à affirmer les signes d’espoir, Rifat Kassis, coordinateur général de Kairos Palestine a souligné le fait que, lors de la publication par Kairos Palestine de son document « Un moment de vérité », ses messages étaient émis comme des appels à l’action, à la coopération et à la solidarité. Kassis a insisté sur le fait que la notion de « résistance aimante », un principe vital dans le document de Kairos, était implicitement pacifique par nature. « Militantisme non-violent ne signifie pas militantisme exempt de risque » a-t-il fait remarquer. « Le gouvernement israélien a une histoire de répression impitoyable, même des protestations pacifiques. » Pourtant a déclaré Kassis « Kairos a affirmé sans équivoque sa conviction que la toute meilleure façon de faire face et de résister à cette répression consiste à mettre toujours en pratique ces principes pacifiques, collectivement. »
Cinq années de réalisations
Fidèle à ses intentions initiales – servir de plateforme pour l’action et n’être pas seulement un document ou un message – Kairos Palestine s’est développé et a progressé au cours des cinq années écoulées. De plus en plus d’Églises ont été convaincues de remettre en question leurs investissements afin d’éviter d’apporter leur soutien à des sociétés ou des organisations liées à l’occupation israélienne. D’autres ont clairement décidé de désinvestir dans de telles sociétés ou ont adhéré à l’ensemble de la campagne BDS (boycott, désinvestissemnt et sanctions). Des groupes de travail Kairos Palestine ont été constitués dans beaucoup de pays et de régions partout dans le monde.
Kassis insiste encore : « Et Kairos est en train de l’emporter parce que, malgré le sang versé, les souffrances et l’injustice, il y a des gens et des communautés qui rêvent d’une nouvelle terre et d’un nouvel être humain, capable de se lever avec la volonté d’aimer chacun de ses frères, chacune de ses sœurs. »
Où est la lumière ? Quelles sont nos raisons d’espérer ?
La conférence a observé qu’en dépit du sang versé et des souffrances qu’endurent le Moyen Orient en général et la Palestine en particulier, beaucoup d’individus et de communautés continuent à se tourner vers Kairos, en quête d’espoir. Israël, comme les autres régimes d’oppression, ne craint pas seulement la colère des opprimés ; il craint – peut-être encore plus – leur espoir. Israël sait que son pouvoir et son impunité sont d’autant plus importants que les gens se sentent plus faibles et sans espoir. Il sait aussi que sa domination est d’autant plus facile à maintenir qu’il arrive à convaincre la communauté internationale qu’Israël est attaqué et que son existence est en jeu. Cela veut dire que les Palestiniens doivent poursuivre de façon persévérante et créative leur résistance populaire légitime : une résistance animée par l’amour, non par la haine et la vengeance. Kairos, alors, est un concept d’opposition à Israël et à tous les régimes d’oppression : son message, au fond, est essentiellement un message d’espoir. Kairos a confiance dans la volonté du peuple et préconise des moyens non violents pour mettre fin à l’oppression. Cette attitude d’espoir, de paix, est de loin plus menaçante pour Israël que tout autre chose.
En évoquant de nouvelles interventions sur la scène internationale, les participants ont pressé les pays « d’intensifier leurs efforts bien que nous ayons peur que leurs paroles n’aient pas assez de poids et qu’elles arrivent trop tard. » Dans une déclaration finale [2], les participants ont appelé « l’Église mondiale à agir et à témoigner d’une précieuse solidarité. »
Insistant sur le fait que de simples paroles ne sauraient suffire, les participants se sont mis d’accord sur un appel à l’action qui inviterait à se montrer attentifs aux voix des chrétiens palestiniens et à les diffuser en « permettant à leurs points de vue de servir de guide à notre communication et à notre action dans nos propres contextes. » Ils ont déclaré : « Nous nous engageons à accompagner les chrétiens palestiniens, en union avec le Conseil Œcuménique des Églises, dans le pèlerinage pour la justice et la paix. » [souligné par le traducteur]
Ils ont affirmé leur engagement sans réserve à poursuivre une réflexion et une critique théologique comportant des modalités confiantes de rencontres théologiques et politiques entre des Juifs, des Chrétiens, des Musulmans et tous les gens de bonne volonté. Les participants ont aussi renouvelé leur engagement à persévérer dans des actions de résistance créative pour protéger la dignité humaine, celle de l’oppresseur comme celle de l’opprimé, par « des actes de refus et de désobéissance civile et toutes autres modalités de résistance non-violente. »
La conférence s’est aussi engagée à s’unir aux patriarches et chefs d’Églises dans leur appel pour que Al-Qods/Jérusalem soit « une ville sainte commune à deux peuples et trois religions » et à être attentive à l’appel à la prière pour la paix de Jérusalem.
Compte rendu traduit par les Amis de Sabeel France.
16 déc. 2014
Notes :
[1] « Un moment de vérité » : http://nsae.fr/2009/12/13/un-moment-de-verite/
[2] texte intégral de la déclaration finale ; en anglais : http://pief.oikoumene.org/en/news-events/news/statement-from-life-with-dignity-kairos-palestine-5th-anniversary
Traduction française par les Amis de Sabeel France ; http://www.amisdesabeel-france.blogspot.fr
Cette traduction est téléchargeable (pdf) en cliquant ci-après : DéclarationFinaleConf.InternationaleKairos