Le sang symbole de mort ou de vie ?
Philippe Liesse.
Des guerres continuent à blesser notre humanité un peu partout dans le monde. Le sang devient symbole de mort, alors qu’il est symbole de vie ! De nouveau, le Proche-Orient est en feu ! C’est l’horreur ! Que peut-on en dire sans sombrer dans une géopolitique à bon marché ? Il reste que chaque camp espère la paix ! Mais quelle paix ? Un trésor à sauvegarder au prix d’une solidarité qui doit toujours prendre le pas sur le chacun pour soi !
C’est sans doute dans cette optique que Johan Bonny, l’évêque d’Anvers s’est exprimé dans les médias flamands ce 9 novembre 2023. Vivant dans une ville flamande qui compte la plus grande communauté juive du pays, il s’adresse à ses amis juifs à propos de la situation à Gaza : Israël a le droit d’exister et de se défendre, personne n’en doutera. Mais les Palestiniens ont aussi le droit d’exister et de se défendre.
Johan Bonny veut rompre un silence coupable. La réaction de l’Occident pèche par confusion et contradiction. Tandis que le porte-parole de l’Unicef déclare que Gaza est un cimetière pour les enfants, et un enfer pour tout le monde, les grandes puissances militaires soutiennent Tsahal, l’armée israélienne, au nom d’un devoir d’assistance à Israël, la démocrate !
Dans sa lettre ouverte sur la situation à Gaza, Johan Bonny redit que la seule solution est l’existence de deux États. Solution soulignée par d’aucuns, à maintes reprises, mais stratégiquement boycottée afin que la terrible journée du 7 octobre 2023, celle de cette attaque inexcusable et inacceptable, ne serve d’alibi à l’opération « vengeance ». Des milliers d’innocents sont morts à Gaza, et Tsahal continue son travail de destruction systématique au nom d’une volonté de réduction à néant du Hamas.
Johan Bonny se dit « exaspéré » en constatant que certains politiciens et militaires israéliens usent et abusent de thèmes bibliques pour légitimer leurs actions meurtrières. Il s’exprime en tant que chrétien et n’hésite pas à écrire qu’aucune parole de Dieu dans l’Ancien Testament ne peut légitimer une récupération violente ou une expansion militaire du soi-disant « pays biblique ».
Il est intéressant de s’arrêter quelque peu aux termes « soi-disant pays biblique ». En réalité, il s’agit du terme Terre promise !
Mais cette expression, enracinée au plus profond des traditions religieuses, devient une arme de destruction quand elle est réduite à sa dimension géographique. La « Terre » que Dieu promet est une « Humanité nouvelle ». D’ailleurs, quand les prophètes parlent de la terre, ils veulent signifier les « hommes ». Et l’humain occupera toujours la place centrale au détriment de la terre. Ainsi, le psaume1 chante que Le ciel, c’est le ciel du Seigneur ; la terre, il l’a donnée aux fils d’Adam. De plus, la terre symbolise la fidélité à l’alliance. Et la fidélité n’est pas « géographique », car elle est un chemin de « communion ».
Les prophètes sont très clairs à propos de ce court-circuit géographique : Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison, qui joignent champ à champ jusqu’à ne plus laisser de place et rester seuls habitants au milieu du pays [2]. Et quand le prophète parle du futur, il met dans la bouche de Yahvé cette promesse qui évacue toute dimension géographique : Je vais créer des cieux nouveaux et une terre nouvelle [3] […] le loup et l’agnelet paîtront ensemble [4].
Notes :
Notes :
[1] Ps 113, verset 16 (Hébreu 115)
[2] Isaïe 5, 8
[3] Isaïe 65, 17
[4] Isaïe 65, 25
Source : REVUE COMMUNE DU RÉSEAU PAVÉS N° 77