Par José M. Vidal
Il a toujours été comme un petit roseau frêle, mais avec une santé du fer et des nerfs en acier. Aujourd’hui, à 89 ans, Dom Pedro Casaldáliga (Balsereny, 1928), le poète-évêque des marginalisés, reste un roseau, mais doublé par la maladie de Parkinson. De son fauteuil roulant, il dispense ses silences et marie les mots qui, de temps en temps, continuent à jaillir comme des fléchettes prophétiques – laconiques et pertinentes. Il ne veut pas l’indépendance catalane, il demande aux jeunes de passer à l’action, et il affirme que François est «une bénédiction de Dieu».
Père Angel (G) et Dom Pedro Casaldaliga (D) dans la chapelle de Sao Félix do Araguaia, au Brésil
Don Pedro, voulez-vous recevoir des visites ?
Certaines, oui.
En tant que lauréat du prix international de Catalogne, que pensez-vous du processus [d’indépendance]?
Nous verrons ce qui se passerait avec l’indépendance. Je préférerais que ce ne soit pas le cas. Il y a des gens sages qui vont aborder le sujet différemment. Ce n’est pas un processus naturel. Cela n’a aucun sens.
Connaissez-vous Tarancón [le Cardinal Vicente Enrique et Tarancón]?
Oui, lorsque j’étais séminariste à Barbastro et qu’il était évêque à Solsona. C’était une personne de valeur, qui avait une vocation d’intermédiaire pendant cette période difficile en Espagne.
D’où viennent votre espoir et votre force, malgré tout?
De m’appuyer sur quelqu’un.
Qui est ce quelqu’un?
Ce ne peut être que Lui.
Qu’est-ce qui nourrit votre espoir?
La résurrection du Christ.
Si vous pouviez changer une seule chose dans le monde, que serait-ce ?
Que tous ceux qui ont le pouvoir se tiennent au bon endroit : la vie.
Et que changeriez-vous dans l’Église catholique?
Quelle mette le pouvoir entre les mains des gens. Sinon, cela devient un problème. Dans l’Église, la chose cruciale est de donner sa vie pour les autres et un dévouement évangélique aux Béatitudes.
Avez-vous eu des problèmes avec la hiérarchie?
Oui j’en ai eu.
Qu’avez-vous fait et que faut-il faire dans ces cas?
Continuer à rester ferme du côté des pauvres et toujours témoigner.
Pourriez-vous ordonner que les églises soient ouvertes 24 heures sur 24?
Oui, afin que les gens puissent entrer, dormir, manger et prier, s’ils le souhaitent.
Quelques conseils aux jeunes.
Qu’ils restent rebelles avec espoir, malgré le désespoir. Et toujours du côté des pauvres et des exclus. Nous parlons de sensibilisation depuis des années. Cette époque est terminée. Il est temps d’agir et de répondre à des appels spécifiques.
Que dites-vous au père Ángel [García Rodríguez] qui est venu vous voir de Madrid?
Qu’il continue à être un prophète et à chercher la paix, qui est du vécu et qui est un processus.
Que pensez-vous du Pape François?
Une bénédiction de Dieu.
Êtes-vous, comme lui, une bénédiction de Dieu?
Nous sommes tous des bénédictions de Dieu, si nous écoutons et si nous nous engageons à échanger et à dialoguer. Parce que le problème est de savoir comment vivre la vie quotidienne au milieu de ce monde violent.
Est-ce que vous regrettez quelque chose?
Ne pas avoir eu assez d’attitudes de dialogue.
De quoi êtes-vous le plus fier?
Des nombreuses personnes qui m’accompagnent toujours et d’avoir donné ma vie aux exclus, aux marginalisés, aux petits.
Vos saints préférés?
Saint François d’Assise (quand je suis allé à Rome, je voulais aller à Assise pour voir le père Arrupe, mais je n’ai pas pu).
Et les poètes?
Antonio Machado, saint Jean de la Croix (son « Cantique spirituel » vient en premier), Espriu, Neruda et Maragall.
Merci beaucoup, Dom Pedro.
Vous êtes les bienvenus. Nous avons parlé. Maintenant, il s’agit de faire.
Traduction anglaise : http://iglesiadescalza.blogspot.fr/2017/09/interview-with-dom-pedro-casaldaliga.html
Traduction française : Lucienne Gouguenheim
Père Angel (G) et Dom Pedro Casaldaliga (D) dans la chapelle de Sao Félix do Araguaia, au Brésil