Les enjeux sont importants pour la LCWR qui ouvre son assemblée annuelle
Alors que la plus grande organisation de direction de religieuses aux États-Unis se réunit pendant quatre jours à Nashville, au Tennessee, du 12 au 16 août 2014, le groupe semble être au bord d’un précipice.
Mais ce qui se trouve de l’autre côté, ou quel chemin les membres choisiront de suivre, personne ne peut le dire.
La Conférence de direction des religieuses (LCWR : Leadership Conference of Women religious) est sous le coup d’une évaluation doctrinale du Vatican ordonnée depuis 2009. A la suite de l’enquête, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi lui a ordonné en 2012 de réformer ses statuts et a nommé un évêque pour superviser les changements.
Actuellement, la situation est plus dure : en avril, le cardinal Gerhard Müller, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a ordonné que, après cette assemblée, les conférenciers invités à des événements du groupe soient soumis à l’approbation de l’archevêque de Seattle, J. Peter Sartain, qui conduit le programme de réforme de cinq ans de la LCWR.
Mais les membres de la LCWR choisiront-elles de suivre l’édit de Müller, selon lequel Sartain a le pouvoir d’approbation des conférenciers lors d’événements majeurs? Ou le groupe décidera-t-il de s’en tenir à son affirmation selon laquelle les sanctions sont « disproportionnées par rapport aux préoccupations soulevées et ont compromis la capacité de l’organisation à remplir sa mission » ?
Dan Stockman et Dawn Cherie Araujo – 8 août 2014
(publié en anglais ici)
Criez, sœurs ; criez !
Par Joan Chittister et Mary Lou Kownacki
Il n’y a pas si longtemps, le monde remarquait à peine les religieuses, et c’était alors seulement d’une façon anonyme ou stéréotypée. Maintenant, il n’y a guère d’instance dans le monde qui ne les remarque. L’ironie est palpable. Quand nous avions le look de « religieuses », on ne nous voyait pas. Maintenant que nous sommes simplement nous-mêmes, tout le monde voit tout ce que nous faisons. De toute évidence, le témoignage est au moins aussi puissant que l’uniforme. Et ces dernières années les religieuses ont clairement témoigné de la contemplation, de l’égalité et de la justice.
Le problème avec cette façon de penser, cependant, c’est que les personnes qui se considèrent comme de véritables adultes commencent à agir comme telles.
Toutefois, ce genre de témoignage a des conséquences.
Par exemple, cette semaine la Conférence de direction des religieuses (LCWR) devra faire face à des décisions qui feront avancer ou reculer la question de l’action des femmes dans une église masculine. Aussi étrange que cela puisse paraître au 21e siècle, la question est de savoir si les femmes sont oui ou non capables d’entendre divers conférenciers en restant de fidèles catholiques. La question est de savoir si des religieuses peuvent oui ou non discuter de divers points de vue sur les grandes questions et rester toujours de fidèles catholiques. La question est de savoir si les religieuses peuvent oui ou non gérer leurs propres organisations et être toujours de fidèles catholiques. La réponse du Vatican à ces questions est non. Au cours des 45 dernières années, cependant, la réponse de la LCWR à ces mêmes questions a été un oui clair et persistant.
Les hommes et les femmes du monde entier observent le déroulement du scénario, recherchent des modèles de solution, demandent des conseils spirituels pour faire face à leurs propres échecs. La religieuse et poétesse bénédictine, Sœur Mary Lou Kownacki, décrit la situation dans son blog personnel, Old Monk’s Journal [1] :
« Nous avons eu assez d’exhortations à nous taire. Crions en mille langues. Je vois que le monde est pourri à cause du silence », écrivait sainte Catherine de Sienne. C’est cette citation que médite Old Monk alors que la LCWR va tenir son assemblée annuelle à Nashville, Tennessee, du 12 au 16 août.
Le silence face à l’injustice est un crime, un péché, un acte odieux qui a été utilisé par les autorités de l’Église au cours des siècles pour tuer les questions et les idées nouvelles et punir ceux qui osent les formuler.
Old Monk eut donc le cœur brisé en lisant cette phrase de Tom Fox, le rédacteur en chef du National Catholic Reporter, dans un commentaire qu’il a écrit sur la prochaine assemblée de la LCWR [2]. « Un groupe (LCWR) qui s’enorgueillissait autrefois de son leadership courageux et de la transparence de son modèle se fait maintenant plus discret dans les médias que la plupart des autres organisations catholiques, y compris les évêques américains. »
C’est sur cette forme d’intimidation et de peur que comptent les autorités ecclésiastiques. Gardez l’abus secret. Gardez-le derrière des portes closes.
Voici donc la prière et l’appel de Old Monk à la LCWR :
Très chères sœurs, vous n’avez rien fait de mal. Il est de votre obligation en tant que religieuses de poser les questions qui doivent être exprimées. C’est la sainte responsabilité des religieuses de se tenir debout avec ceux qui sont les plus démunis. Soyez fières des questions que vous avez posées, des conférenciers que vous avez invités à vos assemblées, des déclarations que vous avez faites, des liturgies vous avez célébrées. Allez au micro et dites : Nous croyons en une théologie féministe et en l’ordination des femmes ; nous croyons aux droits des gays, des lesbiennes et des transgenres et nous allons continuer à parler à haute voix de ces questions. Respectueusement, nous ne nous conformerons pas à l’ordre de soumettre les noms des conférenciers de notre assemblée annuelle aux représentants du Vatican pour approbation. Si cela signifie que la LCWR n’est plus reconnue par les autorités de l’Eglise, qu’il en soit ainsi. Bien que nous ayons donné notre vie à l’Eglise, nous n’avons pas donné notre conscience à qui que ce soit, mais à Dieu. Bien que nous reconnaissions la légitimité du droit canon, nous croyons qu’il entre parfois en conflit avec l’Evangile. Et nos cœurs – alors que nous étions de jeunes femmes – ont été enflammés par le message radical et la vie de Jésus de Nazareth. Agir autrement, serait troquer notre intégrité. En tant que membres de la LCWR, nous sommes avec notre sœur, Catherine de Sienne, en rappelant aux fidèles : « Nous avons eu assez d’exhortations à nous taire. Crions en mille langues. Je vois que le monde est pourri à cause du silence ».
D’où je suis, il me semble que, si la quantité d’articles, d’encre, et de revues de presse nous dit quelque chose, nombreux sont ceux qui se soucient profondément que les voix et l’action des sœurs aux États-Unis demeurent fortes.
Si vous êtes l’un d’eux, vous voudrez peut-être envoyer un email à LCWR, signer la pétition avec nunjustice.org, ou aller sur Twitter avec #CryOut [3]. Dites à ces sœurs avec Catherine de Sienne, aujourd’hui, à notre époque, pour le bien de l’Eglise en ce moment important dans l’histoire de l’Eglise, « Criez, sœurs ; criez. »
Joan Chittister, Mary Lou Kownacki – 8 août 2014
Traduction française de Lucienne Gouguenheim
Notes :
[1] https://www.monasteriesoftheheart.org [2] http://ncronline.org//news/sisters-stories/conflict-vatican-shadows-upcoming-lcwr-assembly [3] http://www.nunjustice.org/Source : texte original en anglais publié le 8 août 2014 par National Catholic Reporter (NCR) à : http://ncronline.org/blogs/where-i-stand/cry-out-sisters-cry-out
Illustration : logo de l’Assemblée générale 2014 de la LCWR : « Le Saint Mystère révélé parmi nous ».
AGIR en signant la PETITION adressée au pape François, lui demandant de soutenir les religieuses des Etats-Unis et de retirer le mandat injuste contre la LCWR :
Pour SIGNER la pétition cliquer ICI
TRADUCTION en français de la pétition, téléchargeable en cliquant ci-après : Cher Pape François
Sur le même sujet :
• http://nsae.fr/2014/05/09/les-religieuses-americaines-sexpriment-sur-leur-visite-au-vatican/
• http://nsae.fr/2013/12/17/les-femmes-a-la-croisee-des-chemins-dans-leglise/