Cinq années avec le Pape François : Une levée d’espoirs, en attente d’actions radicales
Communiqué de presse commun par “Nous Sommes Église” (“We Are Church International” – WAC-I) et “Réseau Européen Églises et Libertés” (“European Network Church on the Move” – EN-RE)
Cinq ans après l’élection du Pape François (13 Mars 2018) ‘’Nous Sommes Église’’ (‘’We Are Church International’’ – WAC-I) et le ‘’Réseau Européen Églises et Libertés’’ (‘’European Network Church on the Move’’ – EN-RE) appellent le Pape François à poursuivre le processus de réforme engagé dans l’Église Catholique et à l’intensifier par la mise en œuvre d’actions radicales. L’élection de ce premier Pape sud-américain qui a entamé sa papauté en demandant aux personnes du monde entier de prier pour lui a suscité de grands espoirs dans le cœur de nombreux catholiques, particulièrement parmi ceux qui se sentaient frustrés par l’incapacité de leur église à mettre en œuvre les promesses du concile de Vatican II qui paraissaient ouvrir la possibilité d’une meilleure fidélité à l’évangile, et d’une authentique modernisation de leur Église.
Aujourd’hui les délégués et représentants des mouvements concernés par la réforme de l’Église catholique et par la justice sociale expriment un sentiment mitigé à propos du bilan du Pape François. WAC-I et EN louent le Pape François pour avoir donné l’exemple d’une vie en solidarité avec les pauvres et encouragé le dialogue à l’intérieur et à l’extérieur de l’Église ; pour ses efforts pour freiner l’utilisation abusive par la hiérarchie des richesses et pouvoirs de l’Église ; pour s’être adressé aux hommes en un langage accessible à la plupart d’entre eux. Il reste cependant que beaucoup de ces réformes ont rencontré une résistance de la part des personnages officiels de l’Eglise nommés par les Papes précédents, Jean Paul II et Benoit XVI, et c’est pourquoi WAC-I et EN-RE appellent aujourd’hui les cardinaux, les évêques et l’ensemble des fidèles catholiques à rejoindre la vision d’une Église servante et pauvre qui est celle du Pape François.
Les responsables de WAC-I et d’EN-RE saluent les prises de position infatigables du Pape François en faveur des migrants et réfugiés ; son engagement au service d’une paix fondée sur un monde de justice ; ses appels à la non-violence dans toutes les formes de conflits ; sa présence visible parmi des communautés clairement marginalisées ; et son choix de la simplicité dans son style de vie personnel. Ils applaudissent l’appel lancé par son encyclique Laudato si’ à prendre soin de notre terre. Ils reconnaissent le courage dont il a fait preuve pour admonester et révoquer des évêques et cardinaux qui font étalage de richesse, et pour demander aux responsables de l’Eglise qu’ils se consacrent à une approche pastorale plutôt que bureaucratique. Ils apprécient le fait que le Pape ait porté son attention sur des régions sous-représentées de la planète pour y nommer de nouveaux cardinaux, et pour avoir privilégié les compétences pastorales dans le choix des nouveaux évêques. Ils soutiennent les tentatives qu’il a réalisées pour ouvrir un dialogue sur des questions d’une importance toute particulière pour les jeunes et les familles, ainsi que pour avoir appelé des membres ordinaires de l’Église à contribuer à la préparation du synode. Nos groupes approuvent les efforts du Pape pour améliorer la responsabilité comptable en matière de gestion financière de l’église, ils se réjouissent de son engagement respectueux auprès des responsables d’autres religions.
Mais ils expriment une profonde déception à propos de l’absence de changements effectifs dans les domaines qui concernent la politique et les dogmes de l’Église, et à propos de l’opposition que les tentatives de réforme du Pape ont rencontrée au sein de la curie. Ils remarquent que le Peuple de Dieu reste exclu des instances de décision à tous les niveaux, et que l’appel du Pape au dialogue n’a été pris nulle part en considération. Ils remarquent aussi qu’il n’y a eu aucun mouvement significatif face à l’inégalité qui affecte les femmes dans l’Église, en dépit de la création d’une commission pour étudier la question du diaconat pour les femmes. Le Pape a maintenu l’accent porté par l’Église sur le principe de complémentarité qui prescrit les rôles respectifs des hommes et des femmes sur la base de leur genre ; il a maintenu la reconnaissance exclusive du mariage permanent entre un homme et une femme dans la perspective de la procréation et de l’éducation des enfants. Cela signifie que les divorcés, remariés, concubins, LGTBI, ainsi que ceux qui utilisent des contraceptifs, ceux qui bâtissent une famille grâce aux techniques de reproduction assistée, ou encore ceux qui ont eu recours à l’avortement, se retrouvent souvent exclus d’une pleine participation à la vie de l’Église. Le Pape a créé une commission pour s’occuper du problème des abus sexuels de la part du clergé. Mais l’opposition qu’elle a rencontrée de la part des membres de la curie l’ont empêché d’accomplir sa mission, ce qui a amené l’un des plus vigoureux avocats de la cause des victimes d’abus sexuels – lui-même d’ailleurs ancienne victime de ces abus – à démissionner en signe de protestation, et conduit la commission à perdre une bonne part de son autorité. Certes la commission a été reconstituée, mais beaucoup considèrent qu’elle l’a été avec des personnes qui n’ont plus les capacités de défier l’autorité religieuse. L’Église devrait abandonner les procédures de condamnation et d’excommunication et manifester plus d’ouverture envers un pluralisme, particulièrement en théologie. L’unité des Églises reste bloquée par l’attitude de notre Église qui refuse le partage de la communion. Enfin, WAC-I et EN-RE remarquent qu’en dépit de nombreuses invitations le Pape n’est pas parvenu à rencontrer les responsables des réseaux qui militent pour la réforme et le renouveau de l’Église afin d’aborder avec eux les questions qui les préoccupent.
‘’Nous Sommes Église’’ (WAC-I) et le ‘’Réseau Européen Églises et Libertés’’ (EN-RE) appellent le Pape François à renouveler son engagement à réaliser les réformes globales dont notre Église a besoin pour se libérer des rigidités de la tradition hiérarchique et à y impliquer de plus en plus les laïcs – et tout particulièrement les femmes ; à faire en sorte que l’Église vive de plus en plus de l’évangile dans un monde exposé à de profondes situations de conflits et de désarroi. Nous prions pour que ce cinquième anniversaire marque un temps de renouveau radical pour notre Église.
Contact: Marianne Duddy-Burke, U.S.A., media@we-are-church.org, +1 6176697810
Contact: Raquel Mallavibarrena, Spain, rmallavi@gmail.com, +34 649 332 654
Le ‘’Réseau Européen Églises et Libertés’’(European Network Church on the Move – EN-RE) est un rassemblement spontané d’organisations, associations, communautés, groupes informels et réseaux de chrétiens européens, en majorité catholiques, qui partagent (1) la vision d’une église prophétique, œcuménique, libératrice, aimante qui n’exclut pas et ne discrimine pas, et qui suit les traces de Jésus le libérateur et (2) qui a la volonté de travailler dans le respect des diversités culturelles et religieuses au développement de la paix, la justice, la liberté, des droits humains et de la démocratie, y compris au sein de l’Église Catholique (Déclaration des Droits et Libertés dans l’Église Catholique – Réseau Européen Églises et Libertés – 1994. http://www.en-re.eu/index.php)
Nous Sommes Église – International (WAC-I), fondée à Rome en 1996, est une coalition de groupes nationaux visant au renouvellement de l’Église Catholique Romaine sur la base des décisions du concile de Vatican II (19962-1965) et des recherches théologiques qui en découlent. https://www.we-are-church.org/413/index.php
(Traduit de l’anglais par Jean-Marie Dumortier)