Par Phyllis Zagano

La combinaison des verrouillages pandémiques et de Zoom a donné naissance à une nouvelle façon d’être catholique. Ou, plutôt, ils ont donné naissance à une nouvelle façon d’apparaître catholique. Nous nous dirigeons vers un métavers catholique.
Un métavers, ou « méta-univers » [1] est un monde virtuel, comme ceux qui existent dans les jeux de réalité virtuelle tels que Roblox, Minecraft et Fortnight, où les individus existent en tant qu’avatars, ou icônes tridimensionnelles d’eux-mêmes. Ces jeux sont les précurseurs d’un monde virtuel encore plus vaste, où les individus seraient en mesure de cacher leur identité, d’interagir et de présenter leurs points de vue de façon anonyme.
L’avenir, cependant, est à notre porte. Aujourd’hui, il est possible d’être où l’on veut, de dire ce que l’on veut et de trouver des personnes partageant les mêmes idées que soi, voire de pratiquer un culte, le tout dans le cocon de l’anonymat.
Le mot « paroisse » a pris un nouveau sens.
Avant la pandémie, les gens choisissaient les paroisses en fonction de ce qu’ils aimaient et n’aimaient pas : la communauté, l’emplacement, le pasteur et les liturgies, à peu près dans cet ordre.
Aujourd’hui, la bonne nouvelle est une mauvaise nouvelle. On peut facilement faire du shopping.
La communauté n’a rien à voir avec cela. L’emplacement ne présente que des considérations temporelles : Dans quel fuseau horaire se trouve la paroisse ? C’est le pasteur et ses liturgies qui font ou défont le choix. Tridentine ou novus ordo ? Des homélies intelligentes ? Des servantes d’autel et des lectrices ?
La communauté est de plus en plus déconnectée de la vie paroissiale, tant en ligne qu’en présentiel. Alors qu’autrefois l’église paroissiale était celle du quartier, où les repas-partage du vendredi contribuaient à cimenter l’interaction sociale, aujourd’hui la « paroisse » est virtuelle. La communauté se trouve dans un métavers catholique créé par les médias sociaux, dans lequel vous pouvez participer de manière anonyme. Ou non.
La plupart des gens sont familiers avec les moyens de Facebook, Twitter, Instagram et autres. Ce qu’ils ne voient peut-être pas, même s’ils y participent, c’est la concrétisation sur ces plateformes de communautés virtuelles distinctes. Chaque communauté virtuelle a un objectif et une éthique différents. Chacune a une vision différente de l’enseignement et de la discipline de l’Église. Aucune n’est contrôlée par Rome.
Nous n’en sommes pas encore là, mais à l’horizon se profile une réalité virtuelle qui va bien au-delà des messes en ligne et des combats catholiques sur Twitter. Nous sommes à l’aube d’un véritable métavers, petit-fils d’Internet, qui s’étend pour englober plus que des mots et des images. Nous assistons à un développement des plateformes de jeux en ligne qui permettra aux personnes – en tant qu’avatars – de se déplacer d’une plateforme à l’autre. Les individus n’auront plus besoin de profils Facebook, de pseudos Twitter et de comptes Internet distincts. Ils pourront s’inventer, exister dans le monde virtuel et se déplacer (virtuellement) en temps réel, en toute transparence d’une plateforme ou d’une communauté à l’autre.
Le métavers ne sera pas un jeu. Il s’agira d’une réalité alternative. Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, affirme que d’ici cinq ans environ, Facebook sera une « entreprise métaverse », un « internet incarné ». Il prédit « un environnement synchrone persistant » dans lequel les utilisateurs seront incarnés sous forme d’hologrammes. L’objectif est de créer une communauté.
Comment ? Selon M. Zuckerberg, l’objectif actuel de la recherche est d’offrir un sentiment de présence beaucoup plus fort, une façon plus naturelle d’interagir. Pensez-y comme une nouvelle façon d’être présent aux autres, un Zoom tridimensionnel, avec son d’ambiance et holographies, auquel vous pouvez accéder partout.
La religion est comprise dans les plans. Facebook s’est déjà associé à des communautés religieuses, telles que la méga-église Hillsong d’Atlanta, les Assemblées de Dieu et l’Église presbytérienne (É.-U.). L’entreprise crée des produits pour les églises, notamment le partage d’audio et de prières et des outils en ligne pour créer des rassemblements à l’aide de Facebook.
En faisant de Facebook une entreprise métaverse, Zuckerberg prédit encore plus. Sa vision est celle d’un véritable métavers, où les plateformes de différentes entreprises seront compatibles et qui comprendra des espaces publics et des systèmes sociaux accessibles à tous, y compris les églises.
Cela se passera dans le futur. Ce qui nous attend aujourd’hui, c’est l’accès à distance au culte, à la direction spirituelle, à la prédication, à l’étude de la Bible, aux activités sociales après l’office, à peu près tout ce que la paroisse en personne peut offrir en termes d’information et d’interaction. L’accès à distance permet aux gens de choisir qui ils veulent écouter et avec qui ils veulent interagir. On en arrive au point où la réalité et la fiction catholiques sont en concurrence.
La question est la suivante : Y aura-t-il un Metaverse catholique contrôlé par Rome ? Ou bien les diverses communautés virtuelles catholiques continueront-elles à se développer dans leurs propres directions ? Et puis, il y a le grand « si » dans tout cela : Qu’arrivera-t-il aux sacrements ?
Un jour, la pandémie sera maitrisée. Mais l’Église est en train de changer. Elle ne sera plus l’église catholique de votre grand-père. Elle ne l’est déjà plus.
Note :
[1] Le métavers (de l’anglais metaverse, contraction de meta universe, c’est-à-dire méta-univers) est un monde virtuel fictif décrit dans le roman Snow Crash (Le Samouraï virtuel), paru en 1992, de Neal Stephenson.
Ce monde virtuel, créé artificiellement par un programme informatique, héberge une communauté d’utilisateurs présents sous forme d’avatars pouvant s’y déplacer et y interagir.
Source : https://www.ncronline.org/news/opinion/just-catholic/virtual-reality-and-coming-catholic-metaverse