Dieu Trinité
Par Roger Sougnez (Extrait de son livre « De la prêtrise à l’abandon des dogmes » Ed.Golias)
Le christianisme se distingue des autres religions monothéistes du fait qu’il est le seul à prétendre que Dieu est Trinité, c’est-à-dire trois personnes : le Père, le Fils et le Saint-Esprit, parfaitement égaux, de même nature et ne formant qu’un seul Dieu.
C’est tout à fait incompréhensible et l’Église le reconnaît. Elle parle de mystère insondable et de la nécessité de croire sans comprendre.
Une littérature religieuse incommensurable tente, depuis des siècles, de préciser la nature des rapports entre ces personnes. J’épargne au lecteur les termes théologiques et leur explication : procession, spiration, génération, périchorèse (ce qui est propre à chaque personne), appropriation, missions, etc.
Dans le Nouveau Testament, on ne rencontre ni le mot Trinité ni un concept équivalent.
Les mots Père, Fils, Esprit (les manuscrits grecs sont entièrement en majuscules) qui se répètent dans les évangiles doivent être compris au sens large et non pas au sens théologique actuel comme une évocation de la Trinité divine.
Jésus emploie l’expression fils de l’homme pour parler de lui (Mt 9.6, / /Mc 2.10). Rappelons qu’il appelle Père l’énergie intérieure dont il tire son inspiration et sa force.
Le mot grec pneuma qui signifie souffle, vent, esprit, haleine, nous fait penser aux multiples sens et nuances de notre mot esprit : souffle, pensée, siège de la pensée, siège de la vie, âme, être immatériel, fantôme, caractère, notre état d’esprit, etc.
Dans l’élaboration théologique qu’est l’évangile de St Jean, nous pouvons lire : « Le paraclet, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom vous enseignera toutes choses et vous fera ressouvenir de tout ce que je vous ai dit » (14. 26′) ce qui peut être compris : « Même après ma mort, le souvenir de ce que j’ai dit et fait continuera à se développer et à vous inspirer ».
Il convient de prendre également fils de Dieu au sens large.
Les évangélistes situent ces paroles de Jésus après sa résurrection : « De toutes les nations, faites des disciples, les baptisant, au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit » (Mt 28.19) et le seul passage parallèle en, Mc 16.15,16 cc « Allez (…) proclamez l’évangile […] Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé », ils nous induisent en erreur : Jésus n’a pas prononcé ces paroles puisqu’il n’est pas ressuscité.
Remarquons que, dans le passage de Marc, il n’y a pas d’allusion au Père, Fils et Saint-Esprit.
Voici le credo qui est encore récité aujourd’hui à chaque messe du dimanche :
Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible.
Je crois en un seul Seigneur, Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu. Né du Père avant tous les siècles : il est Dieu, né de Dieu, Lumière, née de la Lumière, Vrai Dieu, né du vrai Dieu, engendré, non pas créé, de même nature que le Père, et par lui tout a été fait.
Pour nous les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel. Par l’Esprit Saint Il a pris chair de la Vierge Marie, et s’est fait homme. Crucifié pour nous sous Ponce Pilate, Il souffrit sa passion et fut mis au tombeau. Il ressuscita le troisième jour, conformément aux Écritures, et il monta au ciel. Il est assis à la droite du Père. Il reviendra dans la gloire, pour juger les vivants et les morts et son règne n’aura pas de fin.
Je crois en l’Esprit Saint, qui est Seigneur et qui donne la vie ; il procède du Père et du Fils ;
II reçoit même adoration et même gloire ; il a parlé par les prophètes.
Et voici un passage du credo du peuple de Dieu, prononcé solennellement par le pape Paul VI le 30 juin 1968 :
« Nous croyons donc au Père qui engendre éternellement le Fils, au Fils, Verbe de Dieu, qui est éternellement engendré, au Saint-Esprit, personne incréée qui procède du Père et du Fils comme leur éternel amour. Ainsi en les trois personnes divines, ‘’coaetermaesibi et caequales’’ (co-éternelles et co-égales à elles-mêmes), surabondent et se consomment, dans la surexcellence et la gloire propres à l’être incréé, la vie et la béatitude de Dieu parfaitement un, et toujours doit être vénérée l’unité dans la trinité et la trinité dans l’unité ». ???
Ce serait le philosophe français très conservateur Jacques Maritain qui aurait composé en grande partie ce credo terriblement rétrograde de Paul VI en réaction aux positions de l’Église, trop « ouverte » à ses yeux, surtout après le concile, et le pape le reprit à son compte. À l’âge de 84 ans, il avait publié en 1966 « Le paysan de la Garonne », « une critique impitoyable de l’Église postconciliaire à genoux devant le monde.
Il faut oser briser le puissant tabou et reconnaître qu’il n’y a pas de Sainte Trinité.
S’il y avait une Réalité absolue, elle serait unique, elle ne pourrait être plusieurs personnes avec des attributions particulières. Tous les autres monothéistes qui rejettent farouchement l’idée de Trinité l’ont bien compris.
Il serait grand temps de reconnaître que cette idée de Trinité est née, s’est développée petit à petit chez des croyants, tout en étant contestée par d’autres, à partir de ces appellations éparses, et aux sens divers, dans le Nouveau Testament : le Père, le Fils de Dieu, l’Esprit. Il n’est pas nécessaire d’être grand théologien, de développer des arguments compliqués pour arriver à la conclusion qu’il n’y a pas de Dieu Trinité. Tout un chacun peut s’en rendre compte en prenant la peine d’y réfléchir. On parle de mystère ? Oui, il peut y avoir des réalités, des choses qui nous dépassent, mais, ici, il y a des contradictions internes irrémédiables comme de dire qu’un rond est carré et nous constatons tous les piteux essais d’explication ; l’embarras et le galimatias des deux « credo» cités plus haut le révèlent suffisamment.
Ainsi Jésus de Nazareth serait le Fils unique de Dieu : « il est né», donc il n’est pas éternel, il n’existait pas auparavant. Comment comprendre ce qui suit : Un Dieu Absolu, éternel, qui engendre un autre Dieu rigoureusement égal à lui-même ? Oui, dans les mythologies antiques, un dieu pouvait engendrer un autre dieu, mais que représentaient ces dieux de pacotille ? Ici, il s’agirait du Véritable Dieu.
L’Esprit Saint procède du Père et du Fils. Rappelons la dissension entre les chrétiens latins et les chrétiens grecs ; pour les premiers, le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, pour les seconds, du Père seul.
On peut l’envisager comme on veut, cette conception de trois personnes ayant bien leur individualité qui ne sont qu’un seul Dieu est intenable.
Estimer que c’est tellement mieux que Dieu ne soit pas un froid solitaire, mais trois personnes fusionnées dans un merveilleux échange d’amour est encore une projection anthropomorphique. Un Dieu unique pourrait être océan d’amour. Que devraient alors penser les juifs et les musulmans de leur Dieu, une seule personne, Yahvé et Allah?
La littérature religieuse utilise très souvent la logomachie ; en voici un exemple pour notre sujet :
« Si la connaissance réciproque du Père et du Fils s’ouvre sur un troisième, il n’y a pas d’avoir : la pauvreté est absolue…
Ainsi notre Dieu est-il le mystère triforme d’un amour absolu ? C’est un Dieu «ouvert». Chaque personne n’est en soi qu’en étant hors de soi. Leur extase est parfaite en ce que l’impossibilité de repli sur soi est absolue. » (F.Varillon, L’humilité de Dieu, p.107-108) (…)
S’il paraît si difficile d’abandonner cette invraisemblance de trois personnes qui ne sont qu’un seul Dieu, ce n’est pas parce qu’il s’agirait d’une réalité indubitable, mais cela est dû à la force de l’habitude, parce que le catholicisme a fait de cette croyance en la Sainte Trinité sa marque distinctive, son signe essentiel de ralliement exprimé par le signe de la croix constamment utilisé : « Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ». Elle est omniprésente dans les prières, la liturgie et la littérature religieuse, profondément incrustée dans l’esprit des croyants. Ils la professent machinalement sans s’être jamais interrogés sur sa pertinence. Tôt ou tard, il faudra bien qu’on admette l’évidence.
CONCLUSION
Je me rends compte que l’idée qu’on se fait de Dieu est une simple construction humaine et je ne crois plus en l’existence des dieux des religions.
« Le mot Dieu n’est pour moi rien de plus que l’expression et le produit des faiblesses humaines, la Bible un recueil de légendes, certes honorables, mais primitives qui sont néanmoins assez puériles. Aucune interprétation, aussi subtile soit-elle, ne peut selon moi changer cela. » (Albert Einstein)
Source : http://librepenseechretienne.over-blog.com/2022/09/dieu-trinite-roger-sougnez.html
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