Jésus le nazaréen visage humain de Dieu
Michel Leconte.
Effectivement, Jésus annonçait un Dieu proche et bienveillant envers les humains. Mais ceci était le résultat de son action de libération envers ceux que la religion de ce temps opprimait et aliénait avec ses nombreux rites de purification dont beaucoup étaient exclus. Jésus guérissait les malades dont les religieux croyaient qu’ils l’étaient à cause de leur péché, Jésus n’hésitait pas à se rendre impur lui-même en touchant et en se laissant toucher par des gens dont le livre du Lévitique ordonnait de s’en tenir écarté. Jésus partageait ses repas avec les pécheurs et les collecteurs d’impôts qui étaient méprisés par les bien-pensants et les hommes de religion. C’est ainsi que Jésus libérait les exclus afin qu’ils puissent avoir accès au Dieu bienveillant qui était le sien et accéder ainsi à une vie meilleure.
Un homme de Galilée
Il ne faut pas renverser le problème en partant de l’idée que le but de Jésus était, de toute éternité, de nous révéler un Dieu proche des hommes. Que savons-nous des intentions de Dieu ? En faisant cela, on déshumanise Jésus en faisant comme s’il avait connu sa mission avant même sa naissance dans sa préexistence de Fils éternel au sein de la Trinité. Durant sa vie cachée, il découvrit lui-même le sort injuste qui était réservé à certains membres de son peuple et on élimine la tension entre le Christ ressuscité et l’homme de Galilée qui mourut assassiné par les autorités religieuses du Temple de Jérusalem.
Jésus est déjà hors de l’histoire par la conscience divinement omnisciente que lui prête cette interprétation théologique. Non, l’homme de Nazareth a progressivement découvert sa mission en constatant l’état de servitude et d’aliénation qui était réservé aux pauvres de son temps. C’est d’abord par sa praxis libératrice que Jésus nous révèle un Dieu proche des humains. Sur la croix, Jésus ira jusqu’à être identifié à tous les rejetés et les parias du monde, car il va mourir comme « un maudit » ainsi que Paul l’affirme dans son épître aux Galates 3, 13 : « maudit est celui qui est pendu au bois. »
Jésus n’est pas venu du ciel
Il ne faut pas faire de Jésus un être céleste descendu sur terre, car il fut un homme comme nous – porteur de l’Esprit de Dieu avec une intensité d’exception – qui eut à découvrir son chemin dans la contingence de son être et de son époque. Autrefois, on disait qu’il était venu souffrir et mourir pour sauver les hommes ; dire que sa mission était de nous révéler un Dieu aimant procède de la même théologie abstraite bien que le résultat soit plus en harmonie avec son action et sa prédication.
Je pense que cet oubli de l’épaisseur humaine de Jésus provient de ce que l’on a fait de lui le Fils Éternel descendu du ciel pour accomplir une mission conçue de toute éternité par Dieu, mission qu’il n’avait plus qu’à exécuter fidèlement et conformément à la volonté du Père. Il y a là un docétisme monophysite caché qui nie la véritable humanité de celui que ses disciples ont reconnu comme le Christ. Le Dieu transcendant est présent en nous comme il était présent en Jésus. C’est dans l’après-coup et la mémoire de ce que fut la vie et les choix de Jésus que les pèlerins d’Emmaüs ont pu reconnaître celui que Dieu avait ressuscité.
http://protestantsdanslaville.org/gilles-castelnau-libres-opinions/gl1731.htm