« Dieu se rencontre sur la route, en marchant. Il est toujours une surprise »
Bernard Ginisty.
Au début de son pontificat, le pape François définissait ainsi le chemin spirituel : « Dieu, écrit-il, se rencontre dans l’aujourd’hui. (…) Bien sûr, dans ce chercher et trouver Dieu en toutes choses, il reste toujours une zone d’incertitude. Elle doit exister. Si quelqu’un dit qu’il a rencontré Dieu avec une totale certitude et qu’il n’y a aucune marge d’incertitude, c’est que quelque chose ne va pas. C’est pour moi une clé importante. Si quelqu’un a la réponse à toutes les questions, c’est la preuve que Dieu n’est pas avec lui, que c’est un faux prophète qui utilise la religion à son profit. (…) Notre vie ne nous est pas donnée comme un livret d’opéra où tout est écrit ; elle consiste à marcher, cheminer, agir, chercher, voir. (…) Dieu se rencontre sur la route, en marchant. (…) Dieu est toujours une surprise. On ne sait jamais où ni comment on Le trouve, on ne peut pas fixer les temps ou les lieux où on Le rencontrera ».
Nouveau responsable d’une Église catholique qui n’a pas toujours su résister au cours des siècles au cléricalisme et au fondamentalisme, il exprime sa vision de l’Église, celle « d’un hôpital de campagne ». « Je vois avec clarté, écrivait-il, que la chose dont a le plus besoin l’Église aujourd’hui, c’est la capacité de soigner les blessures et de réchauffer le cœur des fidèles, la proximité, la convivialité. Je vois l’Église comme un hôpital de campagne après une bataille. Il est inutile de demander à un blessé grave s’il a du cholestérol ! Nous devons soigner ses blessures (…) L’Église s’est parfois laissé enfermer dans les petites choses, les petits préceptes. Le plus important est la première annonce : Jésus-Christ t’a sauvé. Et il poursuit : Si le Chrétien est légaliste ou cherche la restauration, s’il veut que tout soit clair et sûr, alors, il ne trouvera rien ». [1]
Nos sociétés sont en deuil des certitudes que les grands prêtres des idéologies communistes ou capitalistes ont distillés tout au long du 20e siècle. Ils tentent aujourd’hui d’embrigader les religions pour tenter de « sacraliser » leurs projets nationalistes et impérialistes. Et il faut bien constater que ces nouvelles alliances entre « Dieu et César » trouvent des échos chez certaines hiérarchies des Églises nationales ou « évangéliques ».

Face à ces dérives, ce propos du théologien jésuite Joseph Moingt est d’une grande actualité : « Je vois l’avenir de l’Église dans de petites communautés, où il y aurait des chrétiens et des non-chrétiens, qui ensemble réfléchiraient à leurs problèmes en lisant l’Évangile et apprendraient ou réapprendraient ainsi un vivre ensemble auprès de Jésus, ce qui serait déjà une vie en Église. Je pense que l’Église repartira comme cela, et en s’ouvrant sur la société au lieu de se refermer sur elle-même (…). On n’est plus dans la situation où les fidèles ne pouvaient entendre l’Évangile que dans l’acte hiérarchique du clerc qui leur en faisait la lecture et leur dictait ce qu’ils devaient comprendre. Ils sont en voie de prendre leur responsabilité de leur être chrétien, de se définir par rapport à l’Évangile et de prendre aussi la responsabilité de leur être en Église » [2].
[1] Pape FRANÇOIS (1936-2025) :Extraits de l’entretien accordé aux revues intellectuelles jésuites européennes et américaines publiés dans le journal La Croix du 20 septembre 2013, pages 2 à 5. [2] Joseph MOINGT (1915-2020) : Croire quand même. Libres entretiens sur le présent et le futur du catholicisme, éditions Temps Présent, 2010, pages 95 et 184.



