Partenia 2000 : une histoire
L’association a décidé de sa dissolution, lors d’une Assemblée générale extraordinaire, le 13 mars dernier. Le compte-rendu en est publié dans « Feu la lettre de Partenia». Nous reproduisons ici l’historique de cette belle association, dont NSAE a toujours été proche.
Par Hélène Dupont
Tout a commencé l’été 1995 quand 9 amis de Jacques Gaillot – Gabriel Marc, Pierre Pierrard, Daniel Duigou, Gabriel Ringlet, Michel Pinchon, Hyacinthe Vulliez, Jacques Bayet, Jean-Claude Petit et Georges Levesque – ont fondé le premier PARTENIA 2000 en cercle fermé pour demander sa réhabilitation et l’accompagner après son départ d’Évreux.
Mais en 1996 ils ont convoqué une assemblée générale, ouverte à tous, où se pressait une foule considérable d’amis de Jacques Gaillot venus de partout exprimer leur révolte de la décision d’exclusion du 13 janvier 1995. Ce jour-là les neuf fondateurs ont démissionné, mais Pierre Pierrard, ami fidèle de toujours, est resté pour participer à une association ouverte à tous. Dans un certain désordre s’est créé un bureau conforme à la Loi de 1901 pour toute association laïque. Plusieurs présidentes éphémères se sont succédé après Anne-Marie Martial jusqu’à l’arrivée de Claudine Gadenne. Pendant ce temps, Jacques Gaillot vivait dans le squat de la rue du Dragon.
L’association est logée quelque temps dans le 17e, rue Cardinet, puis migre au cœur du 12e, rue d’Aligre, dans un squat plus conforme à son idéal d’être avec des exclus : là vivaient des sans-papiers de toutes origines que nous aidions à faire des dossiers pour tenter de régulariser leur situation. Jacques était là chaque matin pour accueillir ces personnes avec André Buyck, Claudine Gadenne (présidente) et Lucienne Buton. Un lieu de vie très dynamique jusqu’en juin 2003 où la police a fait évacuer ce lieu si vivant et en a muré tous les accès. De ce fait ont été perdus tout le contenu de nos ordinateurs et toutes les archives de PARTENIA. Après quelques années d’errance dans des locaux de la mairie du 12e, nous avons été accueillis pour nos réunions chez les Spiritains où Jacques vivait déjà et Gérard Warenghem, lui-même Spiritain, qui nous avait rejoints rue d’Aligre, nous a ouvert les portes de sa maison qui nous accueille encore aujourd’hui.
Après un bref relais de Monique Hue, la présidence revient à Marc Petitjean qui a eu le mérite de redresser les finances de l’association avant l’élection de Gérard Warenghem.
Gérard a été pendant plus, de 12 ans un président, exceptionnellement dynamique qui nous a sensibilisés, au-delà des « sans-papiers », à toutes les misères du monde, il nous a fait connaître sa famille africaine et pas seulement du Gabon où il a vécu 20 ans. Son blog, chaque semaine, nous donnait toutes les nouvelles du monde tandis que le site « PARTENIA » ouvert par Katharina Haller pour Jacques Gaillot offrait au monde entier le contact avec Jacques. Celui-ci était en permanence aux côtés des exclus en France et dans le monde, auprès des Kurdes en Turquie, à Cuba comme au Pays Basque ou au Canada, toujours proche des prisonniers et des gens de la rue. Pendant ce temps l’association, ou individuellement des particuliers, ne manquaient pas une occasion de solliciter le Vatican ou l’épiscopat pour demander la « réhabilitation » de Jacques… peine perdue jusqu’à l’avènement du pape François qui l’a invité à une visite « fraternelle », accompagné de Daniel Duigou, le 1er septembre 2015 à la veille de ses 75 ans. Bien qu’informelle, cette invitation valait bien toute réhabilitation ! Cette même année nous avons fêté les 20 ans de PARTENIA très solennellement dans la mairie du 5e, mais malheureusement nous avions accompagné quelques jours plus tôt Gérard Warenghem dans sa dernière demeure. Allait-on pouvoir continuer sans lui ? Tous ses codes et contacts informatiques disparus avec lui…
Nous avons continué vaille que vaille pendant 5 ans grâce à l’énergie de Jean Garnier qui avait été très proche de Gérard au long de ses derniers mois. Annonçant ses 90 ans, l’an dernier, il reste vice-président, mais laisse toute la responsabilité à Jean-Pierre Maillard, président jusqu’à ce jour où nous voici réunis pour remercier Jacques Gaillot de nous avoir permis de suivre sa route pendant 25 ans.
Nous avons décidé de faire cesser l’existence formelle de PARTENIA 2000, l’esprit de PARTENIA restant toujours vivant : « lutter contre l’exclusion dans la société… », esprit que chacun de nous porte en lui partout où il vit…
Complément par Jean Garnier
Je complète ce que vient d’écrire très bien Hélène, c’est au sujet du rôle de Gérard Warenghem auquel j’ai succédé à la suite de son décès en 2015. Il était conscient du rôle des femmes dans l’Église catholique : n’a-t -il pas fondé au Gabon des communautés de bases [1] dirigées par des femmes ?
C’est lui qui a attiré notre attention sur ces femmes du comité de la Jupe manifestant devant la gare Montparnasse ou devant le siège de la CEF, prémisses de la CCBF fondée en 2009, on doit en retrouver les vidéos sur son blog qu’il tenait avec talent et diffusait. Enfin très impliqué dans l’émergence des sociétés civiles en Afrique [2] il nous présentait (comme son montage graphique qu’il nous exposait régulièrement) comment notre société européenne pompait (au sens strict et figuré) les ressources minières de l’Afrique sans retombée financière sur leur population si ce n’est sur leurs gouvernements corrompus ce qui a joué un rôle non négligeable dans son éviction de son activité missionnaire au Gabon. C’est pour cela que Partenia 2000 est membre du collectif français Publiez Ce Que Vous Payez membre lui-même du réseau international Published What You Pay. La dissolution de Partenia 2000 fera perdre un soutien à ce réseau. Enfin toujours sous la férule de Gérard nous étions membres comme association du réseau européen Églises et libertés.
Notes :
[1] Gérard Warenghem, La joie de vivre en communauté, L’Harmatan, 2003 et http://joie2.over-blog.com
[2] Soutien aux sociétés civiles émergentes en Afrique, à l’initiative de Gérard Warenghem, Parvis hors-série n° 23.