ASSOMPTION DE MARIE
Par François Cassingena-Trévedy
Quoi de plus merveilleux pour notre imagination, pour notre rêve, pour le pinceau du peintre, de tant de peintres, que cette Femme qui monte, impondérable (ou parfois trop en chair), par un escalier évanescent de nuages et d’anges et de roses ? Et le pinceau des peintres est si puissant qu’il a donné, à la longue, je ne sais quelle consistance, je ne sais quelle solidité, en nous, à ces images. Ces images dont notre foi a besoin, et dont le langage des Saintes Ecritures lui-même est rempli. L’Assomption, saisie au vol par les artistes, est une fête pour le regard. L’une des fêtes liturgiques les plus hautement « esthétiques » de l’année, ce qui n’est pas indifférent, sans doute, à sa popularité.
La réalité historique est néanmoins plus humble, plus ordinaire, plus obscure, le fond théologique de l’événement plus austère. Rencontre de la mère et de la mort, tout simplement.
Cette rencontre dont tout fils est un jour le témoin.
La Mère morte : de quoi contempler longuement, en se souvenant de la sienne… Je veux dire que chacun peut se souvenir de sa propre mère, et de sa propre mort. « Et nunc et in hora mortis nostrae ».
Il n’est d’assomption de Marie que son assomption dans la difficile aventure pascale de son Fils et dans l’intimité de ce Père que l’homme Jésus, son Fils, lui a appris sans doute à prier, à elle aussi. Marie n’a pas vécu sur un nuage.
Nous ne sommes pas non plus sur un nuage. Tant d’hommes sont confondus en dévotion pour la Femme idéale, lointaine, inoffensive aussi… et, malgré cela, méfiants, indélicats, indifférents, voire goujats, envers les femmes réelles… Comme si un extrême appelait d’autre, se nourrissait de l’autre.
Assomption, cinquième mystère glorieux. Fruit – actualisé – du mystère : « assomption » de la femme dans le ciel des préoccupations concrètes de l’Église ; « assomption » de la femme dans le paysage ecclésial courant (et pas seulement symbolique) ; « assomption » de la femme dans un « ministère » ecclésial repensée de fond en comble.
Tant de femmes qui, aujourd’hui, de par le monde, malgré tant de promotions rêvées, contrariées ou tapageuses, ne sont pas sur un nuage…
Assomption de Marie, « corps et âme »… Et de fait, tant d’Assomptions peintes, tant de Madones peintes sont étonnamment charnelles!
« Corps et âme », disons-nous…
Et néanmoins le corps – le corps réel – est encore tellement absent de nos préoccupations, de notre spiritualité, de notre théologie, de nos formations à la vie religieuse et aux ministères ordonnés, de notre foi mythologique et désincarnée…
Pour le corps des femmes outragé par des mariolâtres pervers, pardonne-nous, Seigneur!
Ces pensées-là aussi, ces pensées graves, peuvent être un fruit pratique du mystère de l’Assomption.
Source : https://www.facebook.com/francois.cassingenatrevedy?tn=%2CdCH-R-R&eid=ARDtcCvXcte4P1459RT8m-QyQj5DHdflV3gEs70FG2u60DmsOudBW4eGdlb5rDg5TYsIfJAGcg_3Y0hP&hc_ref=ARSVYtScM4HTARCcuovDL_CpFiQ3u956S4bydMsYuR6rEDFYaQxc8bOAIMILdgo_Ar8&fref=nf