Par Jean-Luc Lecat

Arrêtons de nous user en vain.
Abraham partit sans savoir où il allait… tout laisser, tout quitter… tout ! Lâcher tout… paroles chantées avec enthousiasme quand j’avais 20 ans…
Arrêtons de nous user à vouloir restaurer l’Église, à vouloir lui donner un nouveau visage.
Arrêtons de passer des réunions entières, beaucoup de nos repas en commun, et nombre de nos discussions à chercher une autre organisation, à inventer comment ne pas bloquer le curé ou subir les interdits de l’Évêché…
Arrêtons d’épuiser nos énergies à parler de la boutique, des différences entre laïcs et prêtres, laissons les justifications comme les interdits théologiques, laissons tout cela, sans fanfaronnade comme sans mépris.
C’est fini… Osons « secouer la poussière de nos souliers » comme Jésus y encourageait ses disciples, et Église partir sans savoir où cela nous emmène, partir sans autres bagages que notre choix en Jésus-Christ et sa parole, partir sans nos cérémonies et sans l’accord d’un prêtre, d’un évêque ou même d’un pape, même si son nom est François. Risquons le départ, mais sans quitter la main d’autres personnes qui, comme nous, sont prêtes à avancer en eau profonde… je trouve cela terriblement insécurisant ! … mais n’est-ce pas nécessaire ?… « Pour notre salut et pour le salut du monde », comme nous le disons dans une des prières eucharistiques ?
Bâtir l’Église n’est pas un but ! consolider l’Église n’est pas un but ! renouveler l’Église n’est pas un but ! L’Église n’est pas un but.
Le but n’est-ce pas un monde debout ? Un monde bien vivant ? « Un monde ressuscité » ? « La gloire de Dieu c’est l’homme vivant », disait déjà Irénée de Lyon au 2e siècle.
Ce qui importe avant tout, me semble-t-il, c’est de vivre dans ce monde, éclairés par la parole et la rencontre de Jésus et l’écoute de son Esprit. Or ceci ne peut se vivre en vérité qu’en nous fortifiant et en nous confrontant à la démarche d’autres femmes et hommes qui, comme nous et avec nous, sont prêts à avancer, tel Abraham acceptant l’appel intérieur, sans savoir où cela nous mène.
Alors concrètement qu’est-ce que ça peut vouloir dire ?
- Renoncer à notre assistance dominicale hebdomadaire, et à toute activité ayant pour but de faire vivre ou fortifier l’Église, ses rites, ses impératifs, ses temps forts, non pas par mépris, par hauteur, ou par agressivité, mais pour cause d’inutilité : nous gaspillons nos forces et nous privons les humains, nos frères, de ces forces que nous pourrions utiliser pour participer, au milieu d’eux et avec eux, à tout ce qui fait notre vie de personnes privées comme de citoyens d’ici et du monde.
- Nous retrouver régulièrement avec d’autres personnes prêtes à vivre la même démarche afin de rester enracinés dans la parole partagée autour de la fraction du pain. Ayons-en l’exigence, cela me semble vital.
- Investir, à notre mesure, les forces vives qui sont en nous en tout domaine qui nous rejoint le mieux ou le plus : familial, social, culturel, économique, scolaire, international, humanitaire, écologique….
- User de notre temps, de notre énergie, de notre foi dans les actes sociaux majeurs que sont la naissance, l’école, les loisirs et la culture, les unions de couple, la maladie, les décès…
- Croire que la seule vie importante que nous ayons à vivre c’est notre aujourd’hui banal et multiforme éclairé par Jésus Christ et sa parole, animés par L’Esprit qui est au plus profond de nous.
“Et (credo) unam, sanctam, catholicam, et apostolicam Ecclesiam.” (en latin)
Et (je crois) l’Église, une, sainte, catholique et apostolique. (en français)
Je crois la politique, diversifiée, humble, juste (pas fausse, pas injuste) et contagieuse.
Autrement dit, “qu’est-ce que je veux exactement ?”
Une politique, diversifiée, humble, juste (pas fausse, pas injuste) et contagieuse ?
Le moment présent (chronos ?) est le bon moment (kairos ?) pour faire le choix de la politique, pour entrer dans le Royaume de justice et de paix.
Soyez-en vraiment convaincus : le Christ n’enlève rien de ce qu’il y a de beau et de grand en vous, mais il mène tout à sa perfection, pour la gloire de Dieu, pour le bonheur des hommes, pour le salut du monde. Discours du Pape Benoît XVI
Accueil des jeunes lors des JMJ à Cologne le 18 août 2005
http://www.mavocation.org/pdf/2005-08-18-Benoit-XVI-accueil-jeunes-jmj.pdf