Courtisans d’hier… (et d’aujourd’hui ?)
Par Paul Fleuret
Juste avant le passage d’évangile de ce jour, on lit la troisième annonce de la Passion. Chacune des trois est à chaque fois suivie d’une scène d’incompréhension de la part des disciples : c’est Pierre qui se rebiffe, puis les disciples qui discutent pour savoir qui est le plus grand parmi eux. Et ce jour Jacques et Jean briguent les premières places à gauche et à droite de Jésus glorifié. Ily aura bien deux hommes à ces places d’honneur : Avec lui sont crucifiés deux brigands, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche. » (Mc 15)
La réponse de Jésus à la demande de ces deux inconscients est écrite par Marc. Elle suppose en effet connaissance de la façon dont Jésus est mort dans la violence, mort dont il ne pouvait rien connaître à l’avance (comme tout homme). L’allusion au baptême suppose aussi la pratique baptismale du groupe chrétien. Le baptême par immersion est une mort symbolique. Paul l’avait précédemment écrit aux Romains : « Baptisés dans le Christ Jésus, c’est dans sa mort que nous avons été baptisés. Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort. » (Rm 6). L’image de la coupe renvoie à la coupe bue lors de la Cène, « coupe du sang de l’alliance qui va être répandu pour une multitude » et à la prière à Gethsémani avant l’arrestation : « Père, éloigne de moi cette coupe ! » (MC 14)
La demande des deux frères suscite l’indignation des autres apôtres. Consigne est alors donnée pour le fonctionnement du groupe – donc de la communauté de Marc (et de nos Églises ?). Les grands prennent des décisions d’autorité, alors qu’ils devraient se comporter en serviteurs – et même en esclaves ! Jésus et/ou Marc s’inspire ainsi du poème d’Esaïe le prophète dans les Chants du serviteur : « S’il offre sa vie en sacrifice expiatoire, il verra une postérité. Le juste, mon serviteur, rendra justes les multitudes dont il portait le péché. » (Es 53). « Donner sa vie en rançon pour la multitude » est évidemment une relecture de la mort de Jésus par les théologiens de la communauté. Jésus est mort pour être allé jusqu’au bout de son engagement de vie pour annoncer-inaugurer le Royaume. Et les chrétiens ont aussitôt théologisé cette mort, avec, dans la pensée, les rites du temple pour le pardon des péchés.
Source : Golias Hebo n°691
Source de l’illustration : https://dimail.over-blog.com/article-13595657.html