AU NOM DE TOUS MES FRÈRES #18 FÉVRIER 2022 |
DIFFUSER L’INFORMATION SOUS DICTATURE : LES REVUES CHRÉTIENNES CLANDESTINEAu Chili, la période de la dictature civico-militaire est marquée par une forte censure et par la complicité des médias dominants qui relayent la propagande du régime. 📻 Dès les premières heures consécutives au coup d’État, les principales radios de gauche sont réduites au silence ; l’un des seuls moyens de s’informer par les ondes radiophoniques devient « Escucha, Chile », une émission de résistance diffusée par Radio Moscou depuis l’URSS et écoutée au Chili jusqu’à la fin de la dictature. 🗞 La presse écrite d’opposition est également rapidement détruite. Les journaux publiant sous la dictature sont directement liés à l’oligarchie et supportent le régime de Pinochet, dont ils alimentent la propagande. L’orientation conservatrice de ces médias dominants ne date pas de septembre 1973 : dès l’élection de Salvador Allende en 1970, le propriétaire du principal journal du pays (El Mercurio) s’était rendu aux États-Unis pour s’entretenir avec le diplomate américain H. Kissinger et le directeur de la CIA sur la possibilité de bloquer l’investiture du président socialiste et sur les modalités d’un éventuel coup d’État. 🛑 Dans ce contexte, un enjeu majeur pour les réseaux de résistance réside dans la capacité à créer et diffuser une information alternative et critique, en maintenant des contacts permanents avec les classes populaires. Les réseaux chrétiens de l’Ouest de Santiago accordent une grande importance à ces activités et se servent de la position de l’Église pour faire émerger une production dissidente, appuyée par les activités du Vicariat de la Solidarité, dont le travail facilite la documentation des exactions de la police et des militaires. Certaines branches clandestines de ces réseaux s’appuient sur le christianisme pour soutenir la défense des droits humains, s’inspirant des martyrs de la dictature, comme le bulletin mensuel Juan Alsina, Chrétiens dans la résistance, nommé en hommage à un prêtre espagnol fusillé par les militaires en septembre 1973. ⛪ De manière analogue, la revue mensuelle No Podemos Callar (« Nous ne pouvons pas nous taire ») est créée à Santiago dès 1975. Ses numéros, qui s’appuient sur des passages bibliques pour appeler à la résistance, sont distribués dans les paroisses, les réunions pastorales et dans la rue, par les grilles entrouvertes des maisons ou les fenêtres des voitures. Quelques années plus tard, pour des raisons de sécurité, la revue est remplacée par Policarpo qui conserve la même ambition. Nadine Loubet joue un rôle clé dans la préparation de cette revue aux côtés d’autres religieuses, comme vous le découvrirez dans le chapitre 8 de notre livre. 🗞 Les réseaux anti-dictature chrétiens participent donc à la bataille de l’information sous la dictature. Les religieuses et laïques jouent un rôle essentiel dans l’édition et la diffusion des journaux de résistance car elles mettent à profit leurs compétences techniques (stencils, mimographes) ainsi que leur position dans les secrétariats des institutions chrétiennes pour réunir les ressources nécessaires à leur impression. HOMMAGE À MICHEL DONABIN, AMI DE NADINE LOUBET Le 15 mars prochain, un hommage sera rendu à Michel Donabin, décédé le 31 janvier 2022 (ci-dessus en compagnie de Sœur Odile et Soeur Magdalena au Montijo) à l’Espace Grésillons (92230 Gennevilliers). 🎶 📽 Co-organisé par l’Association France Amérique Latine (FAL) et l’Association des Ex-Prisonniers Politiques Chiliens en France (AEXPPCH), l’hommage sera accompagné de musique chilienne et de la projection du documentaire Au nom de tous mes frères. Rencontré au début de notre enquête en 2019, Michel avait connu Odile dans la Zone Ouest de Santiago (Chili) où il s’était rendu comme prêtre salésien Fidei donum et était devenu un de ses proches amis. Lors de son expulsion du Chili en octobre 1974, il rapatria les carnets de la sœur en France et les conserva avec soin jusqu’à ce qu’elle décide de les récupérer. Sans lui, le documentaire Au nom de tous mes frères et le livre en préparation n’auraient jamais pu voir le jour. Nous nous associons donc pleinement aux hommages qui lui seront rendus à cette occasion. |
SUR LES TRACES DE NADINE LOUBET : 🇦🇷 À l’occasion d’un voyage destiné à rencontrer les amies de Nadine Loubet en Uruguay et les anciennes élèves de la congrégation Sainte-Catherine de Sienne, Samuel s’est ensuite rendu sur la tombe de la sœur française à Lobos en Argentine, où elle avait terminé sa vie auprès de sa famille. Des fleurs ont été déposées au nom de tous ses frères et sœurs du Chili qui n’avaient pu lui dire au revoir dignement avant son départ en Argentine. C’est justement grâce à la collaboration des employés de ce cimetière municipal qu’une partie de l’histoire de la famille Loubet avait pu être retracée au début 2020, comme vous le découvrirez dans le premier chapitre de notre livre, consacré à « l’exil de la famille Loubet » en Amérique latine après la Seconde Guerre mondiale. |
CRÉATION D’UNE PAGE WIKIPÉDIA : En janvier dernier, nous avons également procédé à la création d’une page Wikipédia consacré à Nadine Loubet. Cette action s’inscrit dans notre démarche mémorielle et historique qui vise à étendre le « droit à l’histoire » à celles qui, aux côtés du clergé masculin, furent aussi l’Église et s’engagèrent radicalement dans la lutte contre la dictature et pour la dignité humaine durant la dictature chilienne. |
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🙏 Merci aux religieuses, ex-religieuses et laïques qui collaborent activement à ce projet et à tous nos partenaires. N’hésitez pas à nous écrire si vous souhaitez organiser un événement pour les commémorations de septembre 2023 ou pour obtenir les droits de projection du documentaire “Au nom de tous mes frères”. Dans l’attente de pouvoir vous en dévoiler un peu plus … Samuel Laurent Xu et Gaspard Marcacci Thiéry. aunomdetousmesfreres@gmail.com https://linktr.ee/iglesialiberadora |
Faire société autrement