Marcel Metzger.
« L’archevêque Ravel a été officiellement démis de ses fonctions », annonçait le quotidien Les Dernières Nouvelles d’Alsace le dimanche 28 mai. Une page est tournée. Mais ce personnage a suffisamment accaparé l’attention, bloqué les projets pastoraux et détourné le diocèse de sa mission pour qu’on l’oublie. Le temps est venu de réfléchir à un nouveau mode de nomination.
Ce fiasco devrait alerter les instances concernées sur les procédures de nomination des évêques. Au moment de sa nomination à Strasbourg, Luc Ravel était totalement inconnu des catholiques d’Alsace et lui-même ignorait tout de notre diocèse. Il était absolument impossible d’évaluer la pertinence de cette affectation restée secrète jusqu’au dernier moment. L’institution ecclésiastique romaine déplaçait cet évêque comme un pion sur un échiquier, alors que la dimension relationnelle avec les nouveaux diocésains est primordiale en pastorale.
C’est une alerte qui devrait conduire les instances responsables, à savoir les dicastères romains, les nonciatures et la Conférence des évêques de France, à modifier fondamentalement les procédures de nomination des évêques, telles qu’elles ont été mises en place à la suite du concile Vatican II. À l’époque, les réformes conciliaires avaient pour objectif de retirer aux instances politiques le droit de nomination des évêques, mais ce sont les dicastères de la Curie romaine qui se sont réservé ce droit. Ces nouvelles dispositions ont conduit à la mise en place de procédures secrètes, laissant les principaux intéressés totalement hors circuit, à savoir le « troupeau » en attente d’un pasteur.
La tradition chrétienne la plus vénérable confiait initialement à chaque Église locale le soin de choisir ses pasteurs. Elle est ainsi formulée dans la Didachè (à la fin de l’ère apostolique) : « Élisez-vous des évêques et des diacres dignes du Seigneur » (15,1). Cette pratique de l’élection par la communauté locale ou ses représentants a été mise en œuvre, tant bien que mal, pendant des siècles, et s’est maintenue de nos jours dans quelques rares diocèses, en Allemagne et en Suisse, où les chanoines de la cathédrale interviennent directement dans la nomination de l’évêque. Ainsi les représentants de l’Église locale se sentent responsables de la conduite du diocèse et l’élu pareillement devant eux.
Dans la situation présente en France, vu la brièveté des mandats et le rapide turnover des évêques, qui passent si fréquemment d’un siège à un autre, il est indispensable de constituer dans chaque diocèse un conseil pour la désignation de l’évêque. Des laïcs devraient en faire partie, selon la dynamique du Synode. Ces conseils auraient pour charge de proposer des candidats lors de la vacance du siège épiscopal ou, le cas échéant, d’évaluer les candidatures proposées par les instances supérieures.
Golias Hebdo 772, p. 3