Est-ce que Dieu intervient directement dans les vies ?
Jean Combe.
La réponse varie d’un individu à l’autre en fonction de son âge, de son éducation, de son statut, de son expérience…
À ce sujet, j’ai une petite histoire.
C’est un curé qui tombe en panne en rase campagne. Il soulève le capot de la voiture, mais comme il n’a pas étudié la mécanique au séminaire (ça paraissait moins utile que la théologie !), il a peine à détecter d’où vient la panne. Alors, comme souvent lorsqu’on est à la peine, « Mon Dieu, Mon Dieu, venez à mon secours ! ».
Il furète toujours sous le capot, mais la voiture ne répond pas. Et voici qu’un paroissien passe par là. Il le reconnaît. « Quelque chose va pas, Monsieur le curé ? » « Non, non, une bricole. ça va repartir. Merci de vous être arrêté. » Et le paroissien repart. 10 minutes plus tard, c’est le boulanger qui passe en faisant sa tournée. « En panne, monsieur le curé ? » « Non, ce n’est rien. Une bougie mal vissée. Et puis vous savez, Dieu ne me laisse jamais tomber ! « Ah bon ! » Et le boulanger crédule s’éloigne. Un confrère voisin passe par là. Il reconnaît bien le curé, mais il est pressé. « J’ai encore deux messes et un baptême. J’ai pas le temps. » Toto, lui, est avec son père; mais comme le père est un tantinet anticlérical, il fait mine de ne rien voir. Toto l’a repéré « Arrête-toi, papa. C’est le curé que je sers la messe. » Papa consent à faire marche arrière. « Ah ! Merci Toto, tu es bien gentil. » « Vous savez, Monsieur le curé, mon papa, il est mécanicien. » « Non, tout va très bien, mon petit. Sois tranquille. Rentre chez toi et dis merci à ton papa. Dieu me vient toujours en aide ! » Et Toto repart avec son père. Mais la voiture était toujours en panne, comme le canard de Robert Lamoureux qui était toujours vivant !
Alors le curé, à bout de nerfs, se tourne vers Dieu. « C’est comme ça que vous laissez tomber vos serviteurs fidèles ! Voilà 15 ans que je vous fais confiance et vous me laissez tomber ? » Alors une petite voix se fit entendre : « Mon pauvre curé ! Je t’ai envoyé un paroissien ; tu l’as renvoyé. Je t’ai envoyé le boulanger ; tu l’as remercié. Je t’ai même envoyé un mécanicien ; et tu as refusé son aide. Alors, maintenant, tu te débrouilles tout seul ! »
Certains vous diront que le paroissien, le boulanger, le mécanicien, tout ça c’était la main de Dieu. D’autres vous diront que c’était le hasard, un concours de circonstances ou mieux, la solidarité humaine. À chacun d’interpréter et de donner sens !
Mais j’ai encore une autre histoire aujourd’hui. C‘est celle d’un évêque.
Il vient de constater que pour la cinquième année, la collecte du denier du culte est en baisse. « Comment faire pour payer mes curés ? Heureusement ou malheureusement, ils sont de moins en moins nombreux. Je viens d’enterrer le douzième cette année et pas un jeune prêtre à l’horizon. Seigneur, faites quelque chose. Je fais prier pour les vocations dans toutes les paroisses et rien ne vient. Pas la moindre lueur ! Il faut dire qu’avec les histoires d’abus sexuels, ça nous fait une belle contre-publicité ! Le métier semble n’attirer que les conservateurs. On essaie de ne pas trop bouger dans la liturgie, dans le dogme… pour ne pas désarçonner les gens, mais rien n’y fait. Alors, seigneur, si ça continue, il va falloir bientôt fermer boutique ! Pourtant, nous sommes vos représentants autorisés. Ça devrait marcher !! »
Alors une petite voix se fait entendre, venant de la sacristie : « Mon pauvre évêque, tu es bien à plaindre. Je vous ai envoyé des têtes pensantes, des Teilhard de Chardin, des de Lubac, des Hans Kung, des Cardonnel, des Joseph Moingt. Je vous ai envoyé des hommes d’action : des Oscar Romero, des Hélder Câmara, des Guy-Marie Riobé, des Jacques Gaillot pour ne citer que des prêtres ou évêques,
Et vous les avez ostracisés, mis de côté, écartés de votre chemin, marginalisés.
Alors maintenant, démerdez-vous tout seuls ! »