Jaume PATUEL PUIG

Le monde occidental, dont la culture judéo-chrétienne a façonné l’histoire avec ses grandes lumières et ses grandes ombres, intégrant une axiologie, entre maintenant dans une nouvelle vision ou paradigme technocrate, qui en soi n’a ni ne présente aucune axiologie ou échelle de valeurs. On peut alors comprendre la récupération ou la restauration des temps de la nature avec leurs folklores. L’être humain est un « homo ludens et religiosus » ou « un enfant joueur et religieux ».

Tout comme au solstice d’hiver nous profitons des fêtes d’hiver qui remplacent les fêtes de Noël, maintenant au lieu de la Semaine Sainte ou de la fête de Pâques, nous profitons des FÊTES DE PRINTEMPS : l’équinoxe qui nous apporte la même durée de lumière du jour que d’obscurité de la nuit, symbolise la renaissance, la fertilité et le renouveau de la nature. C’est un moment clé pour de nombreuses cultures qui célèbrent la transition entre l’hiver et la période de croissance du printemps. Le tout vécu dans le monde agricole.

Nous savons qu’avant le christianisme, de nombreuses cultures célébraient des festivals de printemps liés à la renaissance de la vie. Par exemple, dans l’Égypte antique, l’équinoxe coïncidait avec des fêtes en l’honneur d’Osiris et d’Isis, liées au cycle de la vie, de la mort et de la renaissance. À Rome, on célébrait les fêtes de Flora, déesse des fleurs et de la fertilité, et les Hilaria [1] en l’honneur de Cybèle, déesse mère de la nature.

Ces fêtes étaient également marquées par les œufs et les lapins comme symboles de fertilité, de renouveau et de renaissance. Ils représentent le début d’une nouvelle vie fertile, un parallèle naturel avec le printemps, lorsque la terre renaît après l’hiver.

Et lorsque la religion chrétienne est devenue non seulement la principale (325 apr. J.-C.) avec Constantin, mais aussi la religion officielle (380 apr. J.-C.) avec Théodose, les fêtes de printemps se sont peu à peu transformées en Semaine Sainte. Et essentiellement à partir des XII^e et XIII^e siècles. Beaucoup de ces rituels ont été adaptés et absorbés par les célébrations chrétiennes, comme la synchronisation avec Pâques : la Semaine Sainte, qui culmine avec le dimanche de Pâques, est célébrée le premier dimanche après la première pleine lune suivant l’équinoxe de printemps. Cette connexion avec le calendrier lunaire et solaire rappelle les rituels païens. Et pendant le Carême (la période de 40 jours avant Pâques), le christianisme médiéval interdisait de consommer des œufs et d’autres produits animaux. À l’arrivée de Pâques, les œufs accumulés étaient utilisés comme symbole de célébration. L’œuf a été christianisé comme symbole de la résurrection du Christ : la coquille dure symbolisait le tombeau, et l’ouverture de l’œuf, sa sortie victorieuse vers la vie éternelle. Pâques comme transition : tout comme le printemps marque le passage d’un cycle à un autre (hiver à été), Pâques célèbre une renaissance spirituelle dans le christianisme avec des éléments visuels (œufs et lapins) qui renforcent cette idée.

Aujourd’hui, le lapin de Pâques est devenu une figure commerciale et ludique, surtout dans les pays anglo-saxons et autres, mais son origine symbolise la fertilité et la générosité de la nature.

Et en atterrissant dans notre pays, il y a eu une fusion de traditions. Les célébrations de la Semaine Sainte ont assumé une forte charge symbolique chrétienne, mais ont également conservé certains éléments hérités des fêtes de printemps. Ainsi, les processions avec musique, chars et fleurs rappellent d’anciens rites de purification et d’offrandes à la nature. Les feux de Pâques dans certaines régions se connectent avec des traditions liées à la lumière et au cycle solaire.

Ce panorama étant narré, qui se maintient, il faut ajouter aujourd’hui, en plein XXI^e siècle, les voyages de repos et culturels, ainsi que quelques jours de vacances et de loisirs. Sans cacher que le monde entrepreneurial et économique est celui qui anime tout ce nouveau panorama. Et si nous ajoutons la semaine de travail de quatre jours, les week-ends plus longs, les travaux plus intenses dans certains secteurs et d’autres considérations : Pâques est remplacée socialement et dans la nouvelle culture par une semaine, pour le moment, de voyages ou de jours de repos ou de jours de recueillement et de silence.

Comme je l’ai déjà indiqué, l’équinoxe a été associé à la Pâques chrétienne, qui symbolisait la résurrection du Christ comme renouveau spirituel, remplaçant le concept païen de renaissance de la nature. Et dans cette adaptation, en plus des symboles des œufs et des lapins comme les manifestations processionnelles, on trouve l’utilisation de fleurs, de chants comme les « caramelles » [2], de danses comme celle de la mort de Verges [3], etc. Le tout sous la houlette des institutions ecclésiastiques.

Et comme à la fin du Moyen Âge (à partir du XII^e siècle), à la suite d’épidémies et autres maladies, on a mis sur la croix : le « Christ » douloureux, souffrant, maltraité et comment « Dieu » a souffert… et puis les pénitences, les confréries… et l’apaisement de la colère de Dieu, exprimée dans la croix de Jésus-Dieu. Le Vendredi saint a recouvert, et c’est ainsi, le dimanche de Pâques, qui est l’expression du message de Jésus. En Espagne, le Vendredi saint est un jour férié… La Passion a plus de force que la Résurrection, populairement…

Et pour renforcer l’idée, n’oublions pas l’influence de la Contre-Réforme (XVI^e-XVII^e siècle). Pendant la Contre-Réforme (après le Concile de Trente, 1545-1563), l’Église a renforcé les célébrations de la Semaine Sainte en leur donnant un caractère plus solennel et théâtral.

Maintenant, contemplant ce panorama dans le nouveau paradigme technocrate où se trouvent les fêtes de printemps ou la Semaine Sainte, nous devons prendre l’essence de ces fêtes qui peuvent mener, et mènent de fait, aussi, à des jours de réflexion, à des jours de silence de manière intensive. Et de cette retraite, il faut construire une nouvelle échelle de valeurs dans la société de la connaissance, du changement rapide, comme le silence, la réflexion, la méditation, la mutation intérieure afin d’être plus humain. En imprégner l’ego et le faire vibrer pour qu’il sorte de son petit espace personnel pour aller vers une nouvelle vision holistique, afin d’humaniser l’Humanité. Réaliser sur cette planète, qui est notre habitat, un lieu de paix, de concorde et de respect des différences afin d’atteindre une fraternité comme une sororité. Une grande liberté et moins de fossé économique. Une vie en profondeur sachant que nous sentons la Réalité Ultime dont l’origine est toujours présente. Ou métaphoriquement « Nous sommes des rayons du Soleil ». Le monde chrétien s’est emparé et a transformé les fêtes préexistantes, et maintenant le monde économique, commercial, technologique… est en train de faire un processus similaire.

Heureuses fêtes de printemps ou de renaissance fertile pour une paix mondiale selon les enseignements des grands sages. Parmi eux, Jésus qui est né et a vécu à Nazareth, mais est mort à Jérusalem à cause du malaise qui a affecté les pouvoirs politique et religieux.

BONNE PÂQUES ou PASSAGE DE LIBÉRATION.

Notes :

[1] Les Floralies

[2] Les caramelles de Pâques en Catalogne sont des chants qui racontent la mort et la résurrection du Christ. Elles sont jouées lors de la Messe du dimanche de la Résurrection.

[3] Verges, petit village de la Costa Brava où se déroule « la danse de la Mort « le soir du Jeudi Saint.

Source ; https://www.atrio.org/2025/03/las-fiestas-de-primavera-o-equinoccio-de-primavera-2/