Ouverture du Sommet de Rome sur les abus sexuels
Par Régine et Guy Ringwald
Une réunion tout-à-fait hors normes se tient à Rome du 21 au 24 février sur les abus sexuels du fait du clergé : plus de cents présidents de conférences épiscopales, des supérieurs d’ordres religieux, et les responsables des dicastères concernés au Vatican. Une assemblée réunie un peu dans la hâte, après la pluie de scandales qu’on a connus en 2018. (voir Golias Hebdo n° 564).
Mercredi 20 et jeudi 21, les représentants des victimes se sont montrés très présents et très incisifs. Ce sont principalement ECA, organisation internationale fondée à Genève en juin 2008 [1], SNAP (Etats-Unis) et aussi Bishop Accountability qui a pour but de recenser et dénoncer les évêques qui couvrent les abus. Les victimes demandent avec détermination une vraie tolérance zéro, moins de secret (en particulier sur les procès canoniques). Les travaux de la conférence se sont ouverts par des interventions vidéo de victimes dont Juan Carlos Cruz, chilien, victime de Karadima, et une femme, qui a subi des abus sexuels de la part d’un prêtre pendant des années, et a été obligée d’avorter trois fois.
Le Pape François a présenté un programme en 21 points qui a été rendu public. Il ne satisfait pas l’attente des victimes. En fait, il est assez complet quant aux sujets abordés, mais pas assez catégorique dans les termes. On a plutôt l’impression de lire un exposé de ce qui aurait toujours dû exister.
Relevons qu’une femme est intervenue (ce ne sera pas la seule), Linda Ghisoni, sous-secrétaire du dicastère pour les laïcs, la famille et la vie. Elle a insisté sur le fait que la participation des laïcs était indispensable dans la lutte contre la pédophilie.
Le sommet est prévu devoir s’achever lundi 25, mais les coordinateurs doivent se retrouver dès lundi pour tirer des conclusions.
Et comme nous avons toujours, à NSAE, un œil sur le Chili, on trouvera, ci-dessous le texte d’un communiqué du Réseau des Laïcs du Chili (organisateurs du récent synode des laïcs). Le président de la conférence épiscopale, Mgr Santiago Silva Retamales, ne participe pas au sommet, du fait qu’il est l’objet de poursuites. Il est remplacé par le secrétaire de la conférence des Évêques, Fernando Ramos.
Note :
[1] https://nsae.fr/2018/06/09/chili-apres-la-lettre-du-pape-aux-laics/
RÉSEAU NATIONAL DES LAÏQUES ET LAÏCS DU CHILI
COMMUNIQUÉ :
« Et ils forcèrent un passant, Simon de Cyrène, père d’Alexandre et de Rufus, qui venait de la campagne, à porter sa croix » Mc 15, 21
Le Pape François a convoqué le Sommet sur les abus sexuels sur mineurs qui se tient depuis plusieurs jours au Vatican. Le Saint-Père veut que nous nous concentrions sur les enfants, que nous donnions la parole à ceux qui n’en ont pas. Bien qu’il nous ait demandé à ne pas exagérer les attentes de ce sommet, nous sommes convaincus qu’il y a des choses que nous ne pouvons continuer à remettre à plus tard, car nous sommes pleins d’espérance.
Nous, laïques et laïcs catholiques du Chili, nous vivons cette rencontre d’une façon particulièrement douloureuse, car nous sommes l’un des pays du monde où il y a le plus d’abus ce qui nous inquiète vivement. Du fait de la dure réalité, nous continuons à vivre des situations de déni, de dissimulation et de mépris pour les victimes. Nombre de nos prêtres et évêques sont plus préoccupés par la situation de scandale que par la recherche des causes profondes pour construire une Église sure et sans abus.
Nous demandons à Fernando Ramos, représentant des évêques du Chili, présent à ce sommet, d’être fidèle aux victimes, nous sommes loin de surmonter la sombre réalité de l’Église chilienne et mondiale. C’est seulement avec des actions concrètes que nous le pourrons en mettant un terme au système ecclésial abusif où Jésus est totalement absent.
Quelques actions importantes à prendre :
- Tolérance Zéro pour tout comportement abusif.
- Collaborer avec la justice civile d’une manière efficace, en mettant toute l’information disponible afin que les agresseurs et les dissimulateurs soient condamnés à la prison.
- Créer des protocoles clairs sur le soutien complet aux personnes victimes d’abus
- Financer la défense des victimes et non celle des auteurs d’abus.
Nous apprécions la participation exceptionnelle des victimes, en particulier Juan Carlos Cruz, qui ont fait preuve de vérité et de courage.
Il nous semble important que les évêques assument leur responsabilité pastorale, et invitons chaque évêque et administrateur apostolique à en faire une réalité dans leur diocèse.
Réseau National des Laïques et Laïcs du Chili – Chili, le 21 février 2019