Par Paul Fleuret
Jésus est arrivé à Jérusalem. Il a chassé les vendeurs du temple puis a été soumis à des questions par les autorités religieuses lors de controverses animées. La dernière : le cas fictif d’une femme veuve obligée d’épouser successivement les sept frères de son défunt mari ! Un scribe, moins borné que les autres, vient poser à Jésus une question de fond : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Il faut rappeler que, de commandements, il y en avait pléthore quelque 630 ! La réponse est simple et évidente : la foi au Dieu un. Mais… Mais Jésus ajoute immédiatement le second qui concerne le prochain. Ces deux commandements n’en font plus qu’un comme l’indique la phrase qui joue sur un autre que ceux-là. Plus tard, un certain Jean dans sa première lettre écrira : « Si quelqu’un dit j’aime Dieu et qu’il déteste son frère, c’est un menteur. » (1Jn4)
Le scribe est entièrement d’accord et répète les deux commandements. Il ajoute même, chose étonnante, que les rites du temple sont secondaires. Ce disant, il montre qu’il vit dans la ligne des prophètes du temps passé, tel Osée qui fait dire à Dieu : « C’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices. » (Os 6) Ce scribe est un homme ouvert qui n’a pas peur de mettre en cause la valeur des sacrifices et leur existence même, alors que la discussion avec Jésus a lieu dans le temple ! Comme lui dit Jésus : « Il n’est pas loin du Royaume de Dieu. » Dit autrement : les limites ne sont pas toujours là où on veut les mettre. Il y en a qui sont officiellement en dehors du groupe disciple et qui y sont profondément par leur esprit et leur agir (et inversement…). Rappelons-nous l’épisode où le disciple Jean signale à Jésus « avoir vu quelqu’un expulser des démons en ton nom, et qui n’appartient pas à notre groupe » – et Jésus dit : « Ne l’en empêchez pas, car qui n’est pas contre nous est pour nous. » (Mc 9)
Voilà un petit épisode de l’évangile qui révèle une grande profondeur et l’essentiel. L’essentiel de la foi : l’amour de Dieu et des autres, c’est tout un. L’essentiel de la vie ecclésiale : l’ouverture et l’accueil de tous, loin de tout sectarisme.
Source : Golias Hebdo n°693