Communiqué de presse de NSAE
En janvier 2022, l’évêque de Jalandhar, (État du Penjab, en Inde) Franco Mulakkal, était acquitté en première instance par un tribunal de Kottayam (Kerala) de l’accusation de viols portée contre lui par une religieuse de la congrégation des Missionnaires de Jésus. Cet acquittement avait causé un énorme scandale et NSAE l’avait dénoncé en son temps. La religieuse, mais aussi l’Etat de Kerala, ont fait appel dont on attend les suites.
Le 8 février, L’évêque Mulakkal a été reçu par le pape François qui, selon lui, se serait réjoui de l’issue du procès.
Les organisations de religieuses et de théologiennes qui soutiennent la victime manifestent leur inquiétude. Elles font remarquer que l’appel étant en cours, l’évêque ne peut se prévaloir d’être dégagé de l’accusation qui pèse sur lui. Elles craignent que l’évêque qui a été suspendu de ses fonctions lors du procès ne retrouve un poste de responsabilité sans attendre l’issue des procédures en cours.
Elles regrettent que si l’évêque Mulakkal a été reçu par le pape, aucune des interventions, y compris des lettres au pape lui-même, n’aient jamais été entendues. Les religieuses des missionnaires de Jésus qui soutiennent la victime ont refusé d’être déplacées et sont ostracisées au sein de leur couvent.
L’organisation Sisters in Solidarity a écrit, en date du 21 février, au pape François ainsi qu’aux responsables des dicastères concernés et à ceux de l’Église catholique en Inde, une lettre signée de responsables de tout le pays. Nous donnons ci-après une traduction de leur texte.
NSAE qui a suivi l’affaire depuis ses débuts exprime une nouvelle fois sa réprobation du sort réservé à des religieuses soumises à l’abus de pouvoir des clercs et dans ce cas d’un évêque. Nous dénonçons l’atteinte de la plus grande gravité dont elles sont victimes dans leur dignité. Nous en appelons aux autorités et au pape François pour que la question soit enfin traitée avec la plus grande rigueur.
Pour le Bureau de NSAE,
Michel Hamon, président
13 mars 2023
assocnsae@gmail.com
Texte joint : Lettre des femmes catholiques indiennes au Pape François
Le 21 février 2023
Sa Sainteté le Pape François,
Palais apostolique,
00120 Cité du Vatican.
Objet : Préoccupations des femmes catholiques indiennes concernant l’affaire de l’évêque Franco Mulakkal.
Cher Pape François,
Nous sommes un groupe de femmes catholiques préoccupées par les abus sexuels du clergé dans l’Église indienne. Nous sommes navrés d’apprendre la visite de Mgr Franco Mulakkal le 8 février 2023 au Vatican. Nous avons lu que vous étiez “heureux d’apprendre qu’il avait eu gain de cause et l’avez consolé de ses souffrances” (Times of India, Thiruvananthapuram, 15 février 2023).
Nous souhaitons porter à votre attention le fait que l’affaire n’est pas terminée. L’Inde a un système d’appel où un tribunal de première instance n’est que le premier échelon. Ainsi, bien que Mgr Mulakkal ait été acquitté par le tribunal de première instance en janvier 2022, l’État et la religieuse survivante ont fait appel devant la Haute Cour du Kerala (Appel déposé par l’État – CrlA 375/22 et Appel de la victime – 7/22). Par conséquent, tant que la religieuse survivante n’a pas épuisé toutes les voies de recours, c’est-à-dire jusqu’à la Cour suprême de l’Inde, Mgr Mulakkal ne peut pas prétendre avoir “gagné l’affaire” et être libéré du crime présumé de viol.
Cher Pape François, alors que vous “l’avez consolé de sa souffrance”, nous sommes tristes que vous n’ayez pas reconnu la douleur et le traumatisme de la Sœur ainsi que ceux de ceux et celles qui l’ont soutenue au cours des quatre dernières années. Bien qu’elle ait écrit à tous les responsables ecclésiastiques auxquels elle pouvait s’adresser à ce sujet en Inde et au Vatican, y compris à vous-même, jusqu’à ce jour, personne ne s’est soucié de tendre la main à la Sœur. Elle et les sœurs qui la soutiennent continuent de souffrir beaucoup d’angoisse d’être ostracisées par les autorités de leur congrégation et les tentatives répétées de les transférer, ce que nous considérons comme une tentative inhumaine de briser la religieuse victime en détruisant son réseau de soutien.
Considérant le grave scandale causé par le comportement de l’accusé de viol, Mgr Mulakkal, et que l’affaire pénale contre lui se poursuit devant le tribunal à l’échelon supérieur, nous supplions le Saint-Siège d’attendre le jugement de la dernière cour d’appel avant de le réinvestir dans toute responsabilité administrative.
Nous prions pour que le Saint-Esprit soit votre guide dans le discernement et le traitement de ces préoccupations critiques et vous permette d’être juste et équitable envers les femmes survivantes.
En Jésus-Christ,