Le petit battement d’ailes d’un papillon
Gilles Castelnau.
Luc 8, 5-8
Un semeur sortit pour semer sa semence. Comme il semait, une partie de la semence tomba le long du chemin : elle fut foulée aux pieds, et les oiseaux du ciel la mangèrent.
Une autre partie tomba sur le roc : quand elle fut levée, elle sécha, parce qu’elle n’avait point d’humidité.
Une autre partie tomba au milieu des épines : les épines crûrent avec elle, et l’étouffèrent.
Une autre partie tomba dans la bonne terre : quand elle fut levée, elle donna du fruit au centuple.
Après avoir ainsi parlé, Jésus dit à haute voix : Que celui qui a des oreilles pour entendre entende !
I – Petit battement d’ailes d’un papillon jadis en Galilée
Jadis en Galilée un mouvement sympathique et heureux avait surgi autour de Jésus de Nazareth, rabbin juif obscur, prédicateur ambulant, vivant dans une partie lointaine et méprisée de l’Empire romain.
– Tes péchés te sont pardonnés, avait-il déclaré à paralysé sans lui demander la moindre repentance et surtout sans attendre le traditionnel Yom Kippour de pardon collectif des péchés. Il lui avait crié : « Lève-toi et marche » et celui-ci avait bondi dans le « salut » d’une vie ainsi régénérée.
C’était un détail insignifiant de la vie de l’immense Empire romain :
– « Que celui qui est sans péché lui jette la première pierre » avait-il dit devant une femme adultère menacée de lapidation par des fous intégristes. Et le peuple entier avait abandonné les pierres de mort, sans s’en rendre vraiment compte s’était détourné de la Loi de Moïse et avait ainsi inauguré une nouvelle ère de tolérance.
– « Ce qui entre dans la bouche ne souille jamais un homme, mais ce qui sort de sa bouche » avait-il dit à propos de l’habitude juive de manger cacher, libérant ainsi l’homme de toute contrainte alimentaire tout en l’orientant vers une parole qui ne « souille » pas l’humanité.
– « Donnez-leur vous-mêmes à manger » à ses apôtres qui se sont découverts alors capables, en union avec lui, de nourrir la foule fatiguée.
Des paroles que l’on n’avait pas l’habitude d’entendre, Esprit oublié des anciens prophètes. Peu de chose, en vérité dans la grande histoire mondiale. Jésus-Christ avait d’ailleurs été vite rejeté par la foule et crucifié par les soldats romains.
Il n’avait été que le petit battement d’ailes d’un papillon dans le vent au fond d’une province éloignée de l’Empire.
Mais le scientifique américain Edward Lorenz avait suscité l’émoi lors d’une conférence de 1972, en disant :
Le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer l’enchaînement d’une tornade au Texas ? »
La parabole du Semeur dit bien que la semence tombant dans la bonne terre produit une récolte « au centuple » – ce qui ne s’est jamais vu et paraît tout à fait impossible.
Jésus, un prédicateur insignifiant s’exprimant dans l’araméen local de Galilée meurt à l’âge de 30 ans : Bien peu de chose dans la vie du monde. Et pourtant, rapidement traduit en grec dans tout l’Empire, on parle de lui et l’impact de son message – qui aurait dû être oublié depuis longtemps – continue de faire des heureux jusqu’à nous près de 2000 ans plus tard !
Le petit battement d’ailes du papillon dans le vent qu’était Jésus-Christ a provoqué un vent mondial.
II – Aujourd’hui sur la terre entière
Aujourd’hui, le petit battement d’ailes du papillon qu’était Jésus-Christ a provoqué un vent mondial sur la terre entière. En Europe, en Russie, aux États-Unis, en Amérique latine, en Afrique. En Chine même une paroisse protestante s’ouvre chaque jour.
C’est la petite voix des évangiles que nous aimons écouter, que l’on répète, que l’on prêche et dont l’effet se fait sentir par-delà les siècles et les continents :
Aujourd’hui parmi nous c’est, sinon une puissante tornade, du moins un souffle léger que nous aimons entendre et qui nous rassemble tout doucement, mais efficacement, parle à nos cœurs, nous relève et nous guérit moralement.
Souffle créateur qui réduit doucement notre stress, régule nos émotions, maintient sous contrôle nos peurs, nos colères et nos ruminations et fait monter tranquillement en nos cœurs la paix intérieure.
• Paralysé pardonné sans s’être repenti le jour du Kippour,
• Femme adultère que personne ne veut lapider parce qu’on ne veut pas de cette atmosphère délétère,
• Libération de la contrainte alimentaire cachère, hallal ou vegan qui empoisonne la vie.
• Multiplication des pains dont on constate qu’elle est bel et bien possible pour nourrir ceux qui ont faim depuis que Coluche et les services d’entraide paroissiaux en ont fait la preuve.
• Et globalement Esprit de de dynamisme créateur, de renouveau, de Résurrection, de libération, qui nous apaise et nous ragaillardit.
Nous sommes libérés de toujours vouloir faire plus. Nous découvrons en nous le courage d’affronter la crainte et la douleur, d’accepter la souffrance et le malheur. Car nous avons compris qu’au milieu de toute obscurité brille une petite lumière obstinée.
Notre désir instinctif de surnaturel et de miracles se mue en méditation apaisée d’unité avec le Dynamisme créateur de Dieu qui développe en nous, comme dans tout l’univers l’élan de vie, l’amour bienveillant et altruiste et la compassion de l’Évangile. Rejet de notre égoïsme instinctif, de notre indifférence aux besoins des autres, ouverture à la joie de l’amour universel, de la fraternité créatrice. Plénitude de la Vie.
III – Petite voix bien peu écoutée
Petite voix bien peu écoutée dans un monde qui en a pourtant grand besoin dans sa dépression et son égoïsme instinctifs, dans sa dépression et son égoïsme instinctifs.
Mais ce monde se fait une bien triste idée de la voix du Christ :
Nos contemporains sont inquiets de la vie du monde, angoissés par tout ce qu’ils voient, tout ce qu’on leur dit. Des jeunes ménages ne veulent plus faire d’enfants. .
Les gens ne vont plus à l’église ou au temple où on les accueille par la mention – réelle ou imaginée – de leurs péchés, de leurs insuffisances, de leurs manques d’amour, de leur égoïsme.
Et où on leur parle plutôt de tout ce qui ne va pas dans un monde présenté comme peu sympathique. Quelle image se font-ils du battement d’ailes inauguré par Jésus-Christ ?
• « La religion c’est tout ce qui est interdit »
Homosexualité, mariage pour tous, IVG, divorce.
• La religion ce sont des histoires surnaturelles incroyables :
Jésus marchant sur les eaux, né miraculeusement d’une vierge, ressuscité corporellement ;
Des dogmes : on n’est pas aimé de Dieu quand on n’est pas baptisé ; un mariage n’est pas valide quand il n’est pas béni par un prêtre : cohabitation, pax…
• L’idée que Dieu se préoccupe de sexe plus que de la qualité de vie de tant de gens.
Il nous faut certainement repenser la manière de comprendre et de présenter le message de Jésus, car le Dieu, la spiritualité que refusent les gens n’est certainement pas ce qu’il enseignait lui-même !
Pourtant nous émettons nous aussi ce petit battement d’ailes de papillon ;
Petite voix qui nous rassemble néanmoins, qui nous renouvelle personnellement.
Battement d’aile d’un lointain papillon qui se fait sentir jusqu’à aujourd’hui dans les cœurs qui s’ouvrent à lui.
Petit souffle que nous transmettons nous aussi autour de nous, sachant qu’il peut, sans que nous comprenions pourquoi ni comment, transmettre sa vie à nos prochains les plus inattendus.
Nous ne sommes, nous-mêmes, que bien peu de choses.
Comme ce lointain juif de Galilée vite crucifié, notre Seigneur.
Nous émettons pourtant nous aussi ce petit battement d’aile de papillon qui provoque un souffle étonnant chez nos contemporains qui écoutent.
http://protestantsdanslaville.org/gilles-castelnau-spiritualite/gc816.htm