Méditer comme une montagne
Jean-Philippe Pierron.
Résumé de l’ouvrage
Et si l’écologie ne pouvait se passer d’une révolution intérieure pour chacun de nous ? Et s’il fallait nous engager dans un véritable changement spirituel pour repenser nos relations aux vivants ?
Il est des écritures de la consolation et des écritures de la colère. Jean-Philippe Pierron a voulu donner dans ce livre surtout les premières. La consolation tente le soin de la relation, là où tous les liens qui comptent ont été dévastés. Ce n’est pas là une amnésie face au malheur, mais une invitation à transformer l’attitude qui plonge dans la désolation. La consolation est la conscience de faire vivre ce que le philosophe Jan Patočka nommait « la solidarité des ébranlés », elle invente ainsi des langages, des expressions, des attitudes où se déchiffre une tentative d’être vivant et où se soutient la possibilité d’habiter encore le monde.
Méditer comme une montagne, c’est prendre la mesure d’une démesure. C’est considérer la nature non plus sur le mode de ce qui se prend, mais par le sentiment d’appartenance qui nous rattache à elle. Les montagnes, eaux, vallées et l’au-delà de l’humain ne sont pas pour nous que des décors, des toiles de fond. Avec eux, notre histoire s’inscrit dans une histoire plus vaste que nous.
Parler de relation spirituelle au vivant étonne. Cela déplace nos assurances et vient mettre du jeu dans nos représentations mentales, bouleversant la place de ces mots massifs qui ont pour certains cessé de nous parler : « nature », « création », « religion ». Parler d’une relation spirituelle au vivant, c’est renouveler nos manières de vivre et dire ce que signifie pour nous être vivant sur la Terre parmi d’autres vivants.
Jean-Philippe Pierron invite dans cet ouvrage à faire un pas de plus et laisser retentir, dans nos itinéraires, ce qui nous lie au vivant. Il ouvre un chemin riche qui mène à une nouvelle forme de disponibilité nourrie par l’expérience artistique aussi bien que par des actions modestes et pleines de sens.
Échanges en groupe à partir du livre
Alphonse Gourlain.
Nous sommes un groupe de 4 personnes actuellement à nous retrouver en Zoom tous les 2 mois environ pour partager nos questions, nos réflexions, nos découvertes, nos encouragements que suscitent nos lectures, ou autres documents. Ce groupe est ouvert et sans engagement. C’est avec plaisir que nous accueillerons ceux qui seraient intéressés (assocnsae@gmail.com).
Nous nous sommes retrouvés pour échanger sur la première partie du livre de Jean-Philippe Pierron, Méditer comme une montagne. Exercices spirituels d’attention à la Terre et à ceux qui l’habitent.
C’est un livre atypique et original, bien écrit, qui sait conjuguer une pensée profonde et des situations concrètes (voir, habiter, goûter, sentir, vibrer, cultiver, oser, travailler, laisser résonner, prendre soin, discerner, apprendre, renoncer …), plein de conseils pour la vie intérieure – pour se « retrouver » – et pour l’action. On y trouve aussi beaucoup de jeux de mots comme « à l’astre qui oriente se substitue un désastre ».
Dans le prélude, l’auteur situe ce livre dans « les écritures de la consolation…cette consolation vibre de la violences des écocides… elle tente le soin de la relation, là où tous les liens qui comptent ont été dévastés … elle n’est pas une manière magique de résoudre le problème. Elle est une tâche ». Elle invite à l’action.
Les phrases qui nous interpellent le plus :
– Prier comme une montagne, entrer dans l’intimité des liens qui nous unissent au monde. « Et sans doute le travail spirituel qu’appelle la transition écologique tient là : se débarrasser de notre souci d’emprise sur la terre pour être en prise avec elle en tant que filles ou fils de la terre, (ADAM en hébreu).
– La sidération de l’auteur, depuis longtemps, de « notre impossibilité à croire ce que nous savons du désastre écologique et social ».
– Son analyse du désir, du besoin, de l’envie et comment le capitalisme sait tirer profit de la confusion qui s’installe et « vendre par ruse sa marchandisation de l’intime ».
– Sa préconisation « d’une écologie de fondation (ou écologie profonde) plutôt qu’une écologie de réparation ».
– Sa définition « d’une relation spirituelle au vivant, aux autres et à nous-même comme le renouvellement de nos manières de vivre et dire ce que signifie pour nous être vivants sur la Terre parmi d’autres vivants ».
– Son invitation à « une écologie intérieure, une écologie spirituelle de l’attention »
– Son invitation à discerner « entre ce qui nous assèche et ce qui nous nourrit ».
Un ouvrage qui nous propose une « conversion » écologique : quel sens et quelle place donnons-nous à l’être humain. L’enjeu est donc « ontologique et spirituel », en particulier, l’auteur ose cette question pour nous essentielle et difficile : « qu’est-ce que vivre une vie écologiquement à la hauteur des enjeux spirituels ? »