La croix du Christ
Karl Krieg (docteur en théologie de l’université de Chicago)
Question
Pourquoi l’Église ne veut-elle pas reconnaître officiellement le fait que de nombreux chrétiens et des membres du clergé n’admettent pas que le sacrifice de la croix puisse expier leurs péchés ? Jésus a été exécuté pour ce qui était, à l’époque, considéré comme un « crime », et non pas pour nous sauver de nos péchés.
Réponse de Karl Krieg
Il y a trois aspects à votre question :
• Ce qui est réellement arrivé à Jésus
• L’interprétation de Paul de la crucifixion
• La position de l’Église aujourd’hui.
• Ce qui est arrivé à Jésus
À cause de ce qu’il était, de ce qu’il faisait et disait, certains ne l’ont pas suivi alors que d’autres sont devenus ses disciples. Ceux-là nous ont laissé deux documents, l’évangile de Thomas et la source appelée Q. Certes, ils ne contiennent aucune référence à sa mort, mais la nouvelle vie que l’Esprit de Jésus initiait en ses disciples tandis qu’il parcourait les chemins de Galilée. Ils révèlent le miroir que Jésus présentait dans lequel les hommes de bonne volonté pouvaient discerner ce qu’est la véritable humanité et prendre conscience de la présence dynamisante de Dieu.
Rien, dans tout cela, qui impliquât un sacrifice expiatoire. Sa mise à mort a été provoquée par le défi qu’il jetait au système patriarcal de classe qui permettait aux riches de s’enrichir et aux puissants de dominer, attitude que l’Église n’a, plus tard, pas su comprendre et qui lui a fait rejeter la crucifixion dans le plan éternel du salut de Dieu.
• L’interprétation de Paul
Les biblistes ne sont pas tous d’accord. Bien qu’un éminent théologien comme John Cobb s’y refuse absolument, on attribue traditionnellement, à la suite de saint Anselme, la mort de Jésus à une expiation ordonnée par Dieu pour les péchés de l’humanité. C’est la théorie de l’« expiation substitutive » que l’Église a rapportée rétroactivement à Paul.
• La position de l’Église aujourd’hui
Aujourd’hui, comme vous le soulignez, l’Église en tant que telle se voit incapable de mettre en question cette incroyable doctrine de l’« expiation substitutive » attribuée à Paul. Elle pense probablement sourdement que ce serait douter de l’infaillibilité de la Bible, position fondamentaliste défendue également par le clergé traditionnel.
Et pourtant, quiconque analyse l’histoire comprend bien que l’essence de Dieu et celle de l’humanité n’ont rien à voir avec une mort sur une croix, mais sont, bien au contraire, fondées sur un amour incarné.
http://protestantsdanslaville.org/gilles-castelnau-spiritualite/gc955.htm