Les évêques allemands face au refus du Vatican de la proposition d’intercommunion entre catholiques et protestants.
Par Cameron Doody
Le veto du Vatican n’est pas « une gifle » : quelques critiques sont « à côté de la plaque »
Certaines des critiques de la Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF) concernant la proposition d’hospitalité eucharistique partagée sont appropriées, tandis que d’autres « sont loin du compte », a déclaré le président des évêques allemands, Mgr Georg Bätzing, le 22 septembre au début de l’assemblée plénière d’automne des évêques à Fulda.
Mgr Bätzing, évêque du Limbourg, a admis qu’il connaissait certains membres de l’Église qui considèrent le « non » de Rome à l’intercommunion comme une « gifle retentissante », non seulement pour les évêques allemands en général, mais aussi pour lui personnellement, en tant que président de la conférence épiscopale et coprésident du groupe d’étude œcuménique des théologiens protestants et catholiques (ÖAK) qui a produit la proposition d’intercommunion « Ensemble à la table du Seigneur ».
Mgr Bätzing a déclaré qu’il ne voyait cependant pas ainsi le veto du Vatican.
Il a déclaré que le document de l’ÖAK de septembre 2019 – qui préconise une « hospitalité eucharistique réciproque » entre catholiques et protestants – s’inscrit plutôt dans le cadre d’une discussion œcuménique plus large dans laquelle le document de la CDF doit maintenant être reçu par les Églises.
L’évêque a déclaré qu’il appartenait tout d’abord à l’ÖAK de répondre aux préoccupations du Vatican, et que les évêques allemands étudieraient également le document romain lors de leurs discussions en assemblée qui se dérouleront jusqu’à jeudi.
Toutefois, bien qu’il ait reconnu les objections « lourdes » du Vatican à la proposition d’hospitalité eucharistique partagée, Mgr Bätzing a déclaré qu’il ne voyait aucune raison de revoir son plan pour mettre la proposition en pratique lors de la Journée de l’Église œcuménique en Allemagne en 2021 à Francfort.
Selon le cardinal : Les évêques ne peuvent pas mettre la proposition du groupe de travail au-dessus de la lettre de la CDF
Dimanche, la nouvelle s’est répandue que le cardinal Luis Ladaria, préfet de la CDF, et le secrétaire Giacomo Morandi avaient écrit aux évêques allemands une lettre de 57 pages, exposant une série d’objections théologiques à la proposition d’intercommunion de l’ÖAK.
La CDF a averti que « la question de l’unité de l’Eucharistie et de l’Église, dans laquelle l’Eucharistie présuppose et entraîne l’unité avec la communion de l’Église et sa foi avec le pape et les évêques, est sous-évaluée » dans le document de l’ÖAK.
Les responsables du Vatican ont également signalé que « les différences doctrinales » entre catholiques et protestants « sont encore si importantes qu’elles excluent actuellement la participation réciproque à la Cène et à l’Eucharistie ».
« Le document ne peut donc pas servir de guide pour une décision individuelle de conscience concernant l’approche de l’Eucharistie », ont écrit Ladaria et Morandi, avertissant également qu’« une ouverture de l’Église catholique vers la communion du repas eucharistique [avec les protestants]… ouvrirait nécessairement de nouvelles failles dans le dialogue œcuménique avec les Églises orthodoxes, et pas seulement en Allemagne ».
Avant la réunion des évêques allemands à Fulda, le président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, le cardinal Kurt Koch, a mis en garde les évêques allemands contre le fait de faire cavalier seul en tant qu’Église nationale sur la question de la communion partagée après la lettre de la CDF.
« Si les évêques allemands devaient accorder à une telle lettre de la Congrégation pour la doctrine de la foi une place moins élevée qu’à un document d’un groupe de travail œcuménique, alors quelque chose ne serait plus correct dans la hiérarchie des critères parmi les évêques », a mis en garde Koch.
Le cardinal – qui a participé à la rédaction de la lettre de la CDF – a déclaré que l’organisme doctrinal du Vatican avait choisi de faire coïncider la missive avec l’assemblée plénière des évêques allemands, pour rappeler à l’épiscopat du pays qu’il n’avait pas l’autorité de décider lui-même d’une question d’Église universelle aussi importante que l’Eucharistie partagée.
Une théologienne prend la défense du progrès œcuménique
De son côté, la théologienne Dorothea Sattler – co-auteure de l’article de l’ÖAK et directrice de l’Institut œcuménique de la Faculté de théologie catholique de l’Université de Münster – a défendu la proposition d’intercommunion et a rejeté l’accusation de la CDF selon laquelle le groupe avait séparé le Christ et l’Église.
En ce qui concerne l’œcuménisme, « nous ne pouvons pas tout recommencer à chaque fois ; il y a déjà tant d’études qui ne sont pas reconnues », a ajouté D. Sattler, soulignant le fait qu’à la lumière des objections du Vatican, « nous sommes certainement prêts à examiner notre document d’un point de vue théologique et à le développer davantage, mais seulement s’il y a au moins la perspective que quelque chose change dans la pratique ».
Source : https://novenanews.com/german-bishops-defiant-vatican-intercommunion/
Traduction : Lucienne Gouguenheim