La crise des abus a conduit le gouvernement australien à ouvrir une procédure classique dans ce pays, dite « Commission Royale », en cas de crise à l’échelle nationale. Cette commission a recommandé à l’Église australienne de relire sa gouvernance. La Conférence des Évêques a donc confié à un groupe d’une trentaine de personnes, clercs et laïcs, australiens et étrangers, la charge de réaliser un audit de la gouvernance de l’Église australienne et d’émettre des recommandations. Le groupe a publié l’an dernier son analyse et ses propositions sous la forme d’un rapport conséquent intitulé : « Lumières de la Croix du Sud ».
La Conférence des Catholiques Baptisés-Lyon en a effectué la traduction et rédigé un résumé, l’une et l’autre accessibles sur son site (http://www.ccb-l.com/) et présentés ci-après .

Promouvoir une gouvernance co-responsable dans l’Église catholique d’Australie
En Australie une commission royale [1] a enquêté de 2013 à 2017 sur les abus sexuels de membres de l’Église à l’encontre d’enfants et a conclu à la déficience des modes de gouvernance et de direction ecclésiaux. En conséquence et dans ses recommandations, cette instance a demandé à la conférence des évêques australiens de procéder à un audit des structures de gouvernance, notamment en ce qui concerne les questions de transparence, de responsabilité, de consultation et de participation des laïcs, hommes et femmes, des diocèses et des paroisses. Cet examen devrait s’inspirer des approches de la gouvernance des organismes catholiques de santé, de services communautaires et d’éducation.
La conférence des évêques catholiques et la conférence des religieux et religieuses australiens ont accepté cette recommandation, dans un document rendu public le 31 août 2018, et ont confié la conduite de cet examen de la gouvernance à un groupe de surveillance. Ce groupe a lui-même constitué une équipe projet.
L’audit a donné lieu à la rédaction d’un rapport d’analyse et de recommandations conséquent (250 p.), publié le 15 août 2020.
Ce rapport est intitulé « Lumière de la Croix du Sud » en référence à Henry Lawson, poète australien, et au prophète Daniel.
Et ceux qui sont sages brilleront comme l’éclat du ciel, et ceux qui ont rendu la multitude juste brilleront comme les étoiles pour toujours et à jamais. Daniel 12, 3
Soyons audacieux, qu’il fasse jour ou nuit
hissons le drapeau de la Croix du Sud !
Soyons fermes – avec Dieu et le droit pour nous -,
sous le drapeau de la Croix du Sud !
Drapeau de la Croix du Sud,
Henry Lawson, 1887

Vingt personnes ont œuvré pour que ce texte important voit le jour : 14 laïcs et 6 clercs et religieux.
Le groupe de surveillance de l’audit comprenait 9 personnes : 5 femmes dont 1 religieuse, 4 hommes dont 1 évêque et un religieux, et l’équipe projet 7 : 3 femmes dont une religieuse, 4 hommes dont un prêtre.
Dans un souci d’ouverture, ils se sont appuyés sur :
- un comité consultatif externe de 4 personnes : 2 théologiens américains dont 1 prêtre, une théologienne et professeure de droit canonique allemande et un théologien, prêtre australien,
- une association basée à Washington D.C., œuvrant pour de meilleures pratiques dans le management et la finance.
Ce rapport comporte les chapitres suivants :
• la récapitulation des 86 recommandations proposées à l’issue de l’audit,
• le rappel des fondements de l’Église, née lors de la Pentecôte, et devant annoncer l’Évangile en paroles et en actes,
• les fondamentaux de l’Église en tant que société humaine avec ses structures, les propositions de l’audit s’inscrivant dans le respect de ces fondamentaux et du droit canon (tout en demandant des ajustements de ce dernier),
• la présentation des principes d’une bonne gouvernance, o l’application de ces principes au fonctionnement diocésain, o l’application de ces principes au fonctionnement paroissial.
Le message principal de cet audit est d’inviter les responsables des diocèses et des paroisses à adopter une culture de la gouvernance conforme à la fois aux fondamentaux de l’Église et aux standards reconnus dans les organisations de nos sociétés libérales démocratiques.
L’exigence est donc forte et multiple, car elle est à la fois sociétale (transparence, responsabilité, gestion des risques, intégrité, subsidiarité), évangélique (service, discernement) et conforme à la grande Tradition de l’Église (collégialité, synodalité).
Le respect des règles qui régissent l’institution Église constitue à la fois la richesse de ce rapport et la limite qu’il n’a pas franchie. Richesse, car ces propositions, conformes à l’esprit que tente d’insuffler le pape François et à l’esprit du droit canon, pourraient être bien accueillies par les ministres d’une institution soucieuse de regagner en crédibilité auprès de ses fidèles et de la société. Limite car il n’aborde ni le terrain de la nature du cléricat ni celui des ministères, mais ces questions ne faisaient pas partie de son cadre.
Les recommandations générales
Après le souhait d’une diffusion de cet audit la plus large possible (recommandations 1 et 2), le rapport établit quatre recommandations générales qui de fait, englobent et structurent les 61 recommandations proposées aux diocèses et les 19 recommandations à destination des paroisses. Nous les reproduisons ici de manière littérale compte tenu de leur importance pour une vision synthétique de cet audit.
- Que les principes de gouvernance ecclésiale qui sont collégialité, synodalité, service, dialogue, discernement, participation et « leadership » se reflètent dans les structures de gouvernance, de prise de décision et dans tous les processus des diocèses, des paroisses et des services ecclésiaux.
- Que l’intégrité, la responsabilité et la transparence se reflètent dans les pratiques administratives et de gouvernance de tous les corps d’Église.
- Que les responsables de l’Église adoptent et s’engagent à mettre en place une culture éthique de participation, des pratiques solides de gestion des risques et une communication efficace.
- Que les services ecclésiaux soient des modèles de rigueur financière et de pratiques administratives efficaces.
Notes :
[1] Dans les pays du Commonwealth une commission royale est une enquête lancée à l’instigation du gouvernement sut un sujet d’importance nationale.
Source : http://www.ccb-l.com/pages/synodalite/conference-du-11-juin-2021.html